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Intervention de Germinal Peiro

Réunion du 14 septembre 2010 à 21h30
Réforme des retraites — Article 26

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGerminal Peiro :

Monsieur le ministre, au cours des derniers jours, vous avez répété à plusieurs reprises que la pénibilité était un problème du temps de travail, pas du temps de la retraite. Comment soutenir une telle idée ? Bien sûr, il faut s'occuper de la pénibilité pendant la vie de travail, et prendre toutes les mesures qui peuvent l'être pour la réduire. Mais comment ne pas considérer que la durée du temps de travail fait aussi partie de la pénibilité ? Il faut voir dans quel état de santé on est lorsque vient l'âge de prendre sa retraite. Toutes les études montrent que les conditions de travail ont des conséquences sur la durée de vie et la pénibilité durant le travail aura des conséquences sur la qualité de la vie que l'on mènera à la retraite.

Tous ceux qui effectuent des travaux pénibles, qui sont exposés au froid ou à la chaleur, qui travaillent la nuit, font un travail posté, font les trois huit, ont une santé altérée. Regardez l'état de santé, physique et psychique, à soixante ans, de ceux qui ont travaillé sur un chantier toute leur vie. Vous conviendrez que cet état de santé justifierait qu'ils fassent valoir leurs droits avant cet âge.

L'équité pour la retraite, ce n'est pas de fixer le même âge de départ pour tous. C'est au contraire de différencier la date de départ à la retraite. Cela devrait s'imposer à nous sur tous les bancs, puisque nous répétons, les uns et les autres, qu'un cadre homme vit en moyenne sept ans de plus qu'un ouvrier. Ce devrait être une évidence pour tous qu'il faut différencier l'âge de départ à la retraite en fonction de la pénibilité du travail pendant la carrière.

Or, au lieu de prendre cette mesure d'équité, vous avez choisi d'aggraver cet état de fait en portant de soixante-cinq à soixante-sept ans l'âge de liquidation de la pension sans décote. On vous l'a dit et redit, ce sont les plus fragiles, les plus pauvres, ceux qui ont effectué les métiers les moins qualifiés, les femmes, qui ont des carrières plus incomplètes, qui seront touchés par ces mesures. Malgré le fait qu'elles ont effectué un travail plus pénible, ces dernières devront travailler jusqu'à soixante-sept ans, pas forcément pour avoir une carrière complète, mais pour ne pas être pénalisées et d'une certaine façon punies pour avoir une carrière incomplète.

Vous aggravez aussi la situation en portant de soixante à soixante-deux ans l'âge auquel on pourra faire valoir ses droits. Encore une fois, est-il normal que quelqu'un qui commence à travailler à dix-huit ans aujourd'hui, donc quelqu'un qui n'a pas fait d'études supérieures et va effectuer un travail parmi les moins qualifiés, probablement parmi les plus pénibles, ait à cotiser quarante-quatre ans pour terminer sa carrière, alors que tous les autres Français auront cotisé pendant quarante et un ans et demi ? Et vous vous demandez pourquoi les Français trouvent votre réforme injuste ? En voilà une bonne raison.

Depuis quelques jours, au cours de ces débats, on s'est parfois moqué de la gauche. Faut-il rappeler que c'est la gauche qui a arraché les congés payés dans ce pays ? Que c'est la gauche qui a ramené l'âge légal de la retraite à soixante ans ? Que c'est la gauche qui a ramené le temps de travail hebdomadaire à 35 heures ? (Exclamations sur quelques bancs du groupe UMP.) Alors, vous qui trouvez que ce n'est pas assez, ces 35 heures, faites donc la même expérience que Florence Aubenas : venez travailler dans une usine agro-alimentaire de ma région, où vous resterez cinq jours sur sept debout, à quatre degrés ; vous me direz alors si ces 35 heures, ce n'est pas suffisant. Allez sur les chantiers derrière les goudronneuses, et vous me direz si 35 heures ce n'est pas suffisant ! Allez faire les trois huit dans une usine, et vous me direz si 35 heures ce n'est pas suffisant !

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