Madame la présidente, monsieur le ministre, il y a sept ans, lors de la réforme Fillon, l'adoption de l'article 12 de la loi du 21 août 2003, fixant un délai de trois ans aux organisations professionnelles et syndicales pour engager une négociation interprofessionnelle sur la définition et la prise en compte de la pénibilité, avait été largement saluée – sauf par ceux qui n'avaient pas voté le texte.
Malheureusement, après l'échec des négociations entre les partenaires sociaux, il devient impératif d'adopter aujourd'hui une réforme concrète. En effet, il est indispensable que l'âge légal de départ à la retraite et la durée de cotisation tiennent compte de la pénibilité des activités professionnelles exercées. Le constat statistique est éloquent : en 2003, un cadre masculin de trente-cinq ans pouvait espérer vivre encore quarante-sept ans, dont trente-quatre indemne de toute incapacité, alors qu'un ouvrier avait une espérance de vie de quarante et un an, dont vingt-quatre sans incapacité.
La première idée pour compenser cette injustice serait d'autoriser les titulaires d'un emploi reconnu pénible à partir plus tôt. Il suffirait d'adapter la durée de cotisation à l'espérance de vie de son métier. Cette solution simple sur le papier se révèle d'une application complexe en pratique. En effet, à l'heure où la mobilité professionnelle s'accroît, cela nécessiterait des calculs complexes comportant un système de points tenant compte de la profession, de l'âge, de l'ancienneté, voire d'autres critères. Face à cette difficulté, le Gouvernement a choisi la voie individuelle et médicale. Ainsi, les salariés touchés par une maladie professionnelle ayant entraîné une incapacité physique d'au moins 10 % devraient pouvoir partir à soixante ans, sous réserve de l'accord d'une commission spéciale. Cette solution présente l'avantage d'être d'une application simple et rapidement opérationnelle. S'il faut reconnaître que cette solution n'est pas idéale, elle a au moins le mérite de prendre en compte la pénibilité au travail pour la première fois. Il s'agit là d'une avancée sociale majeure. Nul doute que la prise en compte de la pénibilité continuera d'évoluer, sur le plan législatif, dans les années à venir.
Monsieur le ministre, ce débat difficile sur la définition et la prise en compte de la pénibilité doit également être l'occasion de lancer une grande réflexion sur l'amélioration des conditions de travail. Le principal enjeu est de mettre en place un système permettant à tous les salariés d'atteindre les soixante-deux ans sans être victimes de la pénibilité. Plutôt que de compenser uniquement de manière curative la pénibilité en accordant un départ anticipé à la retraite, il faudra surtout veiller aux mesures préventives en entreprise. Pour conclure, à partir du moment où nous avons fait le choix de travailler plus longtemps, il est capital de permettre à nos concitoyens de travailler mieux.