Je suis hostile à l'extension de la déchéance de la nationalité. Il faut nous en tenir à la législation actuelle, c'est-à-dire aux articles 25 et suivants du code civil. Comme l'a rappelé récemment Guy Carcassonne, retirer la nationalité à un individu, aussi grave soit son crime, c'est lui retirer une part de son identité. L'article 1er de notre Constitution proclame l'égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d'origine. Or, les propositions du Gouvernement établissent précisément une distinction entre les citoyens qui ont acquis la nationalité française au cours de leur vie, et les autres. La punition doit être identique pour un même crime, quel que soit le statut juridique de celui qui l'a commis.
En outre, la déchéance de la nationalité ne doit pas être un élément d'une politique pénale. Ce serait revenir à la double peine, que nous étions parvenus à supprimer à l'unanimité lorsque Nicolas Sarkozy était ministre de l'intérieur. Ne sombrons pas dans l'outrance et dans la surenchère sécuritaire en désignant une fois de plus des boucs émissaires, avec les risques que comporte toute stigmatisation.
Le dispositif me paraît donc très contestable juridiquement et philosophiquement, et d'application douteuse.
Vous avez déclaré, le 30 août dernier, qu'« il nous faut élargir les possibilités de prendre des arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière pour menace à l'ordre public à l'occasion d'actes répétés de vol ou de mendicité agressive ». Qu'entendez-vous, juridiquement, par « mendicité agressive » ? Je rappelle à ce propos que la Cour d'appel de Versailles a récemment estimé que l'occupation d'un terrain par des gens du voyage ou par des Roms ne relevait pas de l'ordre public.
Enfin, comme l'a souligné M. Dray, pourquoi allonger la durée de la rétention, alors que la moyenne effective de celle-ci est actuellement de 8 à 10 jours ? Voilà quelques semaines, vous déclariez que c'était à la demande du gouvernement marocain. J'ose espérer que nous ne légiférons pas uniquement à la demande de celui-ci.