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Intervention de Jérôme Cahuzac

Réunion du 7 septembre 2010 à 15h00
Réforme des retraites — Ouverture de la discussion

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérôme Cahuzac, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

Monsieur le président, messieurs les ministres, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, ce projet de loi portant réforme des retraites doit être examiné à la lumière de plusieurs hypothèques.

La première est sociale : personne ne doute – pas plus sur les bancs de droite que sur ceux de gauche – que les éventuelles évolutions du texte que nous examinons dépendront de l'ampleur de la mobilisation des salariés et de son éventuelle durée. Des voix se sont d'ailleurs élevées au sein même de la majorité pour dire que, le cas échéant, il ne serait pas possible de ne pas entendre une protestation forte et durable. (« Elle est forte ! » sur les bancs du groupe SRC.)

L'hypothèque sociale se double d'une hypothèque institutionnelle. En réponse aux questions d'actualité, le Premier ministre a eu raison d'indiquer que l'interlocuteur légitime des parlementaires et des syndicats était le ministre nommé dans des conditions régulières et appartenant à un gouvernement qui bénéficie, à ce jour, de la confiance de l'Assemblée nationale. L'interlocuteur, c'est lui, et ce ne sont certainement pas des hommes – quelle que soit leur qualité – qui n'ont jamais été élus, n'ont probablement pas vocation à l'être, et ne sont responsables devant personne ni devant aucune institution de notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Ce sont pourtant ceux-là qui s'expriment au nom du Gouvernement, alors même qu'il a un porte-parole, et peut-être même au nom du Président de la République, alors que le dernier porte-parole de la Présidence de la République a démissionné au bout de quelques semaines seulement pour aller exercer ses talents comme consul de France aux États-Unis. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Dans ces conditions, avec qui discuter, avec qui négocier ? Le Premier ministre a appelé de ses voeux, tout à l'heure, sinon une négociation, une concertation, à tout le moins des discussions, mais entre qui ? Entre les autorités légitimes de notre République ou avec des hommes qui, à mes yeux, se substituent à ces autorités de façon tout à fait abusive – manifestement avec l'accord du chef de l'État ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

La troisième hypothèque est économique. Comme chacun le sait, l'équilibre du régime des retraites dépend de la croissance de la masse salariale, laquelle dépend de la croissance de la richesse nationale. Or, alors cet équilibre se fondait, il y a encore quelques semaines, sur une hypothèse de croissance de 2,5 %, nous savons désormais que la croissance ne dépassera pas 2 % en 2011. Pour les années suivantes, les économistes estiment de façon consensuelle que la croissance sera encore inférieure. Lorsqu'on prétend sauver les retraites, comment faire l'impasse sur l'hypothèque économique majeure que constitue la croissance de la masse salariale ? Prétendre réformer durablement, pour dix ans, en ignorant ce paramètre fondamental sur lequel personne ne peut aujourd'hui se prononcer avec certitude, c'est très certainement nous faire prendre des vessies pour des lanternes !

L'hypothèque économique en lève d'ailleurs une autre, de nature budgétaire. Contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le ministre, même avec des hypothèses économiques favorables, chaque régime pris individuellement n'est pas équilibré.

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