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Intervention de André Gerin

Réunion du 8 septembre 2010 à 15h00
Réforme des retraites — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Gerin :

A-t-on le droit d'avoir des droits ? Si je vous écoute, monsieur le ministre, la réponse est oui, à condition que cela ne coûte pas trop cher. Des dates historiques demeurent présentes à l'esprit : 1936, le Conseil national de la résistance, mai et juin 1968, la retraite à soixante ans, les 35 heures. Autant de moments au cours desquels les droits ont été des investissements, des progrès de la civilisation. Chaque fois elles ont constitué de nouveaux départs pour la France, la condition d'une prospérité nouvelle.

Décidément, la droite ne change pas, à moins de se parer de vertus réformatrices qui sont, en réalité, une volonté de démolition de notre modèle social, de l'exigence de redistribution sociale imposée à la Libération. Vous vous y attaquez, de réforme en réforme, au nom d'une société inégalitaire dans laquelle ne prévalent que les privilèges du grand capital et de la finance. Vous rêvez d'un système de retraites par capitalisation, d'un système qui tend, petit à petit, à amputer le système par répartition.

Vous nous servez l'exemple des pays européens. Vous nous proposez finalement une sorte de collectivisme à l'européenne. À ceux qui, hier, nous ont traités de staliniens, laissez-moi répondre que quand on livrait la France à Hitler, il valait mieux, alors, être aux côtés des résistants, de de Gaulle et de Staline pour combattre Pétain et Laval.

Il vaut mieux aujourd'hui être du côté de ceux pour qui les droits ne sont pas des charges mais des progrès indispensables, plutôt que de nous imposer ce brouet européen synonyme de précarité, de bas salaires, de chômage, au nom de la rentabilité financière. Voilà ce qui plombe le système des retraites si habilement conçu à la Libération : une répartition des richesses entre le capital et le travail.

Que constatons-nous ? Depuis trente ans, la part dans le PIB du pouvoir d'achat des salaires et des pensions ne cesse de se réduire. Les salariés sont ponctionnés tandis que le capital voit ses contributions sans cesse revues à la baisse. La précarité étend ses ravages ; le chômage des jeunes est massif ; l'insécurité sociale se généralise. Le coût pour la collectivité en est considérable. Au final, ce sont des dizaines de milliards d'euros en moins chaque année pour le budget de la France. Pourquoi n'en parlez-vous pas, monsieur le ministre, d'autant que la Cour des comptes ne cesse de répéter que ces cadeaux au capital ne servent à rien, en tout cas pas à l'emploi ?

Et à quelles conséquences a conduit l'abandon de la politique industrielle de la France depuis Valéry Giscard d'Estaing, ce que j'appelle une sorte de pétainisme industriel ? La part de la richesse industrielle dans le PIB de la France est de 10 % inférieure à ce qu'elle est en Allemagne, ce qui représente des milliers d'emplois sacrifiés. Quant à la multiplication des plans sociaux, elle aggrave chaque jour cette dérive. Le coût pour notre système de retraites, et plus généralement de protection sociale, en est très important. Le problème avec vous, c'est que la société dont vous rêvez constitue une terrible régression, une remise en cause des avancées de la civilisation.

Pour vous – et Jean-François Copé l'a bien montré –, il faut raisonner avec les dogmes du marché, de la rentabilité à tout prix, avec la dictature du moindre coût.

À l'inverse, ne pouvons-nous pas imaginer qu'avancent d'un même pas progrès social et progrès économique au service de la promotion des hommes ? Ne pouvons-nous pas envisager une autre manière de penser la rentabilité, la compétitivité, la productivité du travail, l'augmentation de la valeur ajoutée, qui ne dépende plus des humeurs du marché ou des ogres de la finance ?

Avec la gauche, avec les communistes nous pouvons peut-être à nouveau parler d'un projet de société socialiste apportant les bonnes réponses. Ainsi, nous pouvons faire travailler davantage les machines, nous pouvons rendre flexible l'outil de travail pour la promotion des hommes, mais pas comme le fait la droite.

Pourquoi ne pas oser développer des activités nouvelles après soixante ans ? Il y a tant de mesures à prendre pour transmettre les savoir-faire, les métiers, pour humaniser la société.

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