Dernier point, la majorité actuelle avait fait voter en 1997 un troisième pilier du système de retraite à la française, sous la forme d'un système par capitalisation offrant une sortie mixte, en rente ou en capital, au choix. Alors que nos concitoyens demandent à ce que soit respectée leur liberté, et devant les déficits considérables auxquels nous devons faire face, se pose la question d'une nouvelle articulation autour de deux axes : la solidarité, d'une part, sous la forme d'un système par répartition à points ; la liberté, d'autre part, sous la forme de la capitalisation. Ces deux notions ne sont pas antinomiques – si tel était le cas, pourquoi aurions-nous voté les dispositifs destinés à encourager les systèmes complémentaires par capitalisation de type Préfon, que personne ne songe à remettre en cause ? Pourtant, la proposition de loi Thomas adoptée en 1997, dont les décrets d'application avaient été bloqués, non sans difficultés, a été abrogée par le gouvernement Jospin en 2002, alors qu'elle redonnait une logique et une stabilité à notre système. Il convient de rajouter ce volet à votre projet de loi, monsieur le ministre. C'est d'ailleurs une position traditionnelle de l'actuelle majorité présidentielle que de considérer qu'il existe trois piliers, dont les deux premiers doivent être réformés et le troisième complété.
Le deuxième point que je veux développer porte sur le retour à l'équilibre des comptes sociaux, annoncé pour 2018 dans le texte en ce qui concerne la branche vieillesse, mais avec des hypothèses économiques peu réalistes.
Bien que cette réforme aille dans un sens positif, elle ne permet pas d'assurer l'équilibre des régimes de retraite. Avec un déficit de la branche vieillesse du régime général de la sécurité sociale de 7,2 milliards d'euros, une action sur les prestations ne suffit pas. En effet, on ne peut se baser sur les prévisions de croissance, celle-ci étant estimée par le Gouvernement à 2,5 % en volume du produit intérieur brut pendant dix ans, quand on sait que les institutions européennes la situent plutôt autour de 1,5 %, ce qui correspond à la moyenne des dix dernières années avant la crise. Le Gouvernement lui-même, dans les rapports économiques et financiers annexés aux lois de finances, disait que la croissance potentielle maximale de la France était autour de 1,7 % ou 1,8 %. Alors, autant imaginer un scénario plus prudent, avec des recettes moins importantes.
Il faut donc aller plus loin dans le sens d'une justice à la fois fiscale et sociale. Même si nous sommes favorables à la proposition du Gouvernement d'augmenter d'un point la tranche supérieure d'impôt sur le revenu et d'accroître la fiscalité sur les plus-values et les dividendes, qui figurera dans le projet de loi de finances, il faudra probablement doubler l'effort d'ici à 2018. Le montant est à peu près de 4 milliards et il faudra tendre vers 8 milliards, mais nous avons huit ans devant nous.
Toutefois, la hausse de la fiscalité doit être raisonnable et ne pas entraîner un effet d'éviction, à l'image des propositions du parti socialiste, sur lesquelles je reviendrai tout à l'heure.
Enfin, selon les calculs réalisés par les services de la Caisse nationale d'assurance vieillesse, et malgré la réforme, le régime général des retraites serait toujours en déficit de 4 milliards d'euros en 2018. Les propositions gouvernementales réduisent de 80 % le déficit de la branche vieillesse si l'on retient des hypothèses de croissance économique plus réalistes – autour de 1,5 %. De ce fait, nous défendons totalement la décision du Gouvernement d'utiliser le fonds de réserve pour les retraites afin d'étaler les mesures de redressement des comptes sociaux dans le temps. Il faut d'ailleurs le rappeler : c'est pour cela que ce fonds a été créé.
Cependant, il faut aussi rappeler que, dans le financement du déficit de l'ensemble des régimes de retraite, qui atteindra 45 milliards d'euros en 2020, la subvention de 15,6 milliards de l'État destinée à équilibrer le régime des pensions civiles et militaires de l'État pose un problème, car une partie de cette subvention, qui représente le tiers du besoin de financement, est payée par l'emprunt. En effet, tant que le budget de l'État ne sera pas redressé, tant que l'on ne sera pas à l'équilibre au moins pour les dépenses de fonctionnement du budget de l'État, ces 15,6 milliards sont financés pour partie par l'emprunt.
Enfin, le Gouvernement – et notre groupe tient à l'en féliciter – s'est montré ouvert sur certaines questions que nous avions soulevées avec d'autres collègues. Il s'agit de la pénibilité, des carrières longues et des polypensionnés. Le Président de la République et le Gouvernement ont annoncé un certain nombre de mesures qui vont dans la bonne direction.