Sur ce dernier point, le Conseil d'État a transmis une QPC portant sur la loi de 1966 qui, en bref, délègue au pouvoir réglementaire le soin de fixer le régime de déduction en matière de TVA. Cette incompétence négative évidente constituait-elle une atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit ? Ayant un doute, nous avons renvoyé la question au Conseil constitutionnel. Dans sa décision SNC Kimberly Clark du 18 juin 2010, il a répondu, en l'espèce, par la négative. Les termes de la motivation du Conseil constitutionnel conduisent toutefois à se demander si, dans d'autres cas, par exemple en matière de procédure pénale, une incompétence négative ne pourrait pas constituer une telle atteinte. Le cas échéant, nous devrons donc solliciter le Conseil constitutionnel, afin qu'il puisse préciser sa jurisprudence.
S'agissant des refus de transmettre les QPC, nous avons appliqué avec rigueur la lettre et l'esprit de la loi organique. Qu'il s'agisse d'apprécier si une disposition a déjà été déclarée conforme à la Constitution, ou si elle est applicable au litige, ou encore si la question est nouvelle et présente une difficulté sérieuse, nous n'avons pas entendu exercer un contrôle occulte de constitutionnalité des lois. J'ai utilisé tout à l'heure une formule qui ne figure dans aucune décision du Conseil d'État mais qui en résume assez bien l'esprit : le « doute raisonnable ». À partir du moment où un tel doute existe, nous transmettons la question au Conseil constitutionnel. Par conséquent, lorsque nous rejetons une question au motif qu'elle est dépourvue de caractère sérieux, c'est qu'elle n'est vraiment pas sérieuse.
Monsieur Benisti, comprenez bien que nous ne formulons aucune critique sur les termes de la loi organique, dont je célèbre en tous points la pertinence et les mérites. À nos yeux, pas une ligne ne mérite d'être modifiée. Il nous apparaît néanmoins que la régulation du système pourrait être parachevée dans les mois qui viennent.