Je rappelle d'une part que le dispositif de 2008 n'était pas destiné à mieux passer la crise, qui lui a été postérieure ; d'autre part que, la période d'observation n'étant pas assez longue pour tirer de vraies conclusions, il convient de faire preuve de prudence.
Cela dit, le dispositif est-il efficace ? Certes. Mais si ceux qui sont un peu malins n'hésitent pas à faire de l'optimisation fiscale – certains, d'ailleurs, ne s'en sont pas cachés –, d'autres, qui pourraient être éligibles au CIR, sont trop timides pour en bénéficier. Voilà pourquoi j'insiste sur des propositions destinées à mieux préciser les conditions d'éligibilité des dépenses de R&D. Le manuel de Frascati de l'OCDE constitue la norme internationale mais, en fait, ceux qui sont chargés de contrôler l'utilisation du CIR s'appuient sur quatre documents différents qui peuvent se contredire. En lisant correctement ces documents, on peut déclarer beaucoup de choses qui ne sont pas forcément liées à la recherche. Les banques, notamment, ont très bien su les interpréter. D'après les chiffres, il y aurait aujourd'hui 5 000 chercheurs dans les banques françaises ! Cela fait beaucoup : on ne les a pas bien vus… Il faut réussir à mettre au point un seul document de référence, un manuel de Frascati à la française. Nous avons d'ailleurs entendu la proposition, que je trouve assez intéressante, d'établir, un peu comme au Canada, un catalogue qui donnerait des précisions par catégorie de métiers.
Quant aux mécanismes de contrôle, ils ont de quoi surprendre. Les services du fisc affirment qu'ils ne connaissent pas la matière « recherche », qu'ils ne savent pas dire si tel projet est éligible ou non et qu'ils ont donc besoin de se faire aider par des techniciens. D'où notre proposition visant à constituer un « couple » fisc-recherche et à favoriser l'utilisation du rescrit, laquelle est encore marginale.
Avec un document de référence, une équipe fisc-recherche et l'utilisation du rescrit, on devrait faire en sorte que chaque euro mis par l'État dans le CIR contribue davantage à la recherche. Je rappelle que l'objectif de la stratégie de Lisbonne est de porter les dépenses de R&D de 2 % à 3 % du PIB : consacrer, en vitesse de croisière, 4,2 milliards d'euros au CIR, c'est cher payer le dixième de point pour s'en rapprocher ! Au moment où l'on met en cause les niches fiscales, une telle dépense fiscale donne envie de mordre !