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Intervention de Jean-Pierre Jouyet

Réunion du 13 juillet 2010 à 11h00
Commission des affaires étrangères

Jean-Pierre Jouyet :

… mais qu'elle est politiquement trop prudente. En effet, là encore, nos partenaires tiers nous demanderont davantage de lisibilité, de gouvernance et de coordination, d'abord au sein de la zone euro et ensuite pour les Vingt-sept – il ne faut pas inverser cet ordre de priorité.

Enfin, en matière de régulation, je plaide très fortement pour la mise en place rapide d'une Agence européenne de surveillance des marchés. Ceux-ci sont aujourd'hui très fragmentés, opaques, mais ils constituent des éléments incontournables de la régulation et de notre mode de fonctionnement économique, et même social compte tenu de leur poids dans le financement de nos dettes, publiques et privées. Il nous faut donc un gendarme européen au regard de leur développement technologique et de leur sophistication. Il faut savoir que 50 % des transactions internationales échappent à notre vision et que, sur les 50 % qui restent, nous ne pouvons en surveiller efficacement que les trois quarts. Le rythme des transactions est tel, parfois à la microseconde, qu'il faudrait disposer d'outils de surveillance qui ne peuvent se concevoir qu'au niveau européen ; le problème se pose de la même façon aux États-Unis. Les textes que l'on peut adopter en la matière, tel celui relatif à la régulation bancaire et financière qui vient d'être voté ici en première lecture – et qui est un bon projet de loi –, doivent s'appuyer sur des moyens de surveillance adaptés pour être efficaces.

L'Europe économique et financière doit donc réaliser des progrès pour asseoir son modèle de régulation et continuer, comme elle l'avait fait jusqu'à présent, à orienter les travaux du G20. Ce sera crucial durant la présidence française – le Président de la République l'a rappelé hier soir. Les enjeux sont de trois ordres : le premier est d'ordre monétaire ; le deuxième porte sur la régulation des marchés, notamment des matières premières et du CO2; le troisième, enfin, est relatif à une nouvelle organisation des marchés financiers. S'agissant de la taxation des activités de marché, j'y suis favorable dès lors qu'on en détermine la bonne assiette ; qu'elle intervienne au niveau européen ou multilatéral importe assez peu, car il faut bien commencer quelque part. En tout cas, cela ne suffira pas à épuiser le projet de la présidence française du G20 en 2011.

Il importe que nous conservions notre capacité d'influence non seulement face aux États-Unis, en comblant notre retard en matière de régulation et d'organisation des marchés, mais aussi face aux grands pays émergents. Il faut savoir que, ce matin, une agence de notation chinoise a décidé de dégrader les États-Unis, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ! Certes, il s'agit d'un acte symbolique mais il est politiquement révélateur : il signifie qu'on nous adresse un signal indiquant que le jeu ne sera plus le même qu'avant et que nous ne plus les seuls à maîtriser les règles du jeu. Nous devons donc nous adapter à cette nouvelle donne.

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