La nature donne à chacun un visage particulier qui le différencie de son voisin. Autant de visages, autant de personnes, autant de dignités. Masquer son visage, c'est disparaître, ne plus exister pour l'autre. C'est la négation de la personne.
Le voile intégral est-il un simple habit ? S'agit-il d'une mode passagère, d'un réflexe identitaire sans lendemain qui s'estompera avec le temps ? Le voile intégral va bien au-delà. Il est l'expression d'un réel projet politique d'une société fondée sur une conception rétrograde, qui rejette tout à la fois l'égalité des sexes, la mixité de la société et la laïcité, au nom d'une vision politique d'un intégrisme religieux. Le voile intégral porte la volonté politique d'imposer une loi religieuse personnelle à la République consacrée par le suffrage universel. Il constitue le premier pas certain d'une action programmée par ses prosélytes, qui mène au communautarisme et au rejet de l'autre. C'est la négation du vouloir vivre ensemble, la consécration de l'intolérance institutionnalisée.
Trop de signes montent vers nous pour que nous ne prenions pas au sérieux ces actions, véritables dérives sectaires qui sous-tendent cette pratique : refus de la part d'une femme d'être examinée par un médecin homme, refus de la mixité dans les piscines, refus d'être interrogée par un professeur homme, refus de prendre son repas à côté d'un voisin qui mange du porc, refus de prendre sa douche dans un vestiaire avec des non-croyants. Admettre par lâcheté ces attitudes pour ne pas faire de vagues et se taire, c'est, à coup sûr, alimenter de nouvelles revendications, c'est donner raison à ces intégristes qui pratiquent l'intimidation et veulent imposer leurs conceptions rétrogrades.
Le projet de loi que vous présentez, madame la garde des sceaux, porte un coup d'arrêt définitif à une pratique indigne. Certains, malheureusement, frappés de pusillanimité, mettent en avant des arguties juridiques pour ne rien faire par crainte d'une censure du Conseil constitutionnel ou de la Cour européenne des droits de l'homme.
L'honneur et le devoir du politique, c'est de prendre ses responsabilités.