Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, élu d'un département rural, la Manche, dont le PIB doit beaucoup à l'agriculture et l'agroalimentaire grâce à sa production laitière – la deuxième de France – sa spécialisation dans la culture des carottes et son ostréiculture, je me réjouis du titre Ier de ce projet de loi qui vise à définir et mettre en oeuvre une politique publique de l'alimentation.
Rappeler ainsi l'objectif nourricier de l'agriculture permet de prendre la mesure du rôle des agriculteurs dans notre société. C'est aussi reconnaître tout ce qu'on leur doit depuis au moins soixante ans en France et en Europe. Nous étions dépendants, nous importions massivement et notre agriculture est devenue conquérante grâce aux agriculteurs qui ont su s'adapter.
Élaborer une véritable politique publique de l'alimentation, c'est faire le choix de la qualité – ce qui répond en partie aux arguments de nos collègues – et de la sécurité sanitaire. C'est un enjeu majeur de santé publique. De nombreux problèmes de santé, telles les maladies cardiovasculaires ou l'obésité, prennent en effet leur source dans une alimentation déséquilibrée et de mauvaise qualité. Les citoyens doivent donc pouvoir bénéficier d'une éducation nutritionnelle dès leur plus jeune âge et, les consommateurs, d'une information claire sur les produits qu'il achète, leur contenu et leur origine.
C'est également faire le choix de la souveraineté alimentaire. La France, pays agricole par excellence, renommé pour sa gastronomie, ne peut laisser entrer librement sur son territoire des produits qui ne respecteraient pas les normes environnementales et sanitaires qui sont imposées à ses agriculteurs. Il ne s'agit pas là de prôner le protectionnisme mais simplement d'exiger des échanges commerciaux équitables et justes.
Sans promouvoir une agriculture par trop intensive et industrielle, nous devons permettre aux agriculteurs français de s'adapter à la concurrence en produisant en quantité suffisante, dans le respect de l'environnement bien évidemment.
Cette politique publique de l'alimentation doit mettre en valeur le talent des hommes et des femmes qui cultivent la terre. Elle doit leur permettre de vivre, oui, vivre de leur métier. Or, nous l'avons dit et redit depuis des mois et des mois et vous le rappelez constamment, monsieur le ministre, les prix des produits agricoles, qu'il s'agisse de la viande, du lait ou des légumes, sont très bas et ne couvrent pas les charges des exploitants. Les revenus agricoles ont ainsi subi une baisse de 34 % en 2009. La crise que traverse l'agriculture française est une crise profonde. C'est celle d'un modèle qui ne satisfait plus ni les agriculteurs, ni les consommateurs. On ne peut accepter que les denrées alimentaires fassent l'objet d'une certaine forme de spéculation au détriment de ceux qui les produisent et qui sont injustement rémunérés.
Rappelons les prises de marge dans la distribution, qui se sont beaucoup développées, ou dans l'industrie, où l'on observe de grands déséquilibres avec des effets de ciseau. Sur ce point, j'estime que la loi de modernisation de l'économie n'a pas porté tous ses fruits, loin s'en faut.