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Intervention de éric Querenet de Breville

Réunion du 9 mars 2010 à 17h00
Mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances

éric Querenet de Breville, sous-directeur au ministère du Budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'état :

Permettez-moi, pour commencer, de rappeler la genèse des recettes exceptionnelles de la Défense telles qu'elles sont prévues dans la loi de programmation militaire.

Il y a tout d'abord ce qui a été présenté, il y a un peu plus de deux ans, comme une « bosse » de crédits de paiement, telle qu'elle apparaît à la page 2 du document qui vous a été distribué. Il s'agissait d'épouser la trajectoire des besoins de la Défense, en répondant aux besoins exceptionnels par des recettes exceptionnelles – d'autant plus que les contraintes de la norme de dépense imposent une certaine régularité dans l'évolution des crédits budgétaires.

D'autre part, il y avait le constat que des actifs, immobiliers et immatériels, seraient à réaliser : le projet de « Pentagone à la française » à Balard libère des emprises parisiennes ; la densification du réseau d'implantation de la Défense sur le territoire national conduit à libérer des emprises régionales ; des matériels militaires d'occasion sont régulièrement vendus ; les conventions internationales conduisent à céder en bloc les fréquences Félin aujourd'hui utilisées par l'armée de terre, voisines de celles libérées par le passage de la télévision analogique à la télévision numérique, pour faire un paquet de quatrième génération. Avec ou sans « bosse » de paiements, donc, il y aurait eu de toute façon des recettes exceptionnelles.

La particularité, liée aux contraintes de financement du ministère de la Défense, est tout d'abord que nous avons adapté un véhicule existant, le compte d'affectation spéciale Immobilier, en introduisant des dérogations au droit commun : nous avons maintenu le taux de retour à 100 % – comme dans la précédente loi de programmation militaire – et fluidifié les règles de remploi, notamment par une conception large des dépenses éligibles. Par ailleurs, nous avons créé en 2009 un compte d'affectation spéciale pour les cessions de fréquences – dont le produit, dans le droit commun, va au budget général. Ce CAS a vocation à recevoir en recettes le produit, d'une part, de l'attribution de fréquences libérées par le ministère de la Défense – ou par celui de l'Intérieur pour la partie du réseau Rubis utilisé par la gendarmerie – et, d'autre part, de la cession d'usufruit de bandes passantes satellitaires de la constellation Syracuse, objet d'un article voté dans la loi de programmation militaire à l'automne dernier. Sont destinées à figurer en dépenses celles qui, sur le programme du ministère de la Défense, concernent les télécommunications, notamment l'aménagement du spectre.

La page 3 du document décompose les ressources prévues sur la période de la loi de programmation militaire, année après année, en crédits budgétaires, dépenses de relance – qui ont vocation à être remboursées, mais de manière relativement étalée dans le temps – et recettes exceptionnelles.

Ces recettes exceptionnelles, telles qu'elles avaient été prévues dans la LPM en 2009, 2010 et 2011, figurent dans le tableau de la page 4. Elles se partagent, pour l'essentiel, entre recettes tirées des actifs immobiliers et recettes tirées des actifs de télécommunications. Les « autres recettes » correspondent aux cessions de matériels militaires, auxquelles s'ajoute en 2009 le reliquat de crédits de masses issus du régime dérogatoire des « dépenses à bon compte ».

Qu'en est-il de la réalisation de ces recettes exceptionnelles ?

En 2009, sur les 1 637 millions d'euros prévus, 357 millions d'euros ont été réalisés : 220 millions d'euros ont été tirés de la cession à la SNI, une soixantaine de millions de la cession d'emprises en province, 15 millions de la cession d'emprises parisiennes ; s'y sont ajoutés le reliquat des masses et les cessions de matériels militaires d'occasion, représentant 65 millions d'euros.

Le ministère de la Défense a bénéficié de compensations à ces moindres recettes exceptionnelles, comme le montre la page 5 du document. La première, et la plus importante, a été l'autorisation de consommer des crédits de report issus de la précédente loi de programmation militaire, à hauteur de 900 millions d'euros. En second lieu, une marge de 600 millions d'euros a résulté des moindres besoins de dépenses, liés au fait que l'inflation en 2009 ne s'est élevée qu'à 0,1 % alors que le budget avait été construit sur l'hypothèse d'une inflation à 2 % ; certes, la sensibilité du budget du ministère de la Défense à l'inflation ne concerne pas à court terme, tous les compartiments de dépenses, mais sur les programmes d'armement, il existe des clauses de révision de prix automatiques. L'annexe I du document précise le détail de ces gains. Au total, sur l'année 2009, on peut parler de « surcompensation » des moindres recettes exceptionnelles, puisque le ministère a finalement bénéficié de 1,9 milliard alors que la prévision était de 1,6 milliard de recettes exceptionnelles.

Pour l'année 2010 – page 6 du document –, le montant prévisionnel des recettes exceptionnelles tirées des fréquences est maintenu à ce stade, à titre conservatoire, au montant qui avait été initialement prévu en LPM, soit 600 millions d'euros – qui devraient être perçus en fin d'année, voire au début de 2011 – car l'ARCEP, qui a la maîtrise du calendrier et des modalités d'attribution, a lancé une enquête publique début 2009, dont le retour est un peu plus long que prévu. Pour les recettes exceptionnelles de l'immobilier, le montant prévu en LPM était de 650 millions d'euros et la prévision actuelle est de 190 millions. La différence s'explique par le retournement du marché immobilier : l'État ne veut pas brader ses actifs et préfère donc renoncer au bénéfice immédiat d'une recette de trésorerie. Les négociations engagées avec la Caisse des dépôts et la SOVAFIM, dont une filiale commune devait reprendre en bloc une grande partie des emprises parisiennes, ont été ajournées. Sur les 190 millions d'euros attendus, 130 concernent la vente de lots isolés à Paris, pour lesquels un appel d'offres sera réalisé – Lourcine, Latour Maubourg, Montparnasse – et 60 seraient imputables aux cessions en province. Enfin, les marges de désinflation devraient représenter 100 millions d'euros.

Au total, en 2009 et 2010, comme le montre le tableau de la page 7, le décalage dans le temps de la perception des recettes exceptionnelles est plus que compensé. Ainsi, en 2009, si les recettes exceptionnelles prévues en LPM et non perçues représentaient environ 1,3 milliard d'euros, les compensations ont atteint 1,7 milliard, et il est venu s'y ajouter une atténuation de la bosse de crédits de paiement sur les programmes d'équipement, si bien que le report de charges a diminué de 800 millions d'euros par rapport à fin 2008. À l'issue de l'année 2010, le report de charges prévisionnel est encore de 750 millions d'euros inférieur à celui constaté fin 2008 – ce qui signifie que, même si les recettes tirées des fréquences, soit 600 millions d'euros, n'étaient perçues que début 2011, le report de charges serait encore inférieur de 150 millions d'euros à ce qu'il était fin 2008.

J'insiste sur le fait qu'il faut bien distinguer le décalage dans le temps de la perception des recettes exceptionnelles et les moins-values à terminaison – qui, dès lors qu'il a été décidé de décaler les cessions immobilières, seront moindres : selon les dernières évaluations de France Domaine, la moins-value sur l'ensemble des cessions parisiennes prévues en LPM devrait être de l'ordre de 100 millions d'euros ; elle aurait été bien plus importante si les cessions avaient eu lieu au moment initialement envisagé.

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