Pour FO, le MEEDDAT reste et doit rester un ministère technique. Pendant les négociations en vue du Grenelle de l'environnement, les associations d'élus ont fait valoir qu'elles auront besoin de ce ministère pour les aider à mettre en oeuvre l'ensemble de l'ingénierie territoriale que nécessitera le développement durable. Il n'y a pas d'un côté une ingénierie d'État et de l'autre une ingénierie des collectivités territoriales. Aujourd'hui, on voit dans l'« ingénierie » publique – donc partagée et devant pouvoir se situer hors du champ concurrentiel –, une simple notion et on estime que, lorsqu'une entreprise privée peut se charger du travail, la puissance publique ne doit plus l'exécuter. Ce n'est pas comme cela que les choses se passent.
Si les entreprises privées se sont développées en France, c'est grâce au réseau scientifique et technique de l'État, qui a su développer l'innovation et la recherche fondamentale, et aux écoles de formation technique. L'ingénierie publique représente 2 % de l'ensemble de l'ingénierie. Il nous paraîtrait aberrant et suicidaire pour l'économie française et pour la mise en oeuvre des politiques publiques au plus proche des territoires, de supprimer ces 2 % uniquement pour faire quelques économies. Or la différence entre le nombre des réductions d'emplois annoncé rive droite – 5 600 – et celui résultant du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux – 3 200 – porte précisément sur l'ingénierie. Ne brisons pas la colonne vertébrale du système. N'affaiblissons pas la compétence technique du MEEDDAT.
Dans une agence de l'eau, on fait de l'ingénierie. Quand on fait Natura 2000 dans une DIREN – direction régionale de l'environnement –, quand on essaie avec les collectivités territoriales de mettre en oeuvre des zones de protection, de développer de la biodiversité ou de créer une trame verte, on fait de l'ingénierie. Ce n'est pas que la bordure de trottoir, qui est maintenant dévolue aux collectivités territoriales. Comment les ingénieurs et les techniciens territoriaux, qui sont d'ailleurs pour la plupart issus de l'État, pourront-ils mettre en oeuvre leurs prérogatives au service des élus s'ils n'ont plus à leur disposition la compétence technique publique ?
Nous prônons la création d'une ingénierie publique partagée, hors champ concurrentiel, tant au niveau de l'État qu'à celui des collectivités territoriales, et la mise au service des collectivités territoriales du réseau scientifique et technique de l'État, par l'ouverture de sa gouvernance.
Enfin, sur 10 000 personnes dans la rue le 6 mars 2008, il y avait 2 000 cadres supérieurs, dont des directeurs et des directeurs adjoints. Je veux témoigner ici du fait que l'encadrement supérieur du MEEDDAT a cru que la création de ce ministère permettrait de rebondir, de repartir vers des champs nouveaux, y compris sociétaux. Or, ces cadres font désormais le choix de partir, soit dans les collectivités territoriales, par le biais des détachements de droit commun, soit dans le privé. Au moment où l'on nous explique que la compétence se raréfie, en particulier dans la catégorie A et dans les corps d'ingénieurs au point qu'on ne sait pas si on pourra recruter demain au bon niveau dans la fonction publique d'État, le MEEDDAT, qui aurait dû être le fer de lance de la technicité de la puissance publique, voit partir ses cadres supérieurs, notamment techniques.
On l'a dit, ce sont les organisations syndicales qui ont appris à des directeurs départementaux de l'équipement ou de l'agriculture et de la forêt, à des directeurs régionaux de l'équipement, de l'industrie, de la recherche et de l'environnement, ou de l'environnement qu'ils n'étaient pas préfigurateurs et étaient donc « virés ». Je ne suis même pas certain que la directrice générale de ce ministère ait été officiellement informée qu'elle était remplacée !