Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, comment ne pas prendre part à un tel débat ?
Nous sommes tous fils, petits-fils, arrière-petits-fils de paysans. Nous habitons un merveilleux pays ; il suffit de traverser la France pour le constater. Ainsi, me rendant récemment dans le nord du Cotentin pour y visiter une installation française exemplaire, j'ai traversé cette belle Normandie – vous la connaissez bien, monsieur le ministre – après avoir quitté le non moins beau Languedoc-Roussillon, ma terre natale.
Vous nous invitez donc à débattre, puisque vous avez décidé de légiférer afin de moderniser l'agriculture française. L'objectif est pertinent, l'intention est louable, mais la tâche est ardue, et elle est essentielle. Vous faites preuve de courage et de clairvoyance ; vous êtes à l'écoute et vous êtes un homme de terrain.
Si la tâche est ardue, c'est en raison de l'importance de l'agriculture. Il y a quatre cents ans, Sully et Henri IV ont fait le nécessaire pour que la France soit une terre nourricière. Aujourd'hui, l'agriculture constitue toujours un secteur fondamental de notre pays.
Mes chers collègues, le monde dans lequel nous vivons et la difficile période de crise que nous traversons conduisent à réaffirmer l'importance de l'économie réelle. Or l'agriculture, comme les secteurs de production en général, est bien au fondement de cette économie réelle.
L'agriculture, c'est la vie. L'agriculture, c'est l'alimentation ; c'est l'indépendance de la France ; c'est aussi la lutte contre la faim dans le monde. La France est une grande nation qui apporte beaucoup à ses citoyens, mais aussi, plus largement, au monde entier. Du reste, notre économie elle aussi se nourrit de l'agriculture puisque celle-ci, avec l'ensemble du secteur agro-alimentaire, profite à notre balance commerciale. À une époque où la balance commerciale française est en difficulté, nous pouvons donc nous féliciter de nos vins et spiritueux et, plus généralement, de notre secteur agro-alimentaire.
L'agriculture, c'est aussi la sécurité alimentaire, c'est l'entretien de l'espace, ce sont des territoires vivants ; c'est le maillage de la France. Ce sont des femmes et des hommes passionnés, enracinés, attachés à leur terre, à leur production, à leur travail.
Or l'agriculture française est en crise. Certes, les agriculteurs sont habitués aux calamités, qui relèvent parfois de l'impondérable, avec lesquelles ils doivent composer et qu'ils acceptent. Mais, aujourd'hui, ils sont confrontés à la crise de la mévente, à la concurrence déloyale, au fait que les normes environnementales appliquées en France au nom de la sécurité alimentaire ne le sont pas ailleurs et à une baisse considérable des revenus, qui dépasse les 30 %. C'est insupportable. Cette crise fait perdre à l'agriculture l'équivalent d'un département tous les dix ans.
Dans ce contexte, nous avons la responsabilité de prendre part à la réflexion, mieux, à l'action visant à défendre et à sauver notre agriculture. Il faut accompagner les agriculteurs. Il faut réguler l'agriculture au lieu de la livrer à une liberté sauvage.
Il faut aussi simplifier l'agriculture. Je songe ici à tous ces agriculteurs qui, le soir venu, après une journée de rude labeur à l'extérieur, se transforment en secrétaires administratifs pour remplir papiers et imprimés.
Il était bon, me semble-t-il, de rappeler tout cela, pour bien comprendre le sens du projet que vous nous proposez aujourd'hui d'examiner.
Si vous me le permettez, j'évoquerai mon vécu, qui s'enracine dans le territoire de ma circonscription, que je connais bien et où la viticulture marque son empreinte sur les paysages comme sur l'économie locale. Dernièrement, lors d'une réunion publique dans mon village de Saint-Privat, j'ai été très surpris de la composition de l'assistance : on y voyait de nombreux néo-ruraux, et les anciens étaient absents. Sur le chemin du retour, j'ai également vu des jachères là où se trouvaient auparavant des vignes.
Si, sur le plan qualitatif, la viticulture a vraiment fait sa révolution, elle n'en mérite pas moins, monsieur le ministre, d'être accompagnée. Les marchés doivent être régulés pour remédier aux conséquences des fluctuations des récoltes et une contractualisation vraiment équitable avec le négoce doit permettre une rémunération correcte des viticulteurs et des producteurs.
Je veux également évoquer la difficile situation de l'ostréiculture sur le territoire de ma circonscription. Avant de regagner cet hémicycle, j'ai d'ailleurs appelé le représentant des ostréiculteurs de Thau.
En raison de la mortalité des naissains, nous risquons de connaître à la fin de l'été une pénurie de certaines catégories d'huîtres, notamment les huîtres usuelles. Les fêtes de Noël s'annoncent également comme une période de possible pénurie.
Dans ce domaine, nous devons, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous encourager à passer les trois très difficiles années qui nous attendent, car le programme de recherche actuellement en cours ne suffira pas. En l'absence de stocks, nous devons permettre aux ostréiculteurs de traverser cette période difficile avant de renouer avec la belle production qu'ils connaissent habituellement.
Je veux aussi parler de la pêche. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Oui, mes chers collègues, de la pêche ! Je rends hommage au ministre qui, récemment, a su condamner sans délai des actes de piraterie commis par certains à l'encontre de pêcheurs de thon qui, eux, respectaient le calendrier et les quotas définis par la loi.