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Intervention de Catherine Quéré

Réunion du 30 juin 2010 à 15h00
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Quéré :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'agriculture française, avec ses 30 millions d'hectares exploités – en majorité dans le cadre de petites et moyennes exploitations à dominante familiale –, joue un rôle majeur dans notre tissu économique. C'est un secteur d'activité qui génère de l'emploi non seulement au sein même des exploitations, mais aussi dans la filière agroalimentaire, avec environ 640 000 actifs, soit deux fois plus que l'industrie automobile !

Je vous rappelle que la France est le premier producteur agricole européen, même si cette place varie selon les productions. C'est un atout majeur pour le commerce extérieur de la France. Malgré cela, l'agriculture française est en crise et, malheureusement, toutes les régions et tous les secteurs sont touchés. Cette loi de modernisation agricole est donc très attendue, en particulier par bon nombre d'agriculteurs désespérés.

Mais, si personne ne peut nier quelques avancées, cette nouvelle loi n'arrive pas à leur redonner de l'espoir. Je vous donnerai quelques exemples.

D'abord, vous proposez de renforcer les interprofessions, ce qui est positif, mais attention : ces structures sont trop souvent verrouillées. Si la pluralité des syndicats n'y est pas représentée, il y a un risque majeur que certains groupes d'agriculteurs ne puissent faire entendre leur voix.

Ensuite, on ne trouve pas dans ce texte la moindre ébauche d'un système de régulation, qui pourrait être une des solutions pour les agriculteurs. En effet, nous savons que cette crise est celle du libéralisme ; l'absence de maîtrise des marchés déstabilise complètement les filières. Rappelons aussi le danger que représente la fin prochaine des quotas.

En outre, qu'est-t-il fait pour réguler les prix ? Si l'Observatoire des prix et des marges n'a pas toutes les données, en particulier celles de la transformation et de la distribution, à quoi servira-t-il ? Il faut des relations loyales et équilibrées dans les relations commerciales, à condition que toutes les parties jouent le jeu dans la transparence. Or les rapports sont inégaux entre les producteurs et les distributeurs.

Sur le titre III, au sujet de la forêt, le texte rétablit certes l'article 12 de la loi d'orientation forestière de juillet 2001. Il est de nouveau précisé que les collectivités territoriales pourront passer des contrats avec l'État, notamment dans le cadre des chartes forestières de territoire. Mais on se demande où est le progrès ! Aucun signal fort n'est envoyé à ceux qui oeuvrent pour le développement de la forêt et du bois.

Certains s'inquiètent aussi de la taxe sur le foncier forestier, destinée aux chambres d'agriculture et qui ne retourne pas toujours vers le développement forestier. Qu'est-ce qui est organisé pour les milliers de tout petits propriétaires forestiers possédant des parcelles minuscules et éparpillées, et qui ne les entretiennent plus depuis longtemps ? C'est un réel gâchis.

Monsieur le ministre, j'ai très peur que ce texte ne réponde en rien à la crise actuelle que traversent nos agriculteurs. En fait, ce projet confirme le désengagement de l'État et n'empêchera pas la disparition de bon nombre d'exploitations. Il ne propose aucune perspective d'avenir ; il entérine la généralisation de l'intégration des productions, dont les agriculteurs sortent toujours perdants, alors qu'il faudrait valoriser nos savoirs locaux, relocaliser nos productions agricoles, exiger que les produits que nous consommons en Europe respectent les mêmes règles, lutter contre les spéculations, permettre à chacun de se nourrir sainement à un prix raisonnable en tenant compte du prix de revient et mettre en place des règles de commerce équitable valant aussi pour les agriculteurs.

Pour conclure, ces derniers ont besoin de prix stables et rémunérateurs. La France, monsieur le ministre, est riche des femmes et des hommes qui vivent et travaillent sur des exploitations à taille humaine, qui privilégient les productions de qualité et permettent la vitalité de nos territoires ruraux tout en s'adaptant aux défis de l'environnement. Aujourd'hui, ces hommes et ces femmes souffrent. Nous devons les aider et les soutenir avant qu'ils ne disparaissent. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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