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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 28 juin 2010 à 21h30
Règlement des comptes pour 2009 — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

S'il vous fallait encore, mes chers collègues, une preuve pour démontrer que cette crise est, contrairement à ce que vous affirmez sans cesse, loin d'être terminée, qu'elle montre des symptômes de plus en plus graves à chaque nouvelle étape, s'il vous fallait encore une preuve pour montrer que vous avez eu tort, je vous rappelle que vous avez également adopté, en 2010, trois autres lois de finances rectificatives. Je ne reviendrai pas aujourd'hui sur les plans de sauvetage des profits des banques et des marchands d'armes, ni sur l'esbroufe de votre loi dite de régulation bancaire et financière. Je me limiterai à vous apporter la démonstration que cette dette colossale a été consciemment et consciencieusement creusée par vous, mes chers collègues de la majorité, ainsi que par vos prédécesseurs, lors des législatures précédentes.

Je l'ai dit, l'année 2009 est d'une exceptionnelle limpidité pour démontrer que les trémolos dont Mme Lagarde est coutumière ne sont que des effets d'annonce.

Mes chers collègues, je vous rappelle que l'exercice budgétaire 2009 est le premier exercice qui s'inscrit dans la loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012. Je vous rappelle également que cette loi était censée mettre en oeuvre, pour la première fois, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui avait consacré cette nouvelle catégorie de loi, appelée à définir « les orientations pluriannuelles des finances publiques ». Elle devait ainsi être l'occasion de fixer, par un vote du Parlement, la stratégie nationale de finances publiques pour les trois années à venir. Adoptée le 9 février 2009, cette loi de programmation triennale devait constituer, selon les termes du Gouvernement, « le support de la stratégie de retour à l'équilibre des finances publiques ».

Ainsi, cette loi de programmation triennale avait prévu de limiter le poids de la dette à 65,3 % du PIB en 2010, pour atteindre 61,8 % en 2012. Force est de constater que la dette s'établit aujourd'hui à 1 489 milliards d'euros, soit 78,1 % du PIB. La réalité est que le Gouvernement lui-même est aujourd'hui forcé de reconnaître que les prévisions portent, pour l'année 2010, sur un déficit équivalent à 8 % du PIB et un « ratio dette rapportée au PIB » de 83,2 %.

Mais, là encore, vous cherchez à enjoliver la réalité. En effet, la Cour des comptes, quant à elle, s'alarme d'une « augmentation de la dette rapide, des charges nouvelles d'intérêts » et, selon elle, cela veut dire que « l'on va très vite vers la zone où le ratio dette sur produit intérieur brut atteint 90 % ». Nous sommes donc très loin, de l'objectif affiché d'une dette stabilisée autour de 60 % du PIB.

Et, pour une fois, vous n'avez pas la crise pour prétexte : la loi de programmation triennale a été adoptée en pleine tourmente boursière, au début de l'année 2009. Avec ce texte, lu avec dix-huit mois de recul, et en le comparant à la situation budgétaire actuelle, le Gouvernement est pris en flagrant délit d'affabulation.

Lorsqu'on fait de la politique une pure affaire de communication, monsieur le ministre, lorsque l'action publique se résume aux effets d'annonce et à l'habillage des impostures, il ne faut pas s'étonner que le fatalisme que vous aviez réussi à instiller se transforme en colère dans notre peuple.

En réalité, mes chers collègues, cette loi de programmation triennale aurait pu s'appeler loi de programmation trentenaire, tant vos objectifs apparaissent limpides lorsqu'on regarde le passé. La diminution des ressources de l'État est en effet l'une des données fondamentales de ces trente dernières années.

Selon la Cour des comptes, les recettes fiscales de l'année 2009 se sont effondrées, au point de revenir, à périmètre courant mais en euros constants, à un niveau proche de celui de 1979, alors que, dans le même temps, le PIB a augmenté de 68 %. Un programme trentenaire d'assèchement des finances publiques en quelque sorte. Je serais presque tenté de reconnaître au Gouvernement une certaine « vision politique » si cette patience ne vous était pas tout simplement imposée par les résistances populaires – ces résistances qui s'expriment parfois, comme jeudi dernier, lorsque nos compatriotes battent le pavé des rues de notre pays pour se faire entendre.

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