Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, je reprendrai l'expression de M. Carrez : la situation de 2009 est exceptionnelle. C'est en effet la première fois, en temps de paix, que le déficit de l'ensemble des administrations publiques atteint 7,5 % du PIB. Exceptionnelle sera aussi, malheureusement, l'année 2010, puisque ce déficit frôlera 8 % du PIB. Exceptionnelle encore dans le sens où le déficit finance presque la moitié des dépenses de l'État – ce qu'on n'avait jamais connu, j'y insiste, en temps de paix.
Vous avancez, monsieur le ministre, que la crise explique pour l'essentiel ce déficit. Non ! J'ignore quelle est l'évaluation de vos services, de quelle manière ils répartissent déficit conjoncturel et déficit structurel. Je sais en revanche qu'aussi bien la Cour des comptes, que la Commission européenne, que le FMI et toutes les institutions internationales établissent, de la même manière, qu'un tiers de notre déficit est de nature conjoncturelle et deux tiers de nature structurelle, c'est-à-dire antérieurs à la crise. Autrement dit, les 7,5 % du PIB que représente le déficit public sont constitués de 1,5 point de pertes de recettes dues à la crise, de 1 point dû au plan de relance et de 5 points de déficit structurel.
On comprend d'autant mieux cette répartition que la France a abordé la crise en situation de déficit excessif. Si ce dernier représentait 3,4 % du PIB en 2008, le déficit structurel était déjà plus élevé puisque nous étions à la fin d'un cycle : il atteignait 4 % du PIB. Paradoxe : vous avez continué à aggraver ce déficit structurel pendant la crise. La Cour des comptes rappelle en effet qu'on note un point d'augmentation du déficit structurel entre 2008 et 2009 qui s'explique, pour 0,6 point, par des baisses de prélèvements, et pour le reste par une augmentation des dépenses plus forte que prévue.
La norme de la dépense publique a été dépassée, monsieur le ministre, de quelque 0,3 point si l'on s'en tient à vos chiffres. Toutefois, si l'on y regarde de plus près, comme l'a fait la Cour des comptes, et que l'on mesure les dépenses dues au plan de relance proprement dit, à l'exclusion d'autres dépenses – structurelles – qui s'y sont indûment glissées, nous parvenons à 1,6 % d'augmentation de la dépense. Si l'on prend une norme au sens large, à savoir si l'on y inclut les dépenses fiscales, qui ont augmenté de 6,2 %, le chiffre est encore plus élevé.
Le déficit structurel augmente en raison des allègements fiscaux que vous avez décidés mais aussi en raison du dérapage des dépenses.
Une autre manière de mesurer la proportion entre déficit conjoncturel et déficit structurel consiste à comparer l'évolution des situations française et allemande. En 2005, les déficits publics des deux pays étaient comparables : le nôtre avoisinait 3 % du PIB et celui de nos voisins un peu plus de 3 %. En 2008, l'Allemagne a ramené son déficit à néant. Elle a donc abordé la crise avec un déficit des finances publiques nul et il atteint aujourd'hui 3,3 % du PIB. La France a pour sa part abordé la crise avec un déficit public de 3,4 % du PIB. Or, même sans la crise, les mesures structurelles prises par le Gouvernement auraient porté le déficit de 2009 à presque 5 % du PIB. Nous en sommes aujourd'hui, je le rappelle, à 7,5 % du PIB.
Jusqu'en 2010, le déficit public français sera donc dû pour les deux tiers aux politiques économiques menées par la majorité.