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Intervention de Danièle Hoffman-Rispal

Réunion du 23 juin 2010 à 11h30
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Hoffman-Rispal :

Je vais m'essayer à la concision, mais ce rapport est le résultat de huit mois de travail… Au-delà des usages établis dans ce domaine, je voudrais remercier la rapporteure avec beaucoup de conviction pour ce travail mené en commun qui a permis d'aborder les questions de fond.

Il était possible d'envisager un vote favorable du groupe socialiste, radical et citoyen (SRC) il y a deux mois, mais hélas le rapport n'est pas celui que nous aurions souhaité. Nous aurions sans doute aussi espéré en recevoir le texte un peu plus tôt. Néanmoins, je partage un grand nombre des analyses de Mme Valérie Rosso-Debord et certaines propositions auxquelles je tenais ont été reprises, bien que rédigées sans doute autrement que je ne l'aurais souhaité. Elles sont importantes, comme l'interdiction de l'imputation des amortissements mobiliers et immobiliers des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) sur les prix de journées demandés aux résidents. Cette proposition prolonge le décret de 2007 que j'avais suscité permettant aux collectivités territoriales de ne pas provisionner ou amortir le financement de la rénovation d'un établissement. Mme Catherine Vautrin m'avait d'ailleurs répondu dès 2004 qu'effectivement la personne hébergée payait finalement deux fois ces coûts d'amortissement, en tant que contribuable d'une part et en tant que résident d'autre part. Cette question est d'autant plus importante que l'imputation de l'amortissement porte le prix de la journée d'hébergement dans un EHPAD à un montant trop élevé pour de nombreuses personnes âgées. La réponse qu'il faut apporter est évidemment moins simple que la proposition du rapport puisque les financements supposent des prêts qu'il faut garantir.

Au sujet des constats partagés, il est vrai que devaient être notées les disparités de l'application de l'allocation personnalisée d'autonomie suivant les départements, mais le rapport ne développe pas assez les insuffisances de la grille AGGIR et il n'insiste pas assez sur les nombreux problèmes que pose la procédure de « pathossification ». Cependant, la question de la perte d'autonomie est bien traitée.

Le rapport ne rend compte que très imparfaitement de nos travaux. Assez brutalement, l'obsession de la crise et de l'équilibre des finances publiques a amené la majorité à ne considérer les personnes âgées, comme le faisait le rapport Laroque de 1962, que comme un coût pour la société. J'aurais aimé que, comme nous l'avions envisagé au début de la mission, les personnes âgées soient présentées comme une chance pour notre société. Par ailleurs, s'il est fait observer que l'entrée en institution se fait de plus en plus tardivement ou que l'espérance de vie en France est de deux ans supérieure en moyenne à celle des autres pays européens, on oublie de souligner que c'est grâce à l'institution de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et grâce à notre système performant d'assurance maladie. Vous faites souvent remarquer, Monsieur le Président, que nos aides sociales ne sont pas à la hauteur de ce que nous en attendons. Or pour les personnes âgées, la mise en place de l'APA a permis un maintien à domicile dans les meilleures conditions. Depuis 2002, l'obsession de la majorité est de la remettre en cause en raison de son coût, même si la CNSA a été créée depuis. J'avais moi-même critiqué la création de la CNSA en 2004 alors qu'elle semble être un outil perfectible, mais finalement utile.

Au début du rapport, il est rappelé que le candidat à l'élection présidentielle de 2007 avait promis la création d'un cinquième risque pour protéger nos aînés. Pour moi, comme pour nos concitoyens, une telle promesse ne pouvait aboutir qu'à une chose : une cinquième branche de la sécurité sociale. Et c'est dans cette optique qu'en 2007, j'ai voté contre le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA) pensant déjà que pour assurer le financement d'une partie des dépenses liées à la perte d'autonomie, il n'était pas nécessaire de faire d'énormes cadeaux fiscaux par une exonération des droits de succession, dont le montant peut être évalué à 2,7 milliards d'euros.

Le groupe socialiste, radical et citoyen n'a pas voté le rapport de la mission parce que l'idée que la création de l'APA a constitué un véritable progrès n'y est pas affirmée. Or, la qualité de vie de nos aînés est pour moi un point fondamental.

S'agissant des propositions elles-mêmes, le constat des disparités des politiques menées par les départements en matière de contribution des familles est exact. Pour autant, que reste-t-il de la décentralisation si les collectivités territoriales n'ont plus de marge de manoeuvre dans ce domaine ? Mettre complètement fin au recours à l'obligation alimentaire pour permettre un remboursement des aides sociales à l'hébergement risque de poser problème à un certain nombre de départements en les privant de rentrées d'argent importantes, alors même que les contributions qu'apporte l'État à ces collectivités diminuent. En outre, s'il est nécessaire de rester raisonnable en matière de sollicitation des membres d'une famille, la responsabilisation des enfants vis-à-vis de leurs parents me semble un juste retour des choses. Élever un enfant prend vingt ans, un temps qu'il convient de rapprocher des deux ans que dure en moyenne la dépendance d'une personne âgée. Enfin, cette obligation matérialise tout de même un lien intergénérationnel auquel je suis attachée.

S'agissant de la proposition n° 11, toutes les auditions menées par la mission ont montré que l'APA joue pleinement son rôle, contrairement à la prestation spécifique dépendance, parce qu'elle ne s'appuie pas sur le recours sur succession. Or il est proposé une mesure optionnelle hybride pour les demandeurs d'une APA possédant un patrimoine d'au moins 100 000 euros. Il est pourtant clair que ce n'est pas la personne âgée dépendante qui choisira elle-même le mode de règlement de ses dépenses, mais ses enfants. La mise en place d'une telle préconisation remet, de fait, en cause à l'APA.

La proposition n° 12, visant à rendre obligatoire dès l'âge de cinquante ans, la souscription obligatoire d'une assurance perte d'autonomie était, à vrai dire, attendue. Mais j'espérais que la rapporteure laisserait le Gouvernement en prendre la responsabilité. Certes, il est plus simple d'être dans l'opposition mais quelle surprise de constater que la promesse de la création d'un cinquième risque soit en fait remplacée, trois ans après l'élection présidentielle, par un recours à l'assurance privée. Non seulement il conviendra de payer, mais en plus sans garantie de résultat ! Le rapport précise même que le système d'assurance privée se substituerait à l'APA. C'est inacceptable. Il eût été possible de discuter de la création d'un complément assurantiel, mais il s'agit là d'une mesure qui met fin à la solidarité nationale en matière de dépendance. La préconisation est, de surcroît, en contradiction avec d'autres propositions du rapport telle la réforme du régime de la contribution sociale généralisée des inactifs. J'ajoute que l'âge de cinquante ans est celui où les compagnies d'assurance privées commencent à s'inquiéter des risques de santé des assurés au point de refuser la prise en charge de certains d'entre eux. Leur labellisation est donc parfaitement illusoire.

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