Éviter la fuite des cerveaux pour aider au développement de nos partenaires, pays moins avancés ou pays émergents, n'est absolument pas la marque de la politique européenne en matière d'immigration. Ce n'est certainement pas non plus la marque de la directive « carte bleue européenne » à laquelle vous faisiez allusion, monsieur le ministre, qui sera transcrite en droit français dans le texte que vous nous annoncez pour l'automne. Je vous remercie d'ailleurs de nous préciser le calendrier d'examen de ce projet de loi de M. Besson.
Lorsqu'on examine la réalité de l'impact de ce qu'il est convenu d'appeler improprement la « fuite des cerveaux », on se rend compte que les pays émergents ont émergé parce qu'une part de leurs nationaux qualifiés travaillent à l'étranger. Tout est question de taux. Quand 10 à 15 % des diplômés d'un pays travaillent à l'étranger, c'est bon et cela accompagne le décollage de ce pays. Il ne s'agit donc pas de fuite des cerveaux, mais de coopération, d'accompagnement et de circulation des personnes. En revanche, quand 80 % des diplômés s'expatrient, comme c'est le cas en Haïti, c'est une catastrophe. Pourtant, rien, dans les politiques européennes ou françaises, ne contribue à définir un taux à l'échelle internationale ou un dédommagement pour les pays dont nous pillons les cerveaux. Nous pourrions mener une réflexion intéressante à ce sujet.
Enfin, les politiques de co-développement du Gouvernement ne visent aucunement à utiliser les personnes qualifiées de manière intelligente. J'en veux pour preuve le caractère famélique des programmes d'aide au retour des migrants, qui concernent très peu de personnes. Quant à l'OFII, il n'a pas les moyens d'accompagner le développement d'entreprises créées ici et installées dans les pays d'origine. Bref, qu'il s'agisse d'endiguer la fuite des cerveaux ou de faire profiter de manière équitable l'ensemble de l'humanité des compétences acquises en France et ailleurs, ces préoccupations me paraissent tout à fait étrangères aux priorités de la politique du ministre Éric Besson et du Gouvernement.
Soyons modestes mais ambitieux, et appliquons les résolutions que nous avons votées à l'unanimité. Pour cette raison, je suis certaine, mes chers collègues, que vous voterez la proposition de loi et les amendements présentés par le groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)