Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le 11 mai dernier, l'Assemblée nationale adoptait à l'unanimité une résolution, proposée par le groupe UMP, rappelant son attachement au respect des valeurs de la République. Puisant aux sources de l'histoire de la République, cette résolution rappelle l'article 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. » Elle rappelle également l'article 1er de la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948, article qui affirme solennellement que « tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits », au lendemain de la Seconde guerre mondiale et de la Shoah, dans un monde qui venait d'apprendre au prix de 60 millions de morts ce qu'entraînent la xénophobie, le racisme, le nationalisme.
Cette résolution rappelle aussi la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, qui interdit toute discrimination, ainsi que la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne du 7 novembre 2000, qui stipule dans son article 20 que « toutes les personnes sont égales en droits ». Toutes les personnes sont égales en droits, et non pas tous les communautaires, ou tous les Français.
Cette résolution, adoptée à l'unanimité, réaffirme en son alinéa 11 que « le principe d'égalité et la lutte contre toute forme de discrimination sont au coeur de notre ordre juridique et notre projet de société ». En son alinéa 16, la résolution propose que « la lutte contre les discriminations et la promotion de l'égalité […] soient une priorité des politiques publiques menées en matière d'égalité des chances, en particulier au sein de l'éducation nationale ».
Si je fais ce rappel de trois siècles d'histoire, c'est pour que chacun ici se souvienne que, décidément, la préférence nationale n'est pas républicaine, je dirai même n'est pas française.
Le 11 mai dernier, la représentation nationale a ainsi jugé comme relevant du désordre la persistance dans notre droit de dispositions surannées et parfaitement discriminatoires. Il y a un mois, monsieur Mariani, monsieur Bodin, vous avez solennellement souhaité avec vos collègues de l'UMP que la lutte contre les discriminations soit une priorité. Eh bien, vous voilà exaucés par Daniel Goldberg et le groupe SRC !
En effet, dans son remarquable et passionnant rapport, Daniel Goldberg rappelle qu'aujourd'hui les étrangers non communautaires sont massivement victimes de discriminations : un tiers des emplois leur sont interdits. Il était temps d'y mettre bon ordre. Si l'on peut comprendre que l'accès à des emplois effectivement liés à l'exercice de la sûreté, de la sécurité ou de la souveraineté nationale soit conditionné par l'allégeance et donc la nationalité, cela ne représente en aucun cas une masse de 7 millions d'emplois.
Nos collègues sénateurs ont ainsi unanimement décidé de commencer modestement à remettre un peu d'ordre et de rationalité, en supprimant les conditions de nationalité qui restreignent encore aujourd'hui sans la moindre justification l'accès des travailleurs étrangers à l'exercice de certaines professions libérales ou privées. Monsieur le secrétaire d'État, vous venez de rappeler la portée de cette proposition de loi adoptée à l'unanimité au Sénat, qui concerne 7 professions, et ne remet absolument pas en cause les réglementations qui leur sont afférentes.
C'est un modeste mais bon début, puisque le champ couvert par la proposition de loi adoptée au Sénat ne concerne que 2,8 % de l'emploi en France, alors que les étrangers sont exclus de 30 % des emplois. On souligne leur taux de chômage, qui serait supérieur à la moyenne, alors qu'un tiers des emplois leur est interdit d'accès.
Depuis l'adoption de cette proposition de loi au Sénat, la loi Hôpital, patients, santé et territoires est venue corriger un certain nombre d'irrégularités de situation qui concernaient les professionnels de santé. Il y a eu quelques oublis, qui seront corrigés par des amendements du groupe socialiste.
Notre groupe est parfaitement d'accord avec la proposition de loi adoptée par le Sénat, mais souhaite mettre davantage d'ordre et, au lieu de se contenter des 2,8 % d'emplois, il propose que la résolution de l'Assemblée du mois dernier soit effectivement mise au coeur des politiques publiques. Nous avons donc décidé de nous attaquer à cette immense discrimination dont sont victimes les étrangers non communautaires en France, en soumettant à l'Assemblée plusieurs amendements qui sont conformes aussi bien à la délibération de la HALDE du 30 mars 2009…