Je me disais bien que cette phrase ferait plaisir à quelques-uns. (Sourires.)
Mais je préfère vous appeler à porter votre regard sur les enjeux qui nous attendent.
La question institutionnelle bouche l'horizon européen depuis plus de dix ans, en fait depuis l'ouverture en 1995 de la négociation du traité d'Amsterdam. Il est temps d'en finir.
Nos concitoyens n'ont pas de raison de se passionner interminablement pour les mécanismes de fonctionnement de l'Union. Ce qui les concerne, ce sont les actions concrètes, les réalisations de l'Union. Selon la formule d'Alain Lamassoure, quand on prend l'avion, ce n'est pas pour savoir comment il vole, quoiqu'on puisse s'en inquiéter légitimement, mais pour aller vers une destination qu'on a choisie. Voilà pourquoi je veux appeler votre attention sur les enjeux qui nous attendent.
Le premier enjeu, c'est l'exercice de la présidence tournante de l'Union pendant le deuxième semestre de l'année 2008. L'importance de cette période tient au fait qu'il faudra, dans un délai rapide, préparer toutes les décisions, nombreuses et complexes, de mise en oeuvre du traité de Lisbonne. La France y puisera l'occasion de retrouver son rôle traditionnel de nation pilote dans le système européen. À elle, et à vous, messieurs les ministres, de prouver qu'elle en a de nouveau la volonté.
Le deuxième enjeu est le suivant. L'année 2009 sera, pour l'Union européenne, une année décisive. Non seulement parce qu'elle sera marquée par le renouvellement du Parlement européen et l'élection, par la majorité politique qui l'aura emporté, du futur président de la Commission. Mais aussi parce que, dès le 1er janvier, il appartiendra au Conseil européen de choisir le Président de l'Union et le Haut représentant.
Tous ces choix ne pourront plus être réservés au secret des chancelleries, comme par le passé. Ils doivent être préparés, débattus et adoptés de façon publique, sous le regard des opinions publiques, et avec le concours des parlements. C'est une excellente opportunité pour rendre l'Europe accessible à tous, compréhensible par tous.
La France doit s'y préparer. Elle y trouvera à coup sûr un test de son autorité éventuellement retrouvée. Tel est bien le deuxième enjeu.
C'est un enjeu considérable, parce que le président du Conseil européen ne trouvera pas dans le texte du traité des prérogatives autres que la présidence du Conseil. C'est au premier qui prendra cette fonction qu'il appartiendra d'en créer la véritable dimension. L'Europe a besoin, sans nul doute, d'un Président ayant une stature politique forte, aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur.
Mais, troisième enjeu, c'est dans cette période qui va de l'année 2008 à la fin de l'année 2009 que seront abordés tous les grands sujets de la relance de la construction européenne.
Le Président de la République a, en plusieurs occasions, fait connaître ses intentions : un pacte européen pour l'immigration, une politique européenne de l'énergie, une politique de lutte contre le changement climatique, la renégociation de la politique agricole commune et la relance de la politique de défense, que le ministre évoquait à l'instant.
Mais la France ne peut pas délibérer toute seule. Il lui faudra des alliés et des partenaires. La réussite des chantiers européens demande que, au sortir de cette période incertaine qui s'achève, la France et l'Allemagne reconstituent cette solide entente qui a toujours été le préalable à tous les succès, à toutes les réussites européennes.
Contrairement à ce qu'on a pu croire un moment, cette solide entente est plus nécessaire que jamais : à vingt-sept, l'Europe ne peut pas s'inspirer seulement du modèle fondateur de l'après-guerre. C'est une Europe nouvelle qui recherche un modèle nouveau. La France et l'Allemagne ont, je le crois, la charge historique de le proposer aux peuples d'Europe.