Cela étant, l'esprit de ce texte nous satisfait, même s'il reste à savoir ce qu'il en adviendra. Je crois que j'ai été le premier à dire dans cet hémicycle, au nom du groupe SRC, qu'il était temps d'intégrer l'urbanisme commercial à l'urbanisme en général – en tenant compte, évidemment, d'un certain nombre de paramètres. J'ai constaté avec satisfaction que nombre de nos collègues, notamment de l'UMP, ont fait leur devoir de parlementaires en écoutant notre proposition et en considérant qu'il s'agissait d'une bonne solution.
Si nous sommes d'accord pour intégrer l'urbanisme commercial au SCOT, il reste à savoir à quoi doit servir ce schéma. Il doit délimiter les zones en fonction de l'habitat, du transport, bref de tous les paramètres d'organisation de nos villes, mais également permettre de définir ce que l'on met à l'intérieur des zones. C'est sur ce point que nous commençons à avoir des divergences, sur les surfaces concernées comme sur les commerces qui peuvent s'y implanter.
Pour ce qui est des surfaces, le débat a déjà eu lieu en commission. Le rapporteur a réussi à faire adopter un amendement fixant à 1 000 mètres carrés de surface hors oeuvre nette le seuil au-delà duquel le SCOT doit autoriser les implantations commerciales. Je suis tenté de dire que l'on peut s'en satisfaire pour les zones commerciales situées en dehors des agglomérations. En revanche, il est impossible de retenir ce seuil dans les centres villes, où les cellules sont généralement d'une surface très inférieure. C'est notamment le cas à Paris où, ainsi que me le disait Patrick Bloche, les cellules sont en principe comprises entre 300 et 600 mètres carrés, ce qui rendrait le dispositif inopérant si l'on retenait un seuil unique de 1 000 mètres carrés. Nous devrons en débattre tout à l'heure.
L'aménagement de l'espace nécessite également d'évoquer la proximité et la diversité des commerces. Sur ce point, il semble que nous ne soyons pas allés au fond des choses, en raison de certaines réticences. Certes, la position de la Commission européenne sur ce point n'est pas claire, ce dont certains ont tiré argument. Il est malheureusement fréquent dans notre pays que l'on s'en tienne à une hypothétique opposition de la Commission, utilisée comme prétexte pour éviter de faire jouer la confrontation des idées.
Les Allemands ont, sur cette question, une conception bien différente de la nôtre. L'excellent rapport de notre collègue Michel Piron sur l'urbanisme en Allemagne montre bien que nos voisins européens n'ont pas hésité à aller très loin, si bien qu'ils ont, au terme de trente ou quarante années d'urbanisme, des villes très différentes des nôtres : des villes où l'on vit bien, où le commerce de proximité est préservé et où le commerce de détail est beaucoup moins cher que chez nous.
Nous avons fait l'erreur de considérer qu'il suffisait de jouer sur la surface des magasins pour faire baisser les prix ; or, une très grande surface ne garantit nullement des prix inférieurs à ceux pratiqués ailleurs. (« C'est sûr ! sur les bancs du groupe SRC.) En réalité, c'est au rapport entre les charges et le chiffre d'affaires qu'il faut s'intéresser. Quand on a un chiffre d'affaires important, on peut prendre moins de marge : c'est ce qui se fait en Allemagne, en particulier pour les commerces de détail. J'ajoute qu'en France, le prix affiché dans les grandes surfaces n'est qu'un coût brut, dans la mesure où il ne tient pas compte du coût des déplacements que doivent effectuer nos concitoyens pour y accéder.
Nous allons donc devoir débattre de la diversité du commerce. Si vous n'acceptez pas la discussion sur ce point, les maires, les présidents de communautés de communes et de SCOT n'auront qu'un pouvoir illusoire : ils ne pourront pas faire figurer dans la charte commerciale les éléments de nature à leur permettre d'agir réellement. Et que l'on ne vienne pas nous dire que c'est une entrave au commerce, que le sacro-saint principe de la libre entreprise est mis en péril ! Comme chacun le sait, il y a toujours eu des règles d'installation pour les entreprises. Il faut bien tenir compte, par exemple, des éventuelles nuisances que peut causer une industrie. Pourquoi les entreprises commerciales seraient-elles les seules à pouvoir s'installer pratiquement n'importe où ?
On nous oppose aussi le marché unique, mais en quoi consiste-t-il ? Il veille à ce que les différences de provenance des produits ou des services ne se traduisent pas par des distorsions. Les Allemands ont évité cet écueil : ils n'ont jamais dit que les commerces allemands devaient proposer un certain pourcentage de produits allemands, ce qui les aurait placés en infraction au regard des règles du marché unique. Mais en quoi l'organisation du commerce à Hambourg a-t-elle une conséquence sur l'organisation du commerce à Milan ou à Bruxelles ? C'est un fait, il y a trop souvent confusion entre l'idée d'un marché ouvert – il l'est autant en Allemagne qu'en France – et celle d'une organisation commerciale de base favorisant l'intérêt de nos concitoyens.