Nous avons eu, tout à l'heure, une amorce de débat pour savoir où avait commencé la crise, qui étaient les coupables : les Américains ou les Européens ?
La semaine dernière – notre rapporteur, M. Jérôme Chartier, peut en témoigner – nous avons reçu le président de l'association française des banques et, depuis, je me demande très sérieusement s'il reste aux politiques une quelconque marge d'action sur le système financier. Écoutez bien, madame la ministre, monsieur le président de la commission, cela concerne des millions de Français. Ce monsieur nous a en effet expliqué que les conditions faites par les banques françaises à leurs clients étaient parmi les meilleures du monde. Nous avions pourtant sous les yeux un rapport de la Commission européenne montrant qu'elles étaient, en France, parmi les plus mauvaises ; nous ne sommes distancés que par les Espagnols et les Portugais ; partout ailleurs, la rémunération des services se caractérise par son ordre, sa clarté, et son coût est très inférieur.
Chaque Française, chaque Français a un compte bancaire. Quand on sert le « président du pouvoir d'achat », il me semble qu'on devrait se préoccuper de ce que paient les clients des banques au titre des services. Cela n'a pas l'air de vous brancher, madame la ministre, et ce n'est pourtant pas un petit sujet.
Alors que la discussion portait sur les diverses mesures prudentielles – Bâle II, Bâle III –, M. le président de l'association française des banques n'a cessé de nous mettre en garde, expliquant que cela allait se traduire par la nécessité de renforcer les fonds propres, qui coûtent très cher. Comme nous lui demandions combien cela coûtait exactement, il a répondu : de 9 à 13 %. Je n'ai pas été le seul à sursauter ; M. Arthuis lui-même, président de la commission des finances du Sénat, a été surpris. Nous avons demandé d'où sortait ce chiffre, au moment où la BCE fait du crédit à 1 % et dans un pays où les dépôts ne sont pas rémunérés. M. le président de l'association française des banques a répondu que c'étaient ce qu'exigeaient leurs actionnaires pour leur rémunération !
Madame la ministre, j'attire votre attention sur une réalité : le système bancaire qui est censé concourir au développement de l'économie prétend à 13 % de rémunération des fonds, dans une conjoncture où le taux de croissance est de 1 % ; il s'arroge de 9 à 13 % de rémunération dans une économie où le brave déposant du Livret A touche, royalement, 1,25 % !
Ce système bancaire et financier, qui est censé aider le développement économique, est devenu un système prédateur. Notre brillante direction générale du Trésor devrait sérieusement réfléchir à la question et nous exposer un jour sa version des faits. Sans doute ces deux chiffres sont-ils un peu abscons pour les non-initiés, mais ils nous permettent de mesurer ce qu'est devenue la puissance du système bancaire et de ses divers accompagnants.
Puis-je me permettre de vous faire une suggestion, madame la ministre ?
Dans la mesure où la France emprunte à 3,50 % – avec un spread de 3 et quelque, un peu supérieur à celui de l'Allemagne, qui commence à devenir consistant –, pourquoi ne pas emprunter à ce taux et prendre, dans les banques, du capital qui vous rapportera 13 % ? Vous auriez déjà là de belles recettes qui vous aideraient à tenir vos engagements auprès de Bruxelles.