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Intervention de Pierre-Alain Muet

Réunion du 10 juin 2010 à 9h30
Régulation bancaire et financière — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPierre-Alain Muet :

Après la brillante démonstration de M. Eckert, j'exposerai les raisons pour lesquelles le groupe socialiste votera la motion de rejet préalable.

Ce projet s'est fait attendre. S'il a été remis au Parlement au mois de décembre dernier, il est probable que, sans la crise grecque, il n'aurait pas encore été soumis à notre examen. En pleine crise, le Gouvernement s'est souvenu qu'il existait un texte dont les premiers articles n'allaient pas très loin puisqu'il s'agissait de transposer des directives européennes. Ensuite, le rapporteur a ajouté quelques éléments. Mais quand on compare ce projet à ce qui se fait aux États-Unis notamment, on s'aperçoit qu'il est très en retrait en matière de régulation.

Madame Lagarde, les textes en discussion aux États-Unis ne sont pas des petits textes puisqu'il s'agit de changer radicalement la régulation bancaire, de procéder à la séparation, dans un nouvel univers, des banques de dépôt et des banques d'affaires, et d'instaurer des taxes significatives sur les banques. La France, pour sa part, prévoit seulement de transposer quelques directives et de prendre quelques mesures supplémentaires.

Vous nous avez dit également que l'AMF pourra poursuivre ce qu'elle a fait dans une période de crise, c'est-à-dire interdire un certain nombre de ventes à découvert. Quand l'Allemagne a pris la décision, le 18 mai dernier, d'interdire des ventes à découvert sur les titres souverains, cela avait un vrai sens. Si la France avait immédiatement emboîté le pas à l'Allemagne, on aurait retrouvé ce couple franco-allemand qui agissait rapidement. Du coup, les autres pays auraient suivi. Or nous ne savons toujours pas si vous allez suivre la commission des finances sur les ventes à découvert.

Les États-Unis vont créer une taxe sur les banques, et l'Allemagne va sans doute faire de même. Et la France ? Cela fait très longtemps que le groupe socialiste propose d'instaurer une taxe de 10 % sur les profits bancaires au motif qu'il n'est pas possible d'accepter que les citoyens, à travers les États, interviennent pour sauver les banques sans retour, c'est-à-dire que ce soit eux qui payent l'addition à travers des déficits publics.

La Cour des comptes indique que, si la France était entrée dans le capital des banques, elle aurait gagné 5,8 milliards d'euros. Elle ne l'a pas fait. Vous nous répondez que la démarche suivie n'a rien coûté, et qu'elle a même rapporté un peu. Mais cela aurait dû rapporter 5,8 milliards d'euros ! Dès lors que ce n'est pas le cas, il faut créer une taxe sur les banques. Voilà pourquoi nous proposerons par amendement d'instaurer une taxe de 15 %, ce qui pourrait rapporter 3 milliards d'euros.

S'agissant des agences de notation, il faut réformer un mode de rémunération absurde puisque c'est celui qui est noté qui finance l'agence qui le note. Où a-t-on vu un tel fonctionnement ? Par ailleurs, les agences de notation exercent à la fois une activité de conseil et de notation. Pour leur part, les États-Unis progressent sur la question de la séparation des activités de conseil et de notation. L'Europe avance doucement, quant à elle.

Pour résumer ce qui se passe en matière de régulation financière, je dirai que les États-Unis agissent, que l'Europe réfléchit et que la France attend. Ce n'est pas ainsi que l'on répond à une crise de cette importance. Voilà pourquoi le groupe socialiste votera la motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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