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Intervention de André Wojciechowski

Réunion du 8 juin 2010 à 21h30
Marché de l'électricité — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAndré Wojciechowski :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les directives européennes, appliquées aux marchés français de l'électricité et du gaz, ont révolutionné la situation très paternaliste de nos services publics, pour ouvrir le champ de la fourniture d'énergie à de nouveaux intervenants : les fournisseurs alternatifs.

Monsieur le secrétaire d'État, cette prétendue ouverture à la concurrence est en réalité une ouverture à des finalités capitalistiques d'un système précédemment éprouvé qui avait l'adhésion sans réserve des Français,

En effet, l'introduction de nouveaux opérateurs et la décomposition des métiers entre producteurs, salles de marchés, fournisseurs, gestionnaires de stockages, gestionnaires de réseaux de transports, gestionnaires de réseaux de distribution, responsables d'équilibres et clients finaux ont multiplié par un facteur incommensurable les procédures et outils de communication entre ces multiples intervenants.

Pour exemple, dans le monde paternaliste duquel nous peinons à nous extraire – et cela se comprend –, il fallait un seul relevé d'index par trimestre pour facturer un fluide, par différence avec le relevé précédent. Dans le monde d'aujourd'hui, il faut 13 000 relevés automatisés pour constituer une courbe de charge sur la même période, et ensuite la transmettre à de multiples intermédiaires. En résumé, on a constitué une bulle transactionnelle, qui véhicule des milliards d'informations par l'intermédiaire désormais indispensable de structures, programmes, réseaux ou opérateurs informatiques, et rendu le fonctionnement de notre économie énergétique complètement dépendant de ces systèmes et surtout – ce à quoi vous devriez être sensible, monsieur le secrétaire d'État, – de leurs surcoûts.

Chacun comprendra que la multiplicité et la complexité de ces nouvelles procédures et de ces nouveaux intervenants ne peut que se solder par l'augmentation des prix pour le client final. Pourtant, un autre modèle que celui du commerce dématérialisé existe pour l'énergie, comme l'ont souligné Frédéric Reiss et Jean-Michel Clément : le modèle du service public de proximité – les fameuses régies –, qui existe encore, notamment parmi nos entreprises locales de distribution, les ELD.

Nos ELD, souvent distributeurs multi-fluides, disséminées sur le territoire français par la pertinence de l'histoire, bénéficient d'un satisfecit unanime de leur clientèle, quelle que soit leur envergure, de la plus petite à la plus grande, et ce grâce au service de proximité qu'elles assurent et à un suivi relationnel personnalisé. Or, aujourd'hui, ces entreprises, surtout les plus petites, sont menacées de disparition en raison de la complexité des procédures et des outils à mettre en oeuvre, ne serait-ce que pour assurer leur propre approvisionnement.

Pour respecter l'esprit même d'une véritable concurrence et le maintien des modèles alternatifs, je vous demande donc, monsieur le secrétaire d'État, d'assurer la pérennité de ces entreprises, de défendre un service local de qualité et personnalisé, de défendre les prix et le client final, comme le proposent les amendements que je soumettrai à notre assemblée. Ceux-ci visent à autoriser – par délégation des plus petites entreprises aux plus grandes – des transferts de droit pour la mise en oeuvre des dispositifs complexes d'accès aux marchés de la fourniture et de la base régulée. Ainsi, la taille critique indispensable pour aborder les mécanismes de marché ne sera pas stérilisante pour le service local, et, dans le grand champ de nos marchés énergétiques, les chevilles ouvrières que sont nos entreprises locales de distribution ne seront pas les sympathiques abeilles sacrifiées à la monoculture des mécaniques boursières.

Il convient aussi de prendre en compte les spécificités des transports ferroviaires et des transports en commun. Ces transports sont consommateurs d'électricité – à titre d'exemple, la SNCF consomme chaque année 7 térawattheures de traction, ce qui en fait l'un des tout premiers consommateurs français, et surtout l'un des plus gros consommateurs de pointe. La demande de transport ferroviaire de la part des voyageurs, et en particulier de transport régional, y compris en Île-de-France, est essentiellement liée à l'activité économique et aux mouvements de la population active ; il s'agit donc d'une pointe incontournable et d'une priorité, et une incitation à la maîtrise des coûts d'électricité pourrait provoquer un report des voyageurs sur un mode moins favorable à l'environnement.

Le Grenelle de l'environnement incite au report modal de la voiture personnelle vers le transport en commun et le transport ferroviaire, mais il ne faudrait pas que la loi NOME ait un impact lourd sur la facture des transporteurs – SNCF, RATP ou autres –, et au final sur le prix du billet, donc sur l'usager et le client. Il est en ce sens nécessaire que le Gouvernement et le législateur prennent en compte les spécificités de ces entreprises de transport qui consomment beaucoup d'électricité de pointe. Les Français, monsieur le secrétaire d'État, sont attachés aux services publics, et ils comptent sur vous. Ne les décevez pas. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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