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Intervention de Pierre-Henri Gourgeon

Réunion du 2 juin 2010 à 16h15
Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire

Pierre-Henri Gourgeon, directeur général d'Air France et d'Air France KLM :

Pour ce qui concerne Aéroports de Paris, nous voulons nous assurer d'une évolution contrôlée des montants des redevances. Les compagnies aériennes sont en accord sur ce point. Mais ADP estime illogique d'avoir à restituer aux opérateurs la quasi-totalité des sommes collectées.

L'A380 constitue un appareil particulièrement efficace dans notre système de correspondances, c'est-à-dire dans une combinaison de dessertes à moyennes et longues distances qui génère un nombre important de vols vers une même destination. L'exemple de la liaison entre Roissy et New York devrait éclairer la discussion : Air France effectue à l'heure actuelle six rotations journalières ; en réduisant à cinq connexions par jour pour un même nombre de passagers transportés, l'A380 offre un gain commercial annuel de quinze millions d'euros. C'est positif pour l'environnement puisque la consommation de carburant et l'émission de CO2 sont réduites. C'est également une bonne chose pour le passager qui dispose d'une offre plus complète de services et d'un espace plus confortable en cabine. Il faut simplement l'employer sur des routes majeures, les seules qui permettent de faire voler un seul aéronef important à la place de deux appareils classiques. Les avions récupérés peuvent être alors redéployés vers d'autres liaisons ou plus simplement mis au rebut.

Bien sûr, comme toute innovation aéronautique, l'A380 a souffert de quelques dysfonctionnements au cours de ses premières heures de vol. Je tiens à souligner qu'Airbus a toujours été présent pour les corriger dans les meilleures conditions. Les passagers ne nous en ont du reste nullement tenu rigueur tant ils apprécient ce type d'appareil.

L'appareil a été déployé sur la liaison entre Paris et Londres. Ce n'est pas une stratégie commerciale déroutante. Il s'agit simplement de multiplier les vols pour former les équipes navigantes dans les meilleurs délais. Air France pourra à la fin de l'été affecter un A380 dans sa desserte de Tokyo. Nous passerons alors de trois vols par jour à deux, dont celui de la fin de journée qui occupe le dernier créneau horaire disponible de l'aéroport de Narita et qui connaît une demande particulièrement forte : il permet en effet de passer la nuit dans l'avion et d'arriver à Paris en début de journée par le jeu des fuseaux horaires.

De point de vue du développement durable qui intéresse particulièrement cette commission, il est constant que la pollution émise par passager transporté diminue en proportion de leur nombre. Un autobus consomme davantage de carburant qu'un véhicule automobile individuel, mais beaucoup moins que si chaque personne à son bord empruntait une automobile particulière. Le même raisonnement s'applique aux déplacements aériens. En outre, je le répète, la plateforme de Roissy se prête idéalement à l'A380 : elle mêle les moyens et les longs courriers, de sorte que les passagers s'y concentrent et disposent de plusieurs horaires quotidiens pour un même trajet. C'est positif également pour l'aménagement du territoire.

Le moment n'est pas opportun pour instaurer une taxe sur les émissions de carbone. Le secteur aérien a énormément souffert de la récession économique. Je rappelle qu'il est responsable de 2,5% des émissions globales. C'est si peu que les variations de température ont suffi à masquer sa disparition complète au cours de l'éruption du volcan islandais. Pour mémoire, la pollution générée par l'élevage est sept fois plus importante. Nous soutenons le système européen d'échange de quotas carbone, mais nous déplorons que Bruxelles veuille avancer sans considération du monde extérieur. Si les vols de longue distance qui décollent d'Europe et y atterrissent sont taxés, l'Union européenne provoquera un effet d'éviction en faveur des plateformes du Golfe, notamment Dubaï. La sagesse exige que la décision soit prise à l'échelle mondiale afin d'éviter les distorsions de concurrence. Nous disposons d'un avantage géographique puisque nous sommes à équidistance de l'Amérique et de l'Asie, et d'un avantage historique par l'ancienneté de nos implantations. Paris et Londres sont les aéroports les mieux desservis au monde. Il serait aberrant de donner un atout économique à nos concurrents alors même que notre modèle économique et la jeunesse de notre flotte font de nous des exemples en termes de lutte contre la pollution. Nous serions davantage favorables à une taxation sur les vols moyens courriers qui toucheraient tous les opérateurs.

Air France ne compte pas d'unité de recherche spécifiquement dédiée aux biocarburants. La compagnie est cependant disposée à se prêter à toute expérimentation si elle est sollicitée en ce sens.

J'ai été interrogé sur la plateforme de correspondance de Clermont-Ferrand. Nous avons consenti de grands efforts pour la maintenir en activité. Cette stratégie s'est soldée par un échec économique qui nous conduit à réduire notre présence par manque de passagers à transporter. Ryanair avait ouvert une liaison à destination de Londres ; elle s'est retirée pour les mêmes raisons. En outre, nous devons être en mesure de faire face à la concurrence des compagnies à bas prix qui s'installent sur les sites les plus fréquentés.

En ce qui concerne les Comores, une liaison directe ne nous apparaît pas opportune. Le partenariat avec Kenya Airways donne pleinement satisfaction.

J'ai à plusieurs reprise été interrogé sur les suites que nous donnions à l'éruption du volcan islandais et à la fermeture de l'espace aérien décidée par l'autorité publique. Easy Jet envisage des poursuites judiciaires et même une action de groupe. Nous appelons de notre côté les autorités européennes à prendre conscience des conséquences économiques de leur décision. Nous avons même craint un instant que le règlement européen sur le transport aérien nous contraigne à indemniser l'ensemble des passagers bloqués, durant toute la durée d'interdiction des vols, alors que la cessation du trafic n'était en rien de notre fait. Notre procédure de prise en charge fait cependant l'objet d'un accord avec l'association de consommateurs UFC Que choisir.

L'indemnisation des familles de victimes du vol AF447 est prise en charge par les assurances. Il n'y a pas de difficulté de notre point de vue. Un tiers environ des dossiers sont en discussion sur les montants et les modalités. Je crains que d'autres ne cèdent aux sollicitations de cabinets d'avocats anglo-saxons qui promettent des sommes bien supérieures à travers une action en justice. La recherche continue des boites noires a peut-être également conduit certains à attendre d'en savoir plus avant de prendre une décision. Quoi qu'il en soit, je ne comprends pas l'accusation de manque de transparence portée à l'encontre d'Air France : nous publions tous les documents en notre possession sur notre site Internet, nous exécutons immédiatement les mesures de précautions recommandées comme le remplacement de toutes les sondes de vitesse. Je crois plutôt qu'il s'agit d'une légitime impatience des familles de victimes devant les délais de l'enquête et d'une compréhensible frustration face à l'absence de cause identifiée de l'accident aérien.

Enfin, les dernières statistiques dont je dispose font état d'une baisse de la conflictualité des rapports sociaux dans l'entreprise.

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