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Intervention de Jean-Pierre Brard

Réunion du 2 juin 2010 à 21h30
Réforme des collectivités territoriales — Article 35

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Brard :

Monsieur le ministre, bien qu'il soit placé à la fin du projet de loi, l'article 35 est à nos yeux l'un des fondements de la réforme des collectivités territoriales voulue par le Gouvernement. Il s'inscrit évidemment dans le prolongement de la création du conseiller territorial et des métropoles ainsi que de l'achèvement de la carte de l'intercommunalité, mais il est avant toute chose le pendant de la suppression de la taxe professionnelle. Après avoir organisé l'assèchement des finances des collectivités, au premier rang desquelles les départements, le Gouvernement enclenche la seconde étape en mettant fin à la clause de compétence générale pour les conseils généraux et régionaux.

Je voudrais tout d'abord faire quelques remarques d'ordre juridique.

Cet article 35 pose de nombreuses questions de constitutionnalité qui ont été tranchées un peu trop rapidement par les rapporteurs du Sénat et de l'Assemblée nationale. Mais nous pouvons faire confiance à la sagesse de Jean-Louis Debré pour vous remettre dans le droit chemin, monsieur le ministre, en même temps que le Président de la République qui, à force d'aller de gauche à droite ou plutôt de droite à droite toujours, ne sait plus où il va.

Moi qui ne suis pas un adepte de la constitution de la Ve République, je me réjouis que le Conseil constitutionnel compte des piliers comme Jean-Louis Debré ou Jacques Chirac car, même s'ils sont de droite, ce sont des républicains qui savent de quoi ils parlent. Et je vois sur votre visage, monsieur le ministre, des expressions qui, si elles ne sont pas clairement formulées, disent néanmoins très clairement la nostalgie de ces hommes d'État qui faisaient honneur à notre pays. Quel contraste avec ceux qui nous connaissons actuellement ! Mais vous avez bien compris que ce n'est pas de vous que je parle mais de votre mentor.

La jurisprudence constitutionnelle reste très floue sur la question de la clause de compétence générale. Certes, la loi peut définir certaines compétences dévolues aux collectivités mais le principe constitutionnel de libre administration interdit à l'État de priver les collectivités d'exercer certaines compétences. Pour autant, la jurisprudence ne définit pas ces dernières. Cependant, en tant que responsables politiques et législateurs, nous sommes assez conscients des visées du Gouvernement en matière de répartition des compétences, notamment en ce qui concerne le département. Dans cette configuration, il y a fort à parier que l'article 35 tombe sous le coup du principe de constitutionnalité.

J'en viens à une deuxième considération d'ordre juridique. Le Gouvernement et le rapporteur soumettent à notre vote un article auquel ils ont conféré par amendement une valeur normative, ce que n'a pas fait le Sénat qui a préféré renvoyer la question des compétences à une loi publiée dans les douze mois suivant l'adoption de ce texte. Peut-être nous donnerez-vous une explication à ce sujet, monsieur le ministre ? Sa Majesté Impériale, doutant de voir son règne se prolonger, essaierait-elle de passer en turbo ? Sinon, pourquoi ne pas vous en remettre à la sagesse du Sénat, monsieur le ministre ? Vous qui connaissez si bien la Haute assemblée, comment commettre une telle infidélité à cette sagesse qui plonge ses racines dans notre terroir ?

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