Mes chers collègues, alors que l'année 2010 ouvre un cycle commémoratif exceptionnel, avec principalement le 70e anniversaire de l'Appel du 18 juin, le Président Bernard Accoyer et notre collègue Michel Destot ont déposé une proposition de loi modifiant la loi du 26 mai 1999 relative au Conseil national des communes « Compagnon de la Libération ».
Deuxième ordre national après la Légion d'Honneur, l'Ordre de la Libération a été créé le 16 novembre 1940 sur décision du général de Gaulle ; la Croix de la Libération n'est plus décernée depuis 1946. Deux exceptions ont néanmoins été faites pour le Premier ministre britannique Winston Churchill et le roi du Royaume-Uni George VI.
La disparition progressive des Compagnons distingués (41 Compagnons vivants, âgés de 85 à 102 ans – le général René Lesecq est décédé dimanche dernier –, les cinq communes que sont Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors et l'île de Sein, ainsi que dix-huit unités combattantes) faisant peser un risque sur la pérennité de l'Ordre, la loi du 26 mai 1999 a prévu la création à venir d'un organisme qui succéderait au conseil de l'Ordre, le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération », établissement public national à caractère administratif, chargé de poursuivre l'action entreprise au service de la mémoire.
Adoptée à l'unanimité au terme d'un processus initié en 1996 par le Président Jacques Chirac, la loi de 1999 présente la particularité d'avoir été déposée deux fois à l'Assemblée nationale dans les mêmes termes : en avril 1997, par le Gouvernement d'Alain Juppé et en juin 1997, par celui de Lionel Jospin, ce qui témoigne d'un consensus politique exceptionnel.
Je suis heureux de constater que ce consensus est toujours d'actualité ; cela montre bien que la défense et la préservation de la mémoire combattante sont des préoccupations communes qui dépassent les clivages politiques.
La mise en oeuvre de la loi de 1999 pourrait se heurter à des difficultés que la présente proposition de loi se propose de résoudre.
Il s'agit tout d'abord de tirer les conséquences du décret du 16 mai 2008 qui a intégré à l'Ordre le musée de l'Ordre de la Libération.
Géré par une association depuis 1970, le musée est la vitrine de l'Ordre. Il assure la conservation, la présentation et la mise en valeur d'une collection unique : manuscrit de l'appel à tous les Français, vêtements personnels de Jean Moulin et autres pièces rares. Il dispose également d'une importante collection de photographies et d'archives, ainsi que d'une bibliothèque de plus de 4 000 livres.
À la suite d'un contrôle de la Cour des comptes, il est apparu que le musée ne disposait d'aucune existence juridique stable. Le décret du 16 mai 2008 a comblé ce vide en l'intégrant à l'Ordre de la Libération. L'Ordre peut désormais recruter du personnel et le mettre à disposition du musée sans enfreindre le droit existant. Le chancelier en fixe le règlement intérieur et les conditions d'accès et les recettes du musée sont intégralement reversées à l'Ordre.
La loi de 1999 ne traitait pas du musée puisqu'il ne relevait pas de l'Ordre à cette date. Il convient donc de tirer les conséquences du décret de 2008, ce que fait l'article premier de la proposition de loi qui précise que le futur Conseil national devra « gérer » le musée et non plus simplement « veiller » à son bon fonctionnement.
L'article 2 vise à permettre au futur Conseil national de recruter directement des agents contractuels. Cette faculté est aujourd'hui utilisée par l'Ordre, qui en a recruté six, mais elle n'était pas prévue par la loi de 1999 pour le futur Conseil national. La loi ne prévoyait en effet que la mise à disposition ou le détachement de fonctionnaires de l'État ou territoriaux.
Il est naturellement fondamental que le futur établissement public, qui reprendra l'ensemble des attributions actuellement exercées par la chancellerie, puisse continuer à employer des contractuels.
L'article 3 complète l'article 8 de la loi de 1999 en introduisant trois nouvelles sources de financement, en complément de la subvention versée par l'État (1,070 million d'euros en 2009) et des dons et legs. Il s'agit des recettes tirées du musée (1 % des recettes de la billetterie du musée de l'Armée, correspondant à 45 000 euros en 2009), de la location de salles ou d'espaces et du placement des fonds du futur Conseil national. Cette précision est indispensable pour que le futur Conseil national puisse diversifier ses offres et optimiser sa trésorerie. Il s'agit en outre de donner à l'établissement davantage de souplesse mais aussi davantage de liberté et de responsabilité sur le plan financier.
Enfin, l'article 4 de la proposition de loi supprime la référence au nombre de quinze Compagnons pour l'entrée en vigueur du futur Conseil national et précise que sa date de création est désormais fixée par la voie réglementaire et, au plus tard, le 16 novembre 2012, date du 72e anniversaire de la création de l'Ordre. Les Compagnons en vie à cette date intégreront naturellement le conseil d'administration du nouvel établissement. La solution retenue est un gage de souplesse qui répond pleinement aux besoins de l'Ordre, comme ont pu me le préciser le chancelier et le secrétaire général.
Sans remettre en cause les objectifs et solutions retenues par le législateur en 1999, la proposition de loi procède donc à quelques modifications pour que le futur Conseil national des communes « Compagnon de la Libération » puisse faire vivre et respecter les traditions dont l'Ordre est porteur depuis sa création.
Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter sans réserve cette proposition de loi.