Le problème du dopage se manifeste de manière aiguë dans le monde du cyclisme et s'avère particulièrement médiatisé. Sans doute ce sport en souffre-t-il de manière spécifique par rapport à d'autres disciplines, ce qui explique cet intérêt médiatique.
L'Homme a toujours cherché à améliorer sa force, sa vitesse et son intelligence, c'est-à-dire sa capacité à dominer l'autre, à asseoir ou à prendre un pouvoir.
Les questions se santé, de morale ou d'éthique sportive sont somme toute des considérations assez récentes, qui commencent à se manifester dans la seconde moitié du XIXème siècle. La première loi organisant la lutte contre le dopage date de 1965.
Les outils dont cette lutte dispose ont évolué, mais les techniques de dopage également. Cette course poursuite permanente nous oblige à nous poser la question de l'écart tolérable entre « chasseurs » et « chassés ».
De mon point de vue, la prévention n'est pas prioritaire, ce qui importe est la répression, car sans un arsenal de sanctions efficace la prévention n'aura aucun effet.
La publicité vante les produits permettant d'accroître les performances, secondée en cela par internet ; les discours de prévention, notamment à l'égard des jeunes, peuvent difficilement faire le poids.
Cela est d'autant plus vrai que la politique de lutte contre le dopage manque parfois de cohérence. Il faut faire preuve de logique et de bon sens pour être crédible auprès des sportifs, des dirigeants et du public. Je pense en particulier au cas de Richard Gasquet, qui parait tout de même difficile à comprendre. Comment expliquer que la cocaïne est interdite pendant la compétition, autorisée à titre festif, alors qu'il s'agit par ailleurs d'un produit dont le trafic est réprimé par la loi ? J'ai pour ma part du mal à croire que l'on peut expliquer des résultats positifs à la cocaïne par un simple baiser.
Lorsque j'avais été candidat à la présidence de la Fédération française de cyclisme, j'avais développé un certain nombre de propositions en matière de lutte contre le dopage : la répression doit concerner non seulement l'activité du sportif, mais elle doit reposer également sur des sanctions financières.
Pour les produits les plus lourds, il conviendrait d'aller jusqu'à la suspension à vie du sportif ; il devrait être privé de licence tous sports confondus, de sorte qu'un cycliste dopé ne puisse se reconvertir dans le biathlon, par exemple.
Pour les licenciés tirant un revenu de leurs activités sportives, l'amende devrait pouvoir atteindre le montant des gains bruts perçus au cours de l'année précédente par le sportif et être immédiatement exigible.
Pour les sportifs amateurs, une amende peut également constituer une sanction dissuasive.
Par ailleurs, le dopage ne se pratique plus de manière solitaire, mais repose sur toute une organisation et une série de complicités. Les responsables d'équipe ou les membres de l'environnement sportif, qui sont licenciés, devront répondre aux mêmes exigences que le sportif s'il est établi qu'ils ont une responsabilité dans un cas de dopage.
Tout contrôle positif devra déclencher une enquête destinée à mettre au jour d'éventuelles complicités.
Je pense également qu'il conviendrait d'imposer aux laboratoires pharmaceutiques l'identification des produits lourds par des marqueurs et l'obligation de déclarer des anomalies dans les ventes de ces produits. Ainsi l'alerte aurait-elle pu être donnée au début des années 1990 sur le décalage entre les usages thérapeutiques de l'erythropoïétine (EPO) et les quantités de produits qui sortaient des laboratoires.
La prévention ne pourra donc être efficace que si les sanctions sont dissuasives.
Il convient de veiller à la formation des éducateurs et les aider à repérer les moments où les sportifs sont les plus fragiles.
Pour conclure, la lutte contre le dopage devrait s'inspirer de la lutte contre la violence routière : les radars et les retraits de points ont permis de faire baisser le nombre de morts sur les routes, alors que les campagnes de sensibilisation ont été sans effet significatif.