Découvrez vos députés de la 14ème législature !

Intervention de Claude Goasguen

Réunion du 24 juillet 2007 à 15h00
Libertés et responsabilités des universités — Article 5

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude Goasguen :

Je vais vous expliquer pourquoi, mon cher collègue. Vu la façon dont est payé un président d'université dans le système actuel, la tentation est forte, pour un universitaire éminent, d'aller travailler en dehors de l'université, qu'il s'agisse de recherches, de soins, de plaidoiries, de conseils, d'ouvrages... Tous ceux qui font souvent la réputation du monde universitaire sont, jusqu'à preuve du contraire, rarement présidents d'université. La seule exception qui me vienne à l'esprit est René Rémond. Encore la période – mai 1968 – était-elle exceptionnelle puisque c'était une époque de création des universités. Quoi qu'il en soit, c'est un fait qui mérite que l'on y réfléchisse. Quelles sont les raisons à ce constat ?

Premièrement, l'administration universitaire est sous-équipée. Là encore, c'est un fait : les universités n'ont pas l'administration qu'elles méritent. Leurs personnels, souvent issus de l'enseignement secondaire, et non de l'enseignement supérieur, ne sont pas assez nombreux. Ils sont dispersés et, surtout, l'encadrement – les secrétaires généraux – n'ont souvent pas la formation nécessaire pour assumer la gestion de telles organisations. Les présidents d'université, comme les directeurs d'UFR, sont confrontés à des tâches matérielles qui ne sont pas de nature à attirer les universitaires.

Deuxièmement, et j'attire votre attention sur ce point, madame la ministre, si l'on veut que les prochains présidents d'université se consacrent à plein-temps à un métier astreignant, il faut qu'ils occupent, au moins dans la fonction publique, une position très supérieure à celle qui est la leur actuellement. Il n'est pas possible de continuer à rémunérer comme on le fait les heures de présidence d'université. Il s'agit tout de même d'universitaires qui sont occupés à enseigner, à publier, à faire de la recherche. À leurs yeux, un tel poste est plus un handicap qu'un avantage. Je sais bien que l'homme ne se satisfait pas seulement de jouissances matérielles, mais le bénéfice d'avantages de fonction n'est pas incompatible avec le service public. Je souhaite donc que la fonction de président d'université soit revalorisée.

Troisièmement, il faut en outre que le titulaire ait la possibilité de l'exercer. Or ce n'est pas le cas aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle nous discuterons tout à l'heure du rôle des personnalités extérieures, à l'égard desquelles je suis très réservé. Je ne vois pas, en l'état actuel de sous-administration des universités – lequel risque de durer encore quelques années –, comment une personnalité extérieure pourrait prendre à bras-le-corps le système universitaire tel qu'il est !

En conférant au président davantage de pouvoirs, nous avons fait un choix très fort. On nous reproche d'avoir supprimé les trois conseils. Mais non ! Même si je suis en grande partie d'accord avec ce qui a été dit sur le conseil scientifique. En réalité, le système de désignation plurielle du président reste une des composantes essentielles du dispositif. Parmi les électeurs, figurent des personnels techniques, des étudiants, des maîtres de conférences et des professeurs.

Il faut veiller, madame la ministre, à faire preuve de pédagogie pour faire comprendre que le président d'université doit être de moins en moins un gestionnaire, et de plus en plus un homme tourné vers l'extérieur, préoccupé de connaissance scientifique, de compétitivité internationale, de vie économique. Notre choix est spécifiquement français. Ailleurs, la plupart des présidents d'université sont élus par les universitaires, ce qui n'empêche pas de laisser un rôle important au conseil de gestion. Mais, en ce qui nous concerne, nous avons fait un choix courageux – issu de mai 1968 – et nous devons nous y tenir.

Cela étant, il faut que le président puisse exercer le même rôle que ses homologues étrangers. Nous allons, en examinant les amendements, discuter du profil, des pouvoirs du président d'université, mais il faut garder en tête que le projet de loi doit éviter de renouveler les erreurs précédentes. Les présidents d'université doivent être des personnages essentiels de la vie locale, régionale, voire nationale, comme aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Allemagne. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Il faut leur donner les moyens d'y parvenir. Tel sera l'objet des amendements que j'ai déposés à l'article 5.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion