Par ailleurs, compte tenu du facteur démographique, nous ne pensons pas que la Caisse nationale d'assurance vieillesse souhaiterait le basculement de la MSA dans le régime général. De plus, le fait pour les agriculteurs d'être noyés dans la masse du régime général n'aurait pas permis de traiter la question des petites retraites des exploitants : tous les gouvernements s'y sont attelés depuis vingt ans et des progrès ont déjà été réalisés, même s'ils sont encore insuffisants. Cette question présente, en effet, des spécificités, et la MSA a pu utiliser à bon escient les enveloppes financières que le législateur a dégagées à cette fin.
Il convient également de rester à l'écoute des adhérents et des organisations agricoles : le fait que les exploitants agricoles n'aient de lien qu'avec un seul organisme de protection sociale nous a permis, sur les plans financier et social, de les accompagner personnellement dans les crises. Par notre proximité, notre savoir-faire et notre performance, nous sommes déjà prêts pour le jour où le législateur désirerait faire appel à des opérateurs sociaux. Ce qui importe, plus que les questions financières, c'est notre capacité à répondre aux préoccupations de nos adhérents.
Le minimum vieillesse est évoqué chaque fois qu'est soulevée la question de la revalorisation des petites retraites, notamment par certaines administrations qui ne comprennent pas pourquoi les agriculteurs ne demandent pas à bénéficier de ce dispositif en cas de retraite insuffisante. Elles m'ont même reproché, au sein de la mission Barnier sur la revalorisation des retraites, de ne pas inciter les exploitants à le demander. C'est oublier que les exploitants agricoles, loin de vouloir du minimum vieillesse, souhaitent recevoir une retraite qui soit le fruit de leur carrière : ayant exercé une profession durant quarante ans, ils estiment avoir droit à une retraite décente, c'est-à-dire qui soit au moins équivalente au minimum vieillesse, sans être le minimum vieillesse. Ils veulent bénéficier non pas d'une prestation d'action sociale, mais d'un droit correspondant à leur travail et à leur contribution. Les choix faits par le pays dans les années d'après-guerre doivent se traduire par la solidarité nationale en matière de revalorisation des petites retraites, revalorisation qui, du reste, ne concerne pas le seul secteur agricole. C'est pourquoi, afin d'écarter la question du minimum vieillesse, il conviendrait d'instaurer, même en cas de carrière incomplète, une retraite minimale au moins supérieure au seuil de pauvreté.
En ce qui concerne les retraites des épouses d'exploitants agricoles, il convient de rappeler que le statut de conjoint participant aux travaux, aujourd'hui disparu, existait avant celui de conjoint collaborateur et qu'il avait déjà permis d'améliorer la retraite des exploitants. C'était une avancée pour les agriculteurs – ce régime n'a été instauré qu'ensuite pour le régime des indépendants. Il existe également aujourd'hui la possibilité pour les deux membres du couple de devenir chefs d'exploitation, s'ils en sont d'accord tous les deux et que l'exploitation dégage un revenu minimal pour chacun. La profession encourage les nouvelles générations à faire ce choix plutôt que celui de conjoint collaborateur, ce qui implique de développer l'activité, grâce à une plus grande diversification et à une meilleure commercialisation, en vue de dégager des revenus suffisants.
Recourir à la taxation sur la valeur ajoutée est une mesure qui a déjà été évoquée pour le financement de la protection sociale dans son ensemble. Il conviendrait de l'aménager pour l'agriculture car, autrement, elle ne serait pas équitable : en effet, si la valeur ajoutée est importante dans le secteur agricole, c'est que les retours sur capitaux sont très lents.
Il existe plusieurs outils permettant de lisser les cotisations. On peut calculer celles-ci sur une moyenne triennale ou encore instaurer, pour les exploitants qui les paient annuellement, un système de provisions comptables pour les années à hauts revenus. J'avais évoqué cette mesure lorsque le Président de la République est venu au Salon de l'agriculture : elle ne provoquerait aucune perte de cotisation. Il conviendrait que l'exploitant puisse, selon les années, recourir à différents outils, ce qui suppose l'accord de l'administration – laquelle, on le sait, n'aime pas être dérangée dans ses habitudes. Cette mesure, en termes de rentrées d'argent, n'engendrerait de modification que pour la branche vieillesse, et non pour la branche maladie puisque nous sommes intégrés au régime général.
Je tiens également à préciser que les exploitants ne peuvent s'exonérer d'aucune cotisation : ils utilisent en parfaite légalité les outils de gestion qu'on leur a donnés. Ils font des choix économiques en fonction des possibilités de déduction qui leur sont offertes, que ce soit pour investissement ou pour aléas économiques. Dans ce dernier cas, la somme investie peut être réinjectée. Il est également possible de créer des sociétés : les exploitants peuvent alors devenir salariés de leur entreprise. Si on réformait le système de financement de la protection sociale, de telles gymnastiques auraient moins d'utilité parce que le retour sur retraite serait assuré.
Nous n'attendons ni redressement significatif ni aggravation de la pyramide des âges.
En ce qui concerne la pénibilité, ma solution est, je le reconnais, un peu à l'emporte-pièce. Toutefois, il convient de donner des signes immédiats.