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Intervention de Valérie Fourneyron

Réunion du 17 juin 2009 à 21h30
Développement et modernisation des services touristiques — Article 13 ter

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Fourneyron :

Monsieur le secrétaire d'État chargé des sports, le groupe socialiste soutient bien évidemment la candidature de la France à l'organisation de l'Euro 2016. Notre pays a en effet un savoir-faire reconnu en matière d'organisation d'événements d'envergure internationale. Il convient donc de promouvoir sa candidature.

C'est dans ce but affiché que vous proposez un article additionnel sur la construction et la rénovation des grandes enceintes sportives, qui, pardonnez-moi de le souligner à mon tour, n'est rien d'autre qu'un cavalier, qui enfourche un autre cavalier venu du Sénat. C'est à se demander si la politique sportive du Gouvernement ne se résume pas à un concours hippique de cavaliers !

La grande loi sur le sport professionnel si bruyamment annoncée a-t-elle vocation à être démantelée en de multiples amendements ou articles additionnels qui viendront s'attacher à des véhicules législatifs divers et variés, sans aucune vision d'ensemble ? La procédure est bien révélatrice des errements qui caractérisent depuis des années la politique publique du sport, à l'image de l'évolution du périmètre de ce ministère. Le ministère des sports est devenu successivement le ministère de la jeunesse et des sports, de la vie associative, de l'innovation sociale et de l'économie solidaire, puis le ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative sans l'économie solidaire, puis le ministère de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative, avec un secrétariat d'État, et enfin le secrétariat au sport sans la jeunesse et la vie associative, elles-mêmes rattachées à un haut commissariat. Qu'en sera-t-il demain après le prochain remaniement ? Parce que nous sommes tous attachés au rôle culturel, économique et social que joue le sport – qu'il soit professionnel, de haut niveau, amateur ou de loisir –, je regrette profondément l'abandon de ce secteur par le Gouvernement.

L'article 13 ter pose par ailleurs toute une série de questions. Les amendements que nous avons déposés nous permettront de les aborder en détail.

Le premier alinéa vise à faciliter les procédures administratives relatives au droit de l'urbanisme, donc indirectement à l'expropriation, et, de façon générale, à sécuriser l'intervention d'une entité publique sur un terrain privé. J'ai à ce sujet deux interrogations : s'agit-il bien d'une déclaration d'intérêt général ou simplement de la reconnaissance du caractère d'intérêt général d'un équipement, comme vous l'avez indiqué en commission ? Par ailleurs, quel est le périmètre concerné par la déclaration d'intérêt général ? Englobe-t-il également les infrastructures de transport et de desserte ?

Nous considérons que le véritable intérêt général, au sens de la loi de 1984 sur le sport, porte plutôt sur les équipements sportifs de moindre envergure, mais ô combien plus fondamentaux : équipements sportifs de proximité, stades, gymnases, piscines, sites et itinéraires de pleine nature. Autant d'équipements qui relèvent de la pratique du sport dans sa grande diversité, et qui ont été délaissés par le Gouvernement. Celui-ci ne s'intéresse visiblement qu'aux médailles et au sport professionnel qui ne se porte pourtant pas si mal.

En commission, vous avez évoqué des stades d'une capacité de 30 000 à 40 000 places. Est-ce réellement cette limite qui servira de critère ? Si tel était le cas, certaines disciplines sportives et certains équipements seraient exclus d'office, ce qui n'est pas souhaitable. Voilà pourquoi nous vous proposerons d'élargir cette disposition à tous les équipements sportifs, sans distinction de discipline ou de capacité.

Tel que nous l'analysons, l'article 13 ter profite uniquement aux entreprises de spectacle sportif mues par leur course aux opérations lucratives. J'en profite pour vous dire notre inquiétude sur des dérives qui se dessinent derrière cet article additionnel : le passage de la SAOS à la SA ; la propriété, pour les clubs, de leur numéro d'affiliation et, demain, de leur stade ; la négociation individuelle des droits de télévision ; la remise en cause de l'équilibre solidaire entre sport amateur et sport professionnel.

Cet article ouvre aussi aux collectivités territoriales la possibilité de financer des infrastructures de fonctionnement et de desserte des enceintes sportives. Si la décision relève de la libre administration des collectivités, la déclaration d'intérêt général accroît de fait la pression qui pèse sur elles, alors que les sommes en jeu sont considérables pour le contribuable. C'est pourquoi nous vous proposerons d'accepter un amendement visant à en mesurer l'impact budgétaire.

Permettez-moi par ailleurs d'être amusée, ou plutôt affligée, quand je vous entends évoquer dans la presse un fonds de 100 millions d'euros, somme bien inférieure aux enjeux du financement de ces grands complexes sportifs. L'État ne joue pas le rôle qu'il devrait jouer, si l'objectif ultime est réellement le rayonnement international de la France.

Avec mes collègues du groupe SRC, j'ai déposé sur le deuxième alinéa de l'article un amendement visant à associer l'État au financement des infrastructures de desserte et de fonctionnement. Nous tenions à souligner le paradoxe qui consiste pour lui à se réserver la prérogative d'établir la liste des happy few, alors qu'il se garde bien de partager l'effort national en direction de ces enceintes. Notre amendement est tombé sous le coup l'article 40 : il est en effet plus simple pour le Gouvernement de créer une charge publique pour les collectivités que pour lui-même.

Je terminerai en regrettant que l'examen de cet article soit déconnecté du débat de fond, que nous attendons depuis des mois, sur la place du sport professionnel dans notre pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

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