Je distingue trois points dans votre intervention : premièrement, le constat que l'inflation financière a suivi la départementalisation ; deuxièmement, la gouvernance des SDIS ; troisièmement, les normes.
Sur le premier point, une étude récente menée auprès de douze pays européens qui fonctionnent comme nous sur la base de pompiers à la fois professionnels et volontaires a montré que, si nous sommes les premiers pour la superficie couverte et les deuxièmes pour la population – ces deux critères définissant nos besoins –, nous sommes en revanche au dixième ou au onzième rang pour ce qui est du nombre total de sapeurs-pompiers. Sans nier l'importance des crédits que nous consacrons aux SDIS, nous nous situons aujourd'hui plutôt au bas de l'échelle des coûts, alors que nos besoins sont importants.
Par ailleurs, il est vrai que, juste après la départementalisation, une très forte poussée des dépenses a été observée, qui était due aux besoins de renouvellement des matériels. Mais le rythme de progression se rapproche désormais de l'inflation, et devient plus raisonnable. Ainsi, l'année dernière, les dépenses de personnel ont augmenté de 3,65 % pour une inflation estimée à 2 % des charges des collectivités territoriales.
En somme, nous ne sommes pas les plus dépensiers et nous dépensons de moins en moins.
Ensuite, il faut affiner les critères de comparaison et aller au-delà du nombre d'interventions pour s'attacher aussi à leur qualité puisqu'elles sont de durée différente. Les incendies occupent 25 % du temps global d'intervention alors qu'ils ne représentent que 8 % du nombre des interventions. Les schémas départementaux d'analyse et de couverture des risques (SDACR) détaillent ce que l'on attend des sapeurs-pompiers : les délais d'intervention, le maillage territorial et d'autres paramètres entrent en ligne de compte pour évaluer le coût du service. Tout cela pour dire qu'il faut modérer les critiques.
La gouvernance, en revanche, est un vrai problème. Le schéma est des plus complexes alors que nous sommes à un moment de simplification. Celle-ci doit passer par la classification des compétences de chacun. Or certaines compétences ne sont exercées que par l'État, qui s'est vu conférer par la loi le devoir d'assurer le principe républicain de l'égalité des citoyens devant le service public, en vertu duquel tout citoyen, où qu'il soit sur le territoire national, et a fortiori s'il est en situation de détresse, est assuré de recevoir le même service. À ce titre, l'État est garant de la cohérence de la sécurité civile sur le plan national et chargé de certaines missions opérationnelles. Cela passe concrètement par les techniques d'intervention, pour que la qualité des interventions soit la même où qu'elles aient lieu ; par la formation des personnels, ce qui implique un recrutement par concours ; et par les équipements qui doivent répondre aux mêmes normes. Y mettre fin porterait atteinte au principe d'égalité devant le service public.
Quant au président du SDIS, la décentralisation lui a donné la capacité de donner des ordres, mais les événements impliquent aussi parfois l'Intervention d'autres services qui lui échappent, en particulier la gendarmerie ou la police nationale, puisque la sécurisation des zones relève du préfet. Il est indispensable, tout en ménageant une certaine souplesse, de dire qui fait quoi, plutôt que de décider une simplification qui ne répondrait pas aux besoins.
Assurément, les normes sont coûteuses. Et, en tant qu'élue locale, j'ai été l'une des premières à le dire. C'est pourquoi, en arrivant au ministère de l'Intérieur, j'ai mis en place une commission consultative de l'évaluation des normes (CCEN) auprès du comité des finances locales pour que des élus évaluent ce qui se fait et donnent préalablement leur avis sur ce qui se fera. Cette commission contribue à une meilleure maîtrise des dépenses car on ne peut pas accepter de payer les yeux fermés.
Vous m'avez également interrogée sur les interventions des organisations des sapeurs-pompiers. Je ne pense pas qu'il faille le regretter, surtout s'agissant de la fixation des normes. Je suis d'accord, les structures sont nombreuses à intervenir, mais la simplification passe avant tout par la clarification des rôles. Le service public faisant appel à des fonctionnaires, le statut auquel les pompiers qui en dépendent sont attachés s'applique. La direction de la Sécurité civile intervient également en vertu des textes applicables aux sapeurs-pompiers, ce qui est normal. Les syndicats sont consultés, puis la commission consultative de l'évaluation des normes. Il est légitime que nous nous souciions d'impliquer tous ceux qui ont leur mot à dire.