Cet amendement propose des modifications assez substantielles à l'un des « points durs » du projet de loi. Son examen ne doit pas être dissocié de celui de mon amendement CAE 6 rectifié ni même du sous-amendement CAE 53 de nos collègues socialistes.
On l'a vu lors de l'audition du ministre, ce très important projet de loi traite de trois politiques publiques. La première est l'action culturelle extérieure de l'État, qui « s'incarne » dans une nouvelle catégorie d'établissements publics, les établissements publics contribuant à l'action extérieure de l'État. La deuxième est l'expertise et la coopération internationales ; cette politique assez peu connue, située en quelque sorte dans un des « angles morts » de nos politiques publiques extérieures, a été récemment mise en avant par un rapport de M. Nicolas Tenzer. La troisième est l'attraction, l'hébergement et le suivi des étudiants étrangers en France.
L'Agence française pour l'expertise et la mobilité internationales (CAFEMI), créée par le projet de loi, mêle deux de ces politiques publiques, l'expertise et l'attraction des étudiants étrangers. Seront en effet intégrés dans ce nouvel établissement public industriel et commercial deux groupements d'intérêt public (GIP), France Coopération Internationale, qui s'occupe d'expertise, et Campus France, qui a pour tâche l'attraction et la gestion des étudiants étrangers.
Pour moi, il n'est pas de bonne politique de regrouper dans le même établissement public deux politiques aussi différentes, même si elles se recoupent parfois.
Je vous propose donc d'exclure du nouvel établissement public la coopération internationale, et de substituer à l'appellation « Agence française pour l'expertise et la mobilité internationales », un peu complexe, l'appellation très simple de « Campus France » Ainsi sera-t-il aussi pris acte de la réussite de cette marque depuis sa création il y a trois ans.
La seule mission de la nouvelle agence sera la prospection, l'accueil et le suivi des étudiants étrangers en France. Cette politique publique est en effet d'une importance cruciale. La France est très en retard par rapport non seulement aux États-Unis ou à la Grande-Bretagne, mais aussi à l'Allemagne – malgré les limites du rayonnement international de la langue de cet État – ou encore à l'Australie, qui a fait de l'attractivité de ses universités un véritable élément d'une politique d'influence.
Certes des progrès ont été réalisés. Avant 2007, certaines ambassades avaient, avec une certaine réussite, pris l'initiative de créer des CEF (centres pour les études en France). Le GIP Campus France a été créé début 2007. En sont parties prenantes le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche et, enfin, le ministère de l'intérieur – maintenant celui de l'immigration – au titre de la facilitation de la délivrance des visas, cruciale pour attirer les étudiants étrangers en France.
L'objectif de mes amendements est constructif. Pour qu'un dispositif fonctionne, il faut qu'il soit clair. Pour moi, clarifier, c'est développer un effort en faveur des étudiants étrangers. Cette action implique aussi – c'est l'objet de l'article 5 ter, introduit par amendement du Sénat – que la sous-direction des affaires internationales du Centre national des oeuvres universitaires et scolaires (CNOUS) entre progressivement dans le dispositif : il serait pour le moins curieux que n'y figurent que Campus France et l'association Égide, qui dépend du Quai d'Orsay, mais non le CNOUS qui a pour vocation d'héberger les étudiants, certes d'abord français mais aussi étrangers, comme le prouve l'existence de sa sous-direction des affaires internationales. Par ailleurs, la création d'un tel outil est impossible sans, au minimum, la création d'une tutelle commune avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. Un outil dont le monde universitaire se sentira écarté sera bien moins efficace qu'un outil ainsi configuré, associant les universités – mais également les collectivités territoriales, qui financent des bourses et accomplissent un travail considérable pour l'hébergement des étudiants étrangers.
Cela dit, nous devons aussi donner une forte impulsion à l'expertise. Ma proposition de ne pas inclure France Coopération Internationale dans le nouvel établissement public n'est pas un signe de dédain envers celle-ci. Simplement, un parlementaire n'a pas le droit de proposer la création d'un nouvel établissement public. Si le Gouvernement déposait un amendement transformant France Coopération Internationale en établissement public industriel et commercial, j'en recommanderais l'adoption à nos collègues.
Pardon de ces explications un peu longues, mais cet amendement n'est pas de pure forme.