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Intervention de Dominique Gombert

Réunion du 11 mai 2010 à 17h00
Commission des affaires sociales

Dominique Gombert, chef du département expertise en santé, environnement et travail, à l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail, AFSSET :

Parmi les très nombreux sujets sur lesquels nous travaillons, il y en a relativement peu qui mettent en jeu le principe de précaution. Dans la plupart des cas, nous disposons de données suffisamment étayées pour évaluer correctement les risques. Mais, c'est vrai, il est des questions dont nous savons d'emblée qu'elles ne peuvent être résolues en l'état de la littérature scientifique, française et étrangère. Ainsi en est-il pour la téléphonie mobile et pour les nanomatériaux. Cependant, les deux cas sont assez différents et vous noterez en particulier que, dans notre avis sur le premier sujet, nous n'avons pas invoqué le principe de précaution, alors que nous l'avons fait sur le second.

Pour la téléphonie mobile, se pose tout d'abord la question de l'indépendance des experts. Quel est celui d'entre eux qui n'a pas de liens, directs ou indirects, avec des opérateurs ? Quel est le chercheur dont le laboratoire n'a jamais reçu de financement de ces mêmes opérateurs ? Nous pouvons certes faire appel à des universitaires en nombre suffisant, mais même un expert indépendant peut être prisonnier de ses conceptions philosophiques ou de ses préventions contre telle ou telle technologie. C'est pourquoi nous considérons que l'expertise est crédible avant tout dans la mesure où elle est collective, et nous nous appuyons donc sur le consensus des meilleurs chercheurs français et étrangers, qui nous aident à cerner l'état de la science. Cela suppose notamment de faire le tri dans les publications. En effet, même un article paru dans une revue internationale de premier rang, après évaluation par les pairs, n'est pas ipso facto digne de foi et appelle par conséquent un examen critique.

Sur ce fondement, notre conclusion est qu'il n'existe pas actuellement d'étude démontrant un effet des antennes sur la santé, au niveau d'exposition communément enregistré, et que les problèmes viennent plutôt du téléphone lui-même, de son utilisation excessive. Mais, ce n'est pas ce que le public a retenu : personne ne veut des antennes, mais tout le monde veut téléphoner, à tel point qu'on dénombre 1,6 appareil par habitant ! Dans ce cas donc, nos données ne viennent pas à l'appui de la conception commune.

Le cas des nanotechnologies est assez différent. Comme vous, j'ai participé à des réunions, à Lyon, à Rennes ou ailleurs, où l'on ne pouvait pas s'exprimer plus d'un instant et où tout le monde finissait par devoir être évacué par les CRS. Nous avons, ainsi que je l'ai dit, invoqué en la matière le principe de précaution dans la mesure où, si beaucoup de travaux sont conduits sur les utilisations technologiques potentielles, il est loin d'en être de même s'agissant des impacts sanitaires éventuels. C'est cette situation qu'a reconnue l'AFSSA, en posant la question des utilisations à privilégier. Les applications en pharmacie sont bien évidemment essentielles, mais que dire de l'introduction de nanoparticules d'argent dans des chaussettes dites « antibactériennes » ? Au bout de dix lavages, il n'en reste plus rien, tout est parti dans l'environnement ! Nous invitons par conséquent à réfléchir aux usages sur lesquels il convient de mettre l'accent.

Nous faisons donc une utilisation assez rare du principe de précaution, et, à chaque fois, c'est en fonction d'enjeux qui dépassent largement les enjeux sanitaires.

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