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Intervention de Stéphane Demilly

Réunion du 18 mai 2010 à 9h30
Questions orales sans débat — Crise agricole

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Demilly :

Monsieur le ministre de la jeunesse et des solidarités actives, ma question s'adresse également à M. le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

Le 27 avril dernier, plus de 1 500 tracteurs et 10 000 agriculteurs se sont donné rendez-vous dans les rues de Paris. L'accueil que leur a réservé la population est un signe fort de l'attachement des Français à leur agriculture et à leurs paysans. Cependant, nous en avons tous conscience, si l'ambiance était ce jour-là au dialogue avec les Parisiens, cette manifestation avait bien pour objet de dénoncer la crise gravissime dans laquelle se trouvent les agriculteurs français. Le ministre de l'agriculture a lui-même déclaré le 31 août dernier lors de la foire de Châlons-en-Champagne : « C'est la crise la plus grave qu'ait connue le secteur agricole depuis trente ans. »

De fait, la crise que traversent nos agriculteurs n'est pas seulement une crise économique qui impacte dramatiquement leurs revenus. C'est, plus profondément, une crise morale qui les amène à douter du sens même de leur profession.

Pour endiguer l'hémorragie, l'État doit naturellement agir dans l'urgence sur les besoins conjoncturels, mais il est également indispensable qu'il mène un travail de profondeur pour structurer et moderniser notre agriculture.

Évoquons en premier lieu les besoins conjoncturels.

Les agriculteurs, toutes productions confondues, doivent être accompagnés pour franchir ce cap difficile et retrouver un peu d'oxygène. Cela passe bien sûr par des mesures d'accompagnement pour les agriculteurs en situation fragile, et ce toutes productions confondues, des mesures telles que des reports d'annuités d'emprunt avec prise en charge des intérêts, des prises en charge ou reports de charges sociales ou encore des allégements de charges.

Toutefois d'autres mesures doivent être activées, comme le dégrèvement de la TIPP. N'oublions pas, pour ne citer que ce chiffre, qu'un hectare de betteraves « stocke » 40 tonnes de C02 !

Enfin, il faut impérativement obtenir un report des dates d'obligation de mises aux normes des éleveurs qui sont entrés dans cette démarche volontairement, mais qui ne peuvent aboutir dans les temps impartis faute de financement.

Il y a en second lieu des besoins structurels.

La crise que traversent toutes les filières agricoles montre l'impasse dans laquelle conduit une politique de dérégulation à outrance au niveau européen et mondial. Il faut donc retrouver un cap politique de régulation. Cela passe par la régulation des marchés au niveau intracommunautaire, avec la réhabilitation des politiques publiques de gestion des marchés par des systèmes de quotas, d'intervention et de stockage. Cela passe également par la régulation des marchés au niveau extracommunautaire, notamment à l'OMC, dont les discussions reprennent cet automne.

Par ailleurs, l'agriculture française doit retrouver de la compétitivité en faisant la chasse aux distorsions de concurrence, qui sont dues notamment à une pression réglementaire sans cesse accrue et à un coût du travail bien plus élevé que chez nos principaux concurrents européens.

Enfin, bien sûr, l'État doit se doter de moyens modernes d'accompagnement individuel de l'agriculture, avec des mécanismes fiscaux adaptés d'épargne de précaution, la mise en place de systèmes assurantiels multirisques, l'utilisation d'une part de l'emprunt national pour le développement de l'agriculture, pilier économique de notre pays.

Ma question est simple : alors que le Sénat s'apprête à entamer aujourd'hui l'examen du projet de loi de modernisation agricole, pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, comment le Gouvernement compte répondre de façon urgente à ces besoins tant conjoncturels que structurels de notre agriculture ?

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