La proposition de loi de notre collègue Bruno Le Roux qui vise à renforcer l'exigence de parité des candidatures aux élections législatives est le constat d'un échec. La réforme, introduite par la loi du 8 juillet 1999, qui a inscrit à l'article 3 de notre Constitution le principe « d'égal accès » des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives avait fait l'objet d'un vaste débat. Était-il acceptable de devoir légiférer pour affirmer l'égale capacité des hommes et des femmes à assumer des responsabilités politiques ? Un certain nombre de féministes, comme Elisabeth Badinter, avait pris position contre le principe de parité qui conduirait à douter de la compétence même des femmes. Pour beaucoup, l'inscription du principe de parité dans la Constitution était déjà en soi une humiliation, un échec, mais un échec nécessaire.
Une décennie après la loi du 6 juin 2000 qui organise concrètement la mise en oeuvre du principe de parité, le constat n'est pas réjouissant. La représentation des femmes à l'Assemblée nationale a certes progressé pour atteindre 18,9 %, mais nous demeurons au 16ème rang sur les 27 chambres basses européennes, loin de la moyenne qui est de 24 % de femmes et très loin de l'Allemagne ou de l'Espagne qui font proportionnellement deux fois mieux sans avoir modifié leur Constitution.
Plus préoccupant encore, on connaît aujourd'hui le prix que les partis politiques sont disposés à accepter pour ne pas avoir à se conformer à ce principe. Une pénalité de 5,3 millions d'euros pèse quasi-exclusivement sur les cinq grands partis : UMP (pour les trois-quarts de ce total), PS, MoDem, PCF et PRG. La loi de 2000 en instituant les retenues financières pour les manquements au principe de parité des candidatures a divisé l'échiquier politique en deux : les partis qui ont peu de perspective de faire élire des députés et qui sont donc extrêmement vertueux en la matière, comme c'est le cas du Front national, des Verts, de la LCR ou du MPF, et ceux qui disposent d'un groupe parlementaire et qui sont encore très loin de la parité des candidatures. Ce constat est extrêmement choquant, d'une part parce qu'il accrédite l'idée que moins on présente de femmes et plus on a de chance de gagner une élection, et d'autre part parce que la deuxième fraction du financement public des partis compense, voire récompense, l'absence de parité.
C'est pourquoi je vous invite à soutenir la suppression de l'ensemble de la dotation pour tout parti ne respectant pas l'objectif d'un différentiel maximum de 2 % entre ses candidats de chaque sexe. C'est d'abord un principe d'égalité entre les partis qui doivent encourir les mêmes conséquences, indépendamment de leur taille, de leur implantation, de leur nombre de voix ou d'élus. C'est ensuite un dispositif clair et lisible qui affirme que le financement public des partis n'est pas une obligation mais la contrepartie du respect d'un certain nombre de principes dont celui de parité. C'est enfin une mesure simple à étendre à l'ensemble des élections.
À ce titre, je recommande que la réforme territoriale soit l'occasion d'adopter un amendement similaire pour garantir la parité des candidatures dans les collectivités territoriales.