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Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 18 septembre 2007 à 15h00
Maîtrise de l'immigration intégration et asile — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVictorin Lurel :

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, c'est la sixième fois depuis que j'ai l'honneur d'être député, c'est-à-dire depuis 2002, que nous avons à débattre d'un projet de loi relatif à l'immigration, notamment clandestine. C'est donc également la sixième fois que je monte à cette tribune pour alerter le Gouvernement sur les risques encourus pour la cohésion sociale des outre-mers, laquelle est confrontée à une immigration massive en provenance de pays comptant parmi les plus pauvres de la planète, Malheureusement, c'est également la sixième fois que je constate que la volonté politique nécessaire pour faire face à l'immigration clandestine outre-mer est absente.

Vous illustrez à merveille – hélas ! – ce mot du grand Karl Marx, pour qui « l'Histoire se répète : d'abord en tragédie, ensuite en farce », mais c'est, pour le coup, une farce qui ne fait rire personne outre-mer.

Cet énième projet de loi – je l'affirme – sera aussi inefficace que les précédentes tentatives de cette majorité à lutter contre l'immigration clandestine outre-mer. Manifestement, le Gouvernement préfère, à l'approche d'échéances électorales, l'affichage et l'instrumentalisation du thème de l'immigration à une lutte efficace contre ce qui, chez nous outre-mer, menace vraiment la cohésion sociale de nos territoires. En effet, les mesures que vous nous proposez ne sont que cosmétiques ou consistent en de pures corrections matérielles quand elles ne sont pas tout simplement vexatoires : elles ne sont donc en rien à la hauteur des enjeux, lesquels ont pourtant pesé, chez nous, dans la séquence électorale qui s'est achevée au mois de juin dernier.

Nous, élus de l'outre-mer, avons été attentifs, par-delà la diversité de nos appartenances respectives, aux engagements pris par le chef de l'État pour mener dans nos territoires une politique spécifique adaptée à nos réalités insulaires et à nos voisinages particuliers. Au moment d'examiner votre texte à l'aune de nos attentes, je ne puis taire ses failles, voire ses manques béants.

Car sans volonté et sans moyens adaptés, il n'est pas de lutte efficace contre l'immigration clandestine dans les outre-mers, lesquels – dois-je vous le rappeler ? – comptent pour plus de la moitié des reconduites à la frontière effectuées dans notre pays.

En raison non seulement des conditions économiques et sociales mais également des nombreuses catastrophes naturelles dévastatrices qui sévissent chez nos voisins, la pression migratoire atteint des niveaux sans précédent. Ainsi, les services de la police aux frontières évaluent pour la seule Guadeloupe le flux mensuel d'immigration illégale entre 500 et 800 personnes.

L'exploitation de certains faits divers impliquant des immigrés clandestins, le drame humain vécu par nombre d'entre eux lors de leur tentative d'entrée sur le territoire ainsi que l'exploitation dont certains sont victimes exigent une réaction politique forte et une action déterminée de la part de l'État.

C'est la raison pour laquelle l'ensemble de la classe politique locale en Guadeloupe a, dès le mois d'avril 2005, élaboré sous l'impulsion du Conseil régional un véritable plan d'action visant à améliorer l'intégration des populations immigrées et à lutter efficacement contre l'immigration clandestine en Guadeloupe. Le Congrès des élus régionaux et départementaux a alors présenté un plan global, adopté à l'unanimité, prévoyant des moyens de maîtrise des flux migratoires : ce plan incluait des actions permettant de mieux intégrer l'immigration légale tout en oeuvrant en faveur d'une nécessaire politique de codéveloppement avec nos voisins.

Il était essentiel que les élus locaux, dont ce n'est pas nécessairement la compétence stricte, se saisissent de ce sujet afin de tenter de combler les carences du Gouvernement et d'obtenir les modifications législatives nécessaires à une lutte efficace contre l'immigration clandestine.

Plus de deux ans après, une seule de nos recommandations – le caractère non suspensif des recours contre les arrêtés de reconduite à la frontière – a été traduite dans la loi du 24 juillet 2006. Force est donc de constater que les autres recommandations du Congrès des élus, lesquelles formaient un véritable plan d'ensemble, n'ont toujours pas été satisfaites. Or c'est bien d'un plan global dont nous avons besoin, un plan dont nous désespérons de voir jamais les axes mis en oeuvre avec le volontarisme politique nécessaire.

Ce que nous souhaitons en effet, c'est qu'une politique plus active soit menée dans le domaine de la gestion des flux migratoires. Pour y parvenir, il conviendrait, tout d'abord, de conforter les moyens de contrôle qui, à ce jour, sont notoirement insuffisants, ensuite d'attribuer des moyens matériels et techniques supplémentaires en vue de combattre avec une efficacité accrue les réseaux d'exploitations qui prospèrent.

Or je me désespère de devoir répéter que les enquêteurs de la police aux frontières sont à peine une trentaine en Guadeloupe alors qu'il en faudrait le double et qu'au moins vingt officiers de police judiciaire seraient nécessaires pour permettre un travail efficace. De même, il me faut encore et toujours réclamer une nouvelle navette et un radar pour contrôler les côtes alors même que j'ai proposé, en tant que président de région, que celle-ci participe à leur financement. Ce ne sont donc pas seulement les moyens qui manquent, c'est également la volonté politique de les accorder aux forces de l'ordre.

Je ne prendrai qu'un exemple : le ministre de l'intérieur du précédent gouvernement, l'actuel Président de la République,…

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