..peut-être parce que celle-ci s'est fermée, à moins que ce ne soit du fait de la conjoncture, car tout est géopolitique, où d'un moindre nombre de conflits qu'en 2003, ce dont on ne peut que se féliciter. À tout moment néanmoins, une guerre civile peut se déclencher ou un pays imploser.
Je ferai à cet égard un rappel, que l'on a assez peu l'occasion de faire faute de débats parlementaires suffisants pour nous exprimer sur la question de l'asile. La France a tout de même un glorieux passé en la matière. Rappelons-nous l'année 1975 : trois pays, le Cambodge, le Laos, et le Vietnam, connaissaient l'exode, dans des conditions parfois épouvantables, de dizaines de milliers de personnes fuyant le changement de régime. Une structure d'accueil associative, dénommée Comité national d'entraide franco-vietnamien, franco-laotien, franco-cambodgien, fut alors créée en France. Cette initiative fut présidée par d'éminentes personnalités : Jean Sainteny, compagnon de la Libération, et, après son décès, Jean-Jacques Beucler puis Jean-Michel Belorgey – heureusement toujours vivant. Très rapidement, cette structure obtint le soutien du gouvernement. Le comité contribua ainsi à définir une politique générale d'accueil et d'insertion des réfugiés, et son antenne à Bangkok rechercha dans tous les camps du sud-est asiatique, en particulier thaïlandais, les réfugiés que la France devait accueillir en priorité.
Le ministre des affaires étrangères d'aujourd'hui, le docteur Kouchner à l'époque, avait même affrété, avec l'aide des pouvoirs publics français, un bateau, « L'île de Lumière », qui allait d'île en île et de camp en camp, tout en recueillant les personnes qui dérivaient sur la mer.
C'est ainsi que plus de 100 000 réfugiés ont obtenu le droit d'asile en France entre 1975 et 1980. Qui n'a vu ces images extrêmement émouvantes de ces Hmongs du Laos que nous avons accueillis en Guyane dans des conditions souvent sommaires et qui sont aujourd'hui parfaitement intégrés ? Tous, depuis la Guyane ou Paris, puisque nous en retrouvons dans le treizième ou le vingtième arrondissement, sont aujourd'hui des agents du développement social, économique, culturel et forment un pont entre la France et leur pays d'origine.
Si nous avions alors appliqué votre politique vis-à-vis des réfugiés de tous ces camps, ils seraient morts pour la plupart et les survivants seraient partis comme beaucoup aux États-Unis, dans d'autres conditions, et nous n'assisterions pas aujourd'hui au développement des échanges franco-asiatiques.
Je souhaite que l'on rende ici un hommage collectif à tous ceux qui, en 1975, à l'image des Sainteny, Beucler et Belorgey, se sont très vite rendu compte qu'il y allait à la fois de la tradition et de l'intérêt supérieur de la France que d'accueillir ces réfugiés d'Indochine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche.)
Cette tradition d'asile, vous l'avez fragilisée, laissant la France, ce que vous n'avez pas dit, être encore condamnée au mois d'avril 2007 par la Cour européenne des droits de l'homme. Ce sont d'ailleurs toujours les mêmes affaires qui lui sont déférées, et c'est avec un certain malaise, voire avec une certaine colère que nous voyons notre pays régulièrement condamné parce qu'il ne respecte pas les droits de l'homme en matière d'asile.
Vous avez décidé, monsieur le ministre, de légiférer a minima, et nous avons bien compris votre volonté de parvenir à une unification du droit. Cependant, nous demandons que le délai d'un recours contre un refus d'entrée passe de vingt-quatre à quarante-huit heures. Cette demande n'est d'ailleurs pas formulée par les seuls groupes socialiste ou GDR, mais également par des députés de la majorité qui trouvent le délai de vingt-quatre heures un peu court pour trouver un traducteur, surtout si cela tombe un samedi ou un dimanche, et pour monter un dossier de référé-liberté, procédure qui est extrêmement complexe. Même cette requête, vous l'avez refusée.
De la même façon, nous nous élevons, sans que cela ne vous vise personnellement, contre le rattachement du droit d'asile au ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement.
L'asile est, en effet, un droit, lié à la convention de Genève, monsieur Cochet, et non une politique. Vous avez dit que l'asile ne devait pas être la variable de l'immigration, mais il ne doit pas être non plus la variable des foucades ou des lubies de tel ou tel candidat à la Présidence de la République !