Contrairement à ce que vous affirmez, madame la députée, appliquer la loi de la République ne revient pas à organiser la chasse aux clandestins. Ce n'est pas du tout la même chose.
Espérant sans doute rallier à votre cause une cohorte de fonctionnaires et de magistrats chargés d'appliquer la loi, vous avez invoqué la lassitude des magistrats administratifs. Il est effectivement permis de s'interroger lorsqu'une décision prise par un préfet, confirmée par le juge administratif et mise en oeuvre par la police ou par la gendarmerie, se trouve, après des jours, voire des semaines d'efforts, annulée par un juge judiciaire. Je suis convaincu que la politique de l'immigration ne doit pas devenir le champ clos d'un affrontement entre deux ordres de juridiction. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé d'initier un débat constitutionnel sur la possibilité de confier à un seul juge l'ensemble du contentieux des mesures intéressant l'entrée, le séjour et l'éloignement des étrangers.
Par ailleurs, prenez garde à ne pas donner trop de leçons de droit : le projet de loi qui vous est soumis tient parfaitement compte des observations du Conseil d'État, et le Gouvernement entend, conformément à son devoir, respecter scrupuleusement l'ensemble des exigences constitutionnelles, que le texte n'enfreint sur aucun point – nous aurons l'occasion d'en débattre article par article.
Enfin, je souhaite vous dire un mot sur ce qu'exige l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. Il ressort de la jurisprudence de cette convention – sur laquelle je vous invite à vous pencher – que le droit à la vie familiale peut faire l'objet d'une « ingérence de l'autorité publique », c'est-à-dire d'une limitation, « si celle-ci est nécessaire au bien-être économique du pays ». Le bien-être économique, c'est ce qui nous préoccupe quand nous prenons en compte les capacités d'accueil de la France, qui, je le souligne, ne sont pas infinies. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.)