Chacun, je le sais, sera attentif au respect scrupuleux des engagements de la Grèce : tout à l'heure, en commission, Mme la ministre de l'économie a rappelé les intentions des pays de l'Eurogroupe et du FMI à ce sujet. Il reviendra d'ailleurs à la Commission européenne et au FMI d'y veiller, les décaissements étant conditionnés par le respect du programme convenu.
J'en rappelle les principaux aspects ; réalistes mais sévères, ils auront en effet des conséquences pour le peuple grec : gel des salaires des fonctionnaires jusqu'en 2014 ; suppression des treizième et quatorzième mois des traitements des fonctionnaires ; hausse de l'âge légal de départ à la retraite, aucun départ n'étant autorisé avant soixante ans ; majoration de la TVA de 2 % ; enfin, nouvelle taxe de 10 % sur l'alcool. Telles sont, parmi d'autres, les mesures les plus significatives de ce plan extrêmement rigoureux, qui doit permettre à la Grèce de ramener son déficit public sous la barre des 3 % du PIB, selon les critères de Maastricht en vigueur avant la crise financière.
Que les choses soient claires, monsieur Muet : il ne s'agit ni de punir la Grèce, ni de lui faire un cadeau. Cette aide exceptionnelle est finalement un système donnant-donnant. Le prêt sur trois ans que nous lui octroyons, à un taux très proche de celui du FMI, a pour contrepartie l'engagement fort et massif de ce pays s'agissant du désendettement et de la gestion rigoureuse des finances publiques. Ce taux de 5 % a suscité quelques commentaires. Mais je rappelle que le 29 mars dernier, lors de sa dernière émission obligataire, la Grèce a émis pour 5 milliards d'euros sur sept ans à 6 %, soit un taux très proche. Bref, l'objectif est que la Grèce emprunte à des conditions voisines de celles du marché : des conditions trop avantageuses pourraient, en plus de rompre la solidarité entre les pays de la zone euro – dont les spreads diffèrent –, conduire certains d'entre eux à solliciter, pour rétablir leur situation financière, un dispositif similaire. Bref, appliquer un taux proche du marché me semble de bonne politique.
Face à la crise grecque, l'Europe a montré qu'elle était capable de se serrer les coudes et d'apporter une réponse à la hauteur des enjeux. Bien sûr on peut toujours, à l'instar de M. Muet, critiquer la lenteur et la complexité du processus de décision. Mais il faut rappeler que la zone euro n'est pas un État fédéral : pour décider à l'unanimité un plan d'une telle ampleur, il faut prendre le temps de la discussion ; cela ne se fait pas en dix minutes sur un coin de table. Je me félicite d'ailleurs, madame la ministre, que la France et l'Allemagne souhaitent améliorer la gouvernance de la zone euro.
Ce qui compte à mes yeux est le résultat, c'est-à-dire l'aide de 110 milliards d'euros, dont 80 milliards en provenance des pays de l'Eurogroupe, qui ont décidé de se mobiliser pour aider la Grèce. Ce résultat est à la hauteur des enjeux. Bien sûr, il faudra aller plus loin, non seulement dans la gouvernance, mais aussi dans la régulation des marchés financiers et celle des agences de notation, comme l'a fort bien rappelé Jean-François Mancel : nous pourrons sans doute le faire dans quelques semaines à travers un projet de loi relatif à la régulation bancaire et financière, que le Gouvernement a déposé il y a quelques semaines. Au demeurant il a été annoncé en séance que l'AMF, l'Autorité des marchés financiers, était l'autorité de régulation compétente s'agissant des agences de notation, ce qui me semble juste.
En dépit de ce plan massif, les Français pourraient s'inquiéter d'une contagion possible de la situation grecque aux autres pays de la zone euro.