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Intervention de Daniel Garrigue

Réunion du 27 avril 2010 à 21h30
Réseaux consulaires commerce artisanat et services — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Garrigue :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, ce projet de loi est fondé un peu sur un paradoxe dans la mesure où il y a, d'un côté, les chambres de métiers et, de l'autre, les chambres de commerce.

Pour les chambres de métiers, les conditions de la régionalisation se font dans des conditions satisfaisantes, pour trois raisons.

D'abord, la méthode choisie laisse tout de même une certaine liberté aux chambres départementales de métiers. Celles qui ne veulent pas s'intégrer davantage dans les chambres régionales n'y sont pas obligées, et celles qui veulent s'intégrer et constituer des sections le peuvent si une majorité d'entre elles font un tel choix à l'échelle d'une région. C'est donc une méthode qui fait place au volontariat.

Ensuite, en raison de la nature même des entreprises auxquelles s'adressent les chambres de métiers, qui sont de petites entreprises et même de très petites entreprises, le système d'organisation est celui du réseau, et ce système qui existe au niveau départemental a peu de chance d'être remis en question dans le nouveau mode d'organisation.

Enfin, la nature même de l'activité des chambres de métiers fait qu'il n'y a pas en réalité les mêmes enjeux territoriaux que pour les chambres de commerce.

Pour les chambres de commerce, en revanche, les modalités de la réforme vont aggraver un phénomène que vous avez vous-même mis en lumière dans votre rapport madame la rapporteure, le phénomène métropolitain. On va ainsi accentuer un phénomène de métropolisation, qui est certes positif à l'échelle des grandes agglomérations mais qui pose des problèmes considérables sur le reste du territoire, et je voudrais en prendre deux exemples.

En raison de la crise financière, de la crise économique, des moyens considérables ont été mis à la disposition d'OSEO, en particulier par la Caisse des dépôts, moyens dont la diffusion s'est souvent faite dans des conditions beaucoup plus difficiles près du terrain, parce que l'on ne connaît pas bien aujourd'hui les réseaux, les acteurs par lesquels OSEO intervient. OSEO est beaucoup plus proche dans les grandes agglomérations qu'il ne l'est dans un grand nombre de départements. J'ai interrogé son président national, qui m'a répondu que le contact se faisait par l'intermédiaire des experts-comptables. J'ai vérifié chez moi en Aquitaine sur le terrain, les choses ne se passent pas tout à fait ainsi.

Autre exemple, qui me paraît extrêmement sérieux, l'exportation. Je suis élu d'un territoire, l'arrondissement de Bergerac, où il y a un très grand nombre de petites PME et même de TPE extrêmement exportatrices, qui vendent, non pas seulement à l'échelle de l'Europe mais très au-delà, dans un très grand nombre de secteurs industriels, agro-alimentaires, viticoles. Lorsque nous avions une chambre de commerce de proximité, il y avait entre ces différentes entreprises exportatrices des contacts, un effort d'organisation commune, que l'on a perdus lorsque l'on est passé à une chambre départementale, parce que c'est extrêmement difficile. La chambre de commerce et d'industrie départementale de la Dordogne ne dispose aujourd'hui que d'un seul agent pour recenser les entreprises exportatrices à l'échelle du département, qui sont pourtant plusieurs centaines, et essayer de les associer dans des actions de plus grande envergure.

Je suis très inquiet de ce qui va se passer quand se renforcera encore ce phénomène de métropolisation. Les conditions aveugles dans lesquelles est mise en oeuvre la RGPP, conditions qu'avaient dénoncées Philippe Séguin et la Cour des comptes il y a quelques mois, touchent malheureusement souvent les échelons territoriaux de l'État, si bien que la sous-administration des territoires ruraux est de plus en plus sensible. Cela vaut pour les entreprises comme pour les citoyens, et il n'y a pas en contrepartie d'effort d'aménagement du territoire.

J'entends nos amis socialistes dénoncer le fait qu'il n'y a plus d'aménagement du territoire. Dans la plupart des régions, la responsabilité de la région dans ce domaine est aussi grande que celle de l'État. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il y a dans notre pays un vrai problème d'aménagement des territoires ruraux et, sur ce point, tout le monde peut se donner la main.

Un dernier point me préoccupe, ce sont les conditions dans lesquelles on introduit progressivement les dispositions de la directive « Services » au hasard de textes successifs. Nous avons déjà eu ce débat à l'occasion de la loi de modernisation de l'économie, puis lorsque nous avons évoqué il y a quelques semaines les services sociaux d'intérêt général.

Je ne pense pas que ce soit une bonne méthode d'introduire dans notre droit la directive « Services » au compte-gouttes. Sur les enjeux européens, les termes des débats doivent être exposés clairement et les questions posées globalement. Ce n'est pas une bonne chose d'escamoter les débats sur les questions européennes, surtout sur un sujet aussi sérieux que la directive « Services ».

Je ne pense pas non plus que ce soit une bonne solution de traiter ces questions à la sauvette comme on le fait encore dans ce texte, notamment avec les marchés d'intérêt national et des dispositions concernant certaines professions. Je ne dis pas que ces dispositions sont mal fondées. Ce que je conteste, c'est une méthode qui escamote la réalité des problèmes aux yeux de nos concitoyens et du Parlement.

Telles sont les réserves que je veux formuler à l'égard de ce texte qui, encore une fois, me paraît positif pour les chambres de métiers mais qui, pour les chambres de commerce, renforce un phénomène de métropolisation extrêmement dangereux à terme.

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