Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, question difficile que celle abordée aujourd'hui, car les mesures de sûreté aérienne sont toujours perçues comme excessives par les passagers et, en cas de problème, la responsabilité du ministre, quel que soit le Gouvernement en place, est évidemment toujours engagée. Les pouvoirs publics sont à la recherche d'un équilibre entre le confort des passagers et la fiabilité des dispositifs de sécurité. Mais aujourd'hui, l'administration n'est pas libre de sa décision puisque nous devons appliquer les normes définies à Bruxelles, souvent sous la pression des États-Unis qui ne nous apparaissent pas toujours respectueux des libertés publiques. J'ajoute, dans ce panorama, que certains de nos partenaires européens ont tendance à s'aligner sur les positions américaines. Or la construction européenne est d'abord un combat dans lequel l'Europe n'est pas un pion, mais un acteur autonome de la scène internationale.
Je distinguerai deux thèmes majeurs : la mise en oeuvre par le gouvernement français des normes européennes et son action dans la négociation communautaire.
L'action conduite en France par l'administration de l'aviation civile se situe dans un cadre réglementaire que j'ai décrit dans deux rapports récents rédigés pour la commission des affaires européennes. Le premier portait sur l'organisation de la sécurité, et j'y relevais la mauvaise articulation des compétences entre les organismes intergouvernementaux – Eurocontrol –, communautaires – l'AESA – et les compétences nationales. Nous venons d'en avoir un exemple avec la fermeture des espaces aériens à la suite de l'éruption d'un volcan en Islande. Je redoute, et c'était l'objet de mon second rapport, qu'en matière de sûreté, l'évolution des textes en discussion à Bruxelles ne conduise à une certaine confusion. Depuis les attentats de septembre 2001, de nouvelles mesures de sûreté ont été mises en place : la Commission européenne a adopté en décembre 2002 un règlement sur la sûreté aérienne civile qui renforce considérablement les moyens mis en oeuvre pour harmoniser les règles au sein de l'Union européenne afin de faciliter la protection du transport aérien. Ainsi, en vertu de ce texte, chaque État membre doit adopter un programme national de sûreté concernant les contrôles d'accès dans les aéroports et l'inspection des voyageurs, des bagages, du fret, des matériels embarqués et des membres du personnel.
Les passagers financent pour l'essentiel le coût de la sûreté en payant des taxes ou des redevances aux compagnies aériennes. Les taxes liées à la sûreté sur les vols intracommunautaires représentent 1 % à 2 % du prix moyen du billet d'avion en Europe. En France, les mesures préventives des exploitants d'aéroport à la charge des entreprises et de leurs clients s'élèvent à 800 millions d'euros par an, auxquels s'ajoutent les coûts des mesures directement appliquées par les compagnies aériennes. Ces coûts figurent parmi les plus lourds d'Europe par passager ou par tonne de fret transporté. De plus, l'accumulation des mesures de contrôle a beaucoup allongé le temps de traitement du passager à l'aéroport. Si nombre d'entre eux ne contestent pas le bien-fondé de ces mesures qui les rassurent, ils demandent des moyens de contrôles adaptés au flux, et des nouvelles technologies, par ailleurs coûteuses, telles que les scanners corporels, dont la généralisation ne saurait être envisagée avant la fin des expérimentations en cours.
La Commission européenne a adopté, en mai 2009, une proposition de directive sur les redevances de sûreté aérienne en Europe, ayant pour objectif affiché de garantir, lors de la détermination du niveau des redevances, la transparence, l'absence de discrimination et la consultation des compagnies aériennes, ainsi que l'existence d'un lien entre coûts et redevances de sûreté ; il est également proposé d'établir une autorité de supervision indépendante dans chaque État membre. La directive s'applique aux aéroports qui enregistrent plus de cinq millions de passagers par an et, si ce seuil n'est pas atteint, au plus grand aéroport de l'État. Car actuellement, le recouvrement des coûts de sûreté aérienne est réglementé au niveau national. Je sais, monsieur le secrétaire d'État, que vous êtes favorable à cette proposition de directive sous réserve qu'elle laisse les États membres souverains…