Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les vingt-neuf premiers articles de ce projet de loi auraient pu constituer le tremplin d'un nouveau type de partenariat social. Ils auraient pu nous conduire à penser que vous souhaitiez voir se développer une véritable culture de négociation sur les conditions de travail dans le secteur public, car des avancées importantes ont été obtenues par les syndicats.
Je citerai, par exemple, la généralisation de la logique de l'élection aux organisations syndicales de fonctionnaires ou encore la création d'une instance de dialogue social commune aux trois fonctions publiques.
Ces avancées ne sauraient cependant faire oublier les insuffisances et, surtout, les régressions importantes induites par ce projet de loi.
Tout d'abord, si le relevé de décisions des accords de Bercy parlait d'une évolution du paritarisme, celle-ci est apparue comme une suppression pure et simple.
De plus, imposés par l'emploi d'une méthode pour le moins cavalière – le dépôt d'amendements au dernier moment qui empêche le débat démocratique –, les articles additionnels après l'article 30 sont tout aussi contestables. Loin d'engager la refonte des grilles indiciaires attendue par les agents pour tenir compte de l'évolution de leurs fonctions et de leurs responsabilités, l'un de ces articles se borne à proposer une revalorisation du premier échelon du premier grade et la mise en place d'un grade à accès fonctionnel après le deuxième.
Outre que cette revalorisation ne concerne qu'une infime partie des agents de catégorie A, la création d'un grade à accès fonctionnel ne répond pas, selon les huit organisations syndicales représentatives des trois versants de la fonction publique, aux attentes des personnels. Les organisations demandent donc une réelle négociation sur la refonte des catégories A et A+ pour l'ensemble de la fonction publique.
Toujours avec la même méthode, le Gouvernement a souhaité étendre les principes d'intéressement collectif et individuel à l'ensemble de la fonction publique. Il s'agit non pas de compenser une absence d'augmentation du traitement indiciaire par une prime perçue uniformément par tous les personnels d'un ministère, mais bien d'instaurer davantage de concurrence entre les services et d'exclure certains personnels via une évaluation fondée sur des critères dont on peut discuter l'objectivité. C'est, en réalité, une aggravation des conditions de travail des fonctionnaires.
Enfin, au moyen, cette fois-ci, d'une lettre rectificative, vous avez fait le choix d'anticiper sur la réforme des retraites et sur le dossier de la pénibilité, pour porter atteinte aux droits des personnels des établissements publics de santé. Vous remettez en cause leurs conditions de départ en retraite au nom d'une revalorisation qui leur est due au regard de leur niveau de formation et de leurs responsabilités ; une telle revalorisation avait d'ailleurs été promise par le Président de la République.
On cherche à nous faire croire que le salaire annuel des infirmières devrait être augmenté de 2 000 euros nets en début de carrière et de près de 4 000 euros en fin de carrière. Ce n'est pas la vérité, car vous omettez, sans doute délibérément, de préciser que ces sommes correspondent à la création de trois nouveaux échelons que personne n'aura atteint en 2015 ! Vous avez également omis de prendre en compte le fait que toutes les organisations syndicales se sont prononcées contre le volet salarial de ce protocole.
La rénovation du dialogue social commence donc par un dialogue de sourds, comme je l'ai déjà dit dans la discussion générale.
En effet, ce protocole n'a été signé dans son entier que par le syndicat national des cadres hospitaliers, le SNCH, qui est ultra-minoritaire, alors que la rénovation du dialogue social consacre justement le principe majoritaire en subordonnant la validité d'un accord à la condition qu'il ait été signé par une organisation syndicale ayant réuni au moins 50 % des voix. Le SNCH en représente à peine 1 %, mais c'est lui que vous considérez. Ce n'est pas admissible !
Permettez-moi de vous rappeler qu'un dialogue est en principe une discussion qui vise à ce que les deux parties trouvent un terrain d'entente.
Or ce texte, notamment par l'inacceptable chantage qu'il exerce sur les infirmières et les infirmiers, n'est en réalité qu'un vaste monologue dans lequel le Gouvernement confirme sa volonté de mettre au pas les fonctionnaires et de démanteler ce qu'il reste de nos services publics.
Pour toutes ces raisons, nous voterons bien sûr contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)