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Intervention de Huguette Bello

Réunion du 25 septembre 2008 à 15h00
Revenu de solidarité active — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaHuguette Bello :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, dans la logique de mon intervention du 17 janvier dernier sur le Grenelle de l'insertion, j'aurais souhaité intervenir plus précisément aujourd'hui sur le revenu de solidarité active et dire à quel point je suis d'accord avec le principe et les objectifs de ce nouveau dispositif. Comment ne pas approuver cette tentative pour atténuer la précarité des titulaires du RMI qui retrouvent un travail et celle des salariés, de plus en plus nombreux, qui vivent avec des revenus trop faibles ?

Certes, j'aurais souhaité demander l'extension du RSA aux jeunes de moins de vingt-cinq ans qui, une fois de plus, malgré le chômage record dont ils sont victimes, se trouvent exclus.

Certes, j'aurais exprimé ma crainte que le texte actuel, en ne prévoyant aucune obligation pour les employeurs, ne favorise les emplois à temps partiel et faiblement rémunérés.

Certes, j'aurais dénoncé la reprise de ce décret de la honte que constitue l'évaluation du train de vie des futurs bénéficiaires du RSA.

En un mot, mon intention aurait été de vous aider à améliorer ce nouveau dispositif, mais il y a l'article 15 qui prévoit le report de l'application du RSA dans les départements d'outre-mer. Or personne, outre-mer, ni à droite ni à gauche, ne l'a demandé ni, d'ailleurs, ne l'approuve.

Vous prétendez qu'il se justifie par la nécessité de réaliser une expertise complémentaire, du fait de la spécificité de certains dispositifs d'insertion. Dès février 2008, cette nécessité était soulignée dans le livre vert du RSA. Nous en sommes apparemment au même point. En fait, la question de l'articulation se pose pour deux dispositifs créés en 2000 : le RSO, le revenu de solidarité et, surtout, l'ARA, l'allocation de retour à l'activité, à laquelle s'apparente le RSA.

Il est vrai que l'ARA est plus avantageuse que le RSA, mais elle ne concerne que quelque 2 000 personnes à La Réunion – 3 000 pour tout l'outre-mer –, alors que le nombre de RMIstes dépasse les 75 000 à La Réunion.

Cette disproportion devrait inciter à appliquer immédiatement le RSA outre-mer et à instaurer, là aussi, un mécanisme de droit d'option entre les deux dispositifs qui coexisteraient. C'est d'ailleurs cette solution que vous avez adoptée pour le Territoire de Belfort, où existe aussi un dispositif spécifique d'accès à l'emploi.

Monsieur le haut-commissaire, cette solution éviterait à des milliers de personnes d'être bénéficiaires d'un RMI qui n'aurait plus de base légale, puisque l'article 115-1 du code de l'action sociale et des familles se trouve abrogé.

À La Réunion, le RMI est le symbole de l'égalité sociale. Pour la première fois, un gouvernement, celui de Michel Rocard, a décidé la mise en oeuvre d'une allocation sur tout le territoire national. Il est assez paradoxal que ce même RMI soit désormais le signe d'une inutile différenciation sociale : les symboles, en politique, monsieur le haut-commissaire, ont aussi leur importance.

Il est également paradoxal qu'un dispositif destiné à lutter contre la précarité tarde à être appliqué dans les territoires où cette précarité atteint les proportions les plus considérables et fait les pires ravages.

Selon les derniers chiffres de l'INSEE, 52 % de la population réunionnaise vit en dessous du seuil de pauvreté, pourtant fixé à un niveau inférieur à celui de la France continentale. Ainsi, ce sont les plus précaires qui doivent se montrer les plus patients.

Le financement du RSA est l'occasion de multiples discussions. On s'inquiète beaucoup, outre-mer, de savoir si, en dépit de l'article 15, les contribuables de ces départements seront concernés, dès 2009, par la taxe de 1,1 % que le Gouvernement a décidé d'instaurer sur les revenus du capital et de l'épargne.

Le report de l'application de la présente loi dans l'outre-mer nous conduit aussi à nous interroger sur le contrat unique d'insertion. La Réunion fait partie des départements qui expérimentent ce nouveau contrat. Resterons-nous au stade expérimental ou, au contraire, le droit commun s'appliquera-t-il tout de suite ? On ne peut pas ajouter l'inquiétude que produit ce flou juridique à la grave difficulté que crée la diminution continue des contrats aidés, difficulté pour les personnes qui se retrouvent sans emploi, mais aussi menace pour la qualité du service public.

Pour assurer de façon satisfaisante la dernière rentrée scolaire, il a fallu se livrer à toutes sortes d'acrobaties afin de pallier la pénurie des contrats aidés. Toutes les mairies craignent d'être contraintes de supprimer, dans les mois à venir, l'accompagnement des enfants handicapés en milieu scolaire ainsi que l'accueil et le soutien périscolaires.

À vrai dire, quitte à invoquer, pour retarder l'application de la loi, l'article 73 de la Constitution qui prévoit la possibilité d'adaptations, il aurait été préférable d'invoquer ce même article pour envisager un dispositif de RSA qui prenne en compte, à la fois, la réalité du marché du travail à La Réunion et les besoins auxquels l'économie marchande n'apporte pas encore de réponse.

Tel est le cas, notamment, pour la protection et la valorisation de l'environnement ainsi que pour les services à la personne, qui constituent d'importantes réserves d'emploi. Il est maintenant grand temps de structurer ces secteurs, ce qui permettrait de mettre un terme au débat inutilement idéologique entre l'économie solidaire et l'économie marchande.

Monsieur le haut-commissaire, j'espère que vous apporterez des réponses à nos inquiétudes. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et SRC.)

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