Nous sommes ici quelques-uns – et je salue les députés de la majorité comme de l'opposition qui en font partie – à nous intéresser à ces questions, avec le réel souci de montrer aux fonctionnaires que nous voulons, quelles que puissent être nos divergences d'idées, tout à la fois améliorer leurs conditions de travail, réformer et moderniser la fonction publique.
Premièrement, notre politique de la fonction publique n'a jamais consisté à tailler les effectifs jusqu'à la réduire à une fonction publique croupion. Je ne rappellerai qu'un seul chiffre, mais il me tient à coeur : depuis 1980, les effectifs de la fonction publique d'État ont augmenté de près de 15 %, ceux de la fonction publique territoriale de 70 %, et ceux de la fonction publique hospitalière de 36 %. Ce qui explique que non seulement les propos entendus ici où là laissant entendre que toute la politique du Gouvernement en matière de fonction publique se limiterait à une réduction des effectifs sont faux, mais que la réduction en question doit être relativisée : la fonction publique compte environ 5,2 millions d'agents, ce qui n'a rien de proportionnellement dérisoire. C'est une fonction publique qui compte et à laquelle nous voulons adresser des messages forts.
Premier message important : restituer à la fonction publique la moitié des gains issus de la réduction des effectifs. Il faut que ces chiffres soient ancrés dans les esprits : quand la réduction des effectifs permet de dégager des économies, plus de 50 % des économies en question repartent vers les fonctionnaires et permettent notamment d'améliorer les situations catégorielles. Cela montre à quel point les propos de Mme Fraysse et de M. Braouezec étaient à cet égard particulièrement excessifs.
Sur le texte lui-même, je voudrais reprendre plusieurs idées que j'ai entendues tant dans la bouche des orateurs de la majorité que de ceux d'une partie de l'opposition.
Nous faisons la preuve avec ce projet de loi d'une véritable culture de la négociation et du dialogue social. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Cela se traduit, comme pour d'autres textes qui ont précédé celui-ci, par des accords de premier plan : accord sur la santé et la sécurité au travail, accord sur la formation professionnelle, accord sur le dialogue social. Ces différents accords ont été conclus avec les syndicats et ont rendu possibles de véritables avancées en matière de pouvoir d'achat.
Dois-je, par exemple, rappeler que la garantie individuelle de pouvoir d'achat résulte d'accords conclus dans les mêmes conditions avec les syndicats ? Dois-je rappeler que le rachat des comptes épargne-temps, ou la refonte des catégories – j'en profite pour rendre hommage à mon prédécesseur Christian Jacob – relevaient d'accords de même nature ? Autant d'avancées qui ont mis en évidence notre culture du consensus, notre culture d'ouverture dans la discussion.
Avec ce texte, nous sommes dans la même logique : celle d'une culture de la négociation et du dialogue social.
J'ai été choqué, et je ne crois pas avoir été le seul – je suis absolument convaincu que les syndicats auront été surpris d'entendre une chose pareille – par les propos de M. Terrasse qui a laissé entendre que l'accord sur la rénovation du dialogue social ne s'appliquait à la fonction publique d'État. Je tiens à rappeler ici que les trois composantes de la fonction publique sont bien entendu concernées et engagées par la signature des fédérations syndicales.
Cette culture de la négociation peut déboucher sur des accords. Cela nous empêche-t-il pour autant d'y ajouter certains dispositifs qui nous paraissent appropriés ? Évidemment non. Je le dis très clairement, et je laisserai Mme Bachelot parler à ce sujet de l'article 30.
Les fonctionnaires sont dans une situation statutaire et réglementaire, et non contractuelle. Dès lors, il appartient donc à l'employeur de prendre les dispositions qui lui paraissent appropriées pour réaliser des avancées au bénéfice des agents. C'est le cas dans ce texte avec les articles additionnels que vous avez évoqués.
Au demeurant, j'avais déjà annoncé une quinzaine de jours devant la commission des lois que le Gouvernement présenterait ces articles aujourd'hui. Il n'y a donc pas d'effet de surprise, et celles et ceux parmi vous qui auraient le désir de relire le détail du compte rendu de la séance de la commission des lois verront que j'avais prévenu que je déposerais plusieurs amendements créant de nouveaux dispositifs en matière de rémunération.
C'est le cas, par exemple, du grade à accès fonctionnel pour la catégorie A. Cela correspond, je le signale, à une avancée à la fois pour le haut et le bas de la grille pour la catégorie A, suivant ce qui a été fait pour les catégories B et C. Ce sera pour les fonctionnaires de catégorie A une véritable avancée. Nous en avons discuté ; j'ai reçu les syndicats le 26 mars dernier pour essayer de les en convaincre. Nous n'avons pas trouvé d'accord, c'est un fait, mais ce n'est pas une raison pour en déduire que les agents de catégorie A ne sont pas intéressés par un dispositif de cette nature, qui instaure un troisième grade au sein de la catégorie A, destiné à celles et ceux des agents qui ont exercé des responsabilités et pris des risques particuliers.
C'est également le cas de la prime de fonctions et de résultats, avec la reconnaissance du mérite individuel. Cela a été longuement évoqué par plusieurs intervenants, et en particulier par Michel Diefenbacher, qui s'est beaucoup battu pour la PFR, et qui a également évoqué la reconnaissance du mérite collectif, autrement dit la prime d'intéressement. Notre logique, c'est, là encore, consiste à introduire par amendement des dispositifs dont nous croyons qu'ils vont dans la bonne direction.
L'article 30 n'a donc rien de spécifique : nous défendrons plusieurs dispositifs qui nous paraissent aller dans la bonne direction – les agents, je le répète, sont dans une situation statutaire et réglementaire.
Autre constat plusieurs fois entendu, et je salue d'ailleurs le ton modéré dont a usé à l'opposition à cette occasion : les principes de la négociation tels qu'ils sont déclinés dans le texte de loi correspondent à peu près à ce que nous croyons tous opportun. Les syndicats les ont approuvés ; six des huit syndicats les ont signés. L'élargissement de la négociation à différents domaines – aux conditions de travail, au déroulement des carrières, à la formation professionnelle, à l'action sociale – va évidemment dans la bonne direction. Je rappelle que, jusqu'à présent, les négociations se limitaient aux questions salariales : il s'agit donc bien d'une avancée majeure dans le domaine des discussions avec les syndicats, et c'est très bien ainsi.
De la même façon, j'ai constaté qu'il n'y avait pas de critiques sur le principe de l'élection, sauf en ce qui concernait une partie directe liée aux comités techniques paritaires. De plus, les non-titulaires pourront désormais participer aux élections. Enfin, il y a une avancée réelle pour les syndicats, qui ne sont plus soumis à des critères de reconnaissance de représentativité, qui n'étaient pas définis. Là encore, nous allons, je crois, dans la bonne direction.
Restent deux points sur lesquels nous aurons à revenir dans la discussion. Le premier a trait au paritarisme. Le Président de la République a défendu l'idée d'une amélioration du fonctionnement du paritarisme. Notons que la fonction publique hospitalière pratique depuis de nombreuses années le système qui est critiqué aujourd'hui : dans les hôpitaux, les comités techniques d'établissement ne sont pas paritaires. Ce qui ne les empêche pas de fonctionner ; il n'y a donc pas matière à s'en inquiéter particulièrement.
Deuxième point : force est d'admettre que le fonctionnement actuel du dispositif est tout à la fois formaliste – l'administration vient défendre un texte, et participe au vote sur ce même texte : il n'y a rien là qui enrichisse le débat – et chronophage – nombre de fonctionnaires ne se déplacent que pour voter, car en réalité ils ne participent pas à la discussion. Cela n'apporte donc pas grand-chose.
Monsieur Derosier, vous avez posé la question de la fonction publique territoriale. Nous avons, je crois, entendu vos suggestions puisque nous proposons d'instaurer un système particulièrement souple : le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale continuera à fonctionner sur la base de deux collèges, le collège des employeurs et le collège des représentants du personnel. Nous avons donc entendu ce qui nous était demandé.
De plus, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale pourra demeurer composé d'autant d'élus que le souhaite le collège des employeurs, et les avis de chacun des collèges continueront de s'exprimer par un vote. Nous avons là encore entendu ce qui nous était demandé.
Les voix des employeurs et des représentants des organisations syndicales ne s'additionneront pas : chaque collège, et nous pensons que c'est un point positif, prendra donc position. C'est à la fois responsabilisant et essentiel pour le pluralisme.
Enfin, les comités techniques pourront fonctionner sur le même schéma que le Conseil supérieur, dans la mesure où une délibération de la collectivité territoriale pourra le prévoir. Par rapport au projet initial, nous avons donc une avancée et un assouplissement. La fonction publique hospitalière fait ici, en quelque sorte, figure de modèle.
Je ne sais pas si ce texte est historique, comme je l'ai entendu dire plusieurs fois au cours de la soirée…