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Intervention de Catherine Vautrin

Réunion du 23 mars 2010 à 16h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCatherine Vautrin, rapporteure :

Le projet de loi portant réforme des chambres de commerce et de l'industrie, adopté par le conseil des ministres le 29 juillet 2009, a été diversement apprécié : un groupe au sein de l'ACFCI (Association des chambres françaises de commerce et d'industrie) l'avait approuvé, le groupe « des métropoles » considérait qu'il aurait été préférable d'attendre la réforme des collectivités territoriales pour aligner l'organisation des chambres sur le maillage obtenu ; un dernier groupe parmi les chambres de commerce s'y est fermement opposé. J'ai donc, au terme d'une cinquantaine d'auditions, recherché un consensus. Certains penseront peut-être qu'il s'agit du plus petit dénominateur commun ; j'ai, en tout cas, recherché un dispositif qui puisse fonctionner.

Le texte comprend trois titres. Pour commencer, il réforme les chambres de commerce et d'industrie ainsi que les chambres de métiers et de l'artisanat, en clarifiant leurs compétences respectives et en rationalisant leur maillage sur l'ensemble du territoire. Quitte à bouleverser certaines habitudes, ce texte conduira donc à réformer les structures de terrain pour faciliter l'action des réseaux consulaires dont l'appui essentiel au tissu industriel est réaffirmé. Le projet traduit ensuite deux préoccupations majeures : le souci de simplification administrative et le respect de nos engagements internationaux. C'est pourquoi il vise, d'une part, à clarifier le régime administratif de plusieurs professions réglementées – marchés d'intérêt national, agents artistiques, experts-comptables, services de placement – et, d'autre part, à transposer en droit interne certaines dispositions incluses dans la directive « services ».

Le premier titre, le plus long, traite donc spécifiquement de la réforme des réseaux consulaires, par des dispositions relatives respectivement aux chambres de commerce et d'industrie et aux chambres de métiers et de l'artisanat. Ces deux institutions font depuis très longtemps partie de notre paysage institutionnel et économique, la première chambre de commerce ayant été fondée en 1599, à Marseille ; quant au régime juridique des chambres de métiers et de l'artisanat, il a, dans ses grandes lignes, été fixé par la loi Courtier de 1925.

Les unes comme les autres ont déjà été réformées, en dernier lieu par la loi Dutreil du mois d'août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises. Le projet que nous examinons aujourd'hui vise à amplifier le mouvement ainsi amorcé puisque, tous les acteurs en conviennent, la réforme des chambres de commerce et d'industrie souhaitée en 2005 n'a pas pleinement abouti.

La logique générale du premier titre consiste à renforcer le niveau régional des chambres et à en diminuer le nombre au plan local afin de réaliser des économies, tout en veillant à conserver un important réseau de proximité – une proximité à laquelle j'apporte une attention toute particulière, ce qui explique nombre des amendements que j'ai déposés. En effet, seule la dimension locale justifie l'existence d'un réseau de chambres de commerce et de chambres de métiers, et de cette proximité dépend en premier lieu leur efficacité.

Le texte prévoit que les CCI actuelles s'intituleront désormais chambres de commerce et d'industrie territoriales – CCIT– ; quant aux chambres régionales de commerce et d'industrie, elles deviendront des chambres de commerce et d'industrie de région – CCIR. L'organisation adoptée prévoit de suivre un schéma pyramidal dominé par l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie – l'ACFCI.

Au-delà de ces changements sémantiques, en eux-mêmes très révélateurs, quatre sujets d'une importance particulière sont traités.

S'agissant de l'organisation et des missions, le projet rationalise le paysage actuel des CCI en privilégiant le niveau régional des chambres. À cet effet, le texte définit les fonctions dévolues respectivement aux CCIT et aux CCIR pour éviter les doublons. J'ai souhaité plusieurs changements en la matière. En premier lieu, j'ai estimé que le projet ne définissait pas avec toute la clarté nécessaire les missions dévolues aux chambres de commerce et d'industrie. Selon moi, le texte doit en premier lieu définir les missions des chambres avant d'en préciser l'organisation puis le financement. Je vous proposerai donc un amendement général relatif aux missions qu'elles doivent remplir, quel que soit le niveau considéré – ACFCI, CCIR, CCIT.

Dans le droit-fil de cet amendement général, j'ai ensuite souhaité clarifier les missions dévolues à chaque « étage » du système consulaire ; je vous soumettrai plusieurs amendements à cet effet.

En troisième lieu, il fallait introduire une plus grande souplesse dans l'organisation proposée en reconnaissant les chambres de commerce et d'industrie métropolitaines ; elles auront pour fonction d'animer le bassin d'activité correspondant à une métropole au sens où l'entend actuellement le projet de loi relatif à la réforme des collectivités territoriales. Il fallait aussi faciliter la fusion entre chambres et, pour cela, relever de 4 500 à 8 000 ressortissants le seuil permettant l'existence d'une CCIT.

Je me suis également intéressée au système électoral des CCI. Il est d'une complexité singulière puisqu'il consiste à faire élire des candidats au sein de trois catégories – services, industrie, commerce –, divisées en sous-catégories dont le nombre peut lui-même varier selon la région considérée. Si le mécanisme relève en très grande partie du domaine réglementaire, le texte prévoit néanmoins de faire élire à l'avenir les membres des CCIT et des CCIR le même jour. Pour ma part, je tiens à souligner l'importance du scrutin uninominal à un tour et à proposer un système de suppléants permettant de faire progresser la parité.

Je souhaite également que les chambres territoriales puissent continuer de mettre en avant leur expérience et qu'elles puissent mutualiser les expérimentations réussies. À partir du moment où la stratégie et le budget sont définis au niveau régional, il importe de permettre à l'échelon local de mettre au point les outils quotidiens utiles au développement économique des territoires.

Il convenait encore de se pencher sur le cas particulier de l'Île-de-France. Peut-on traiter la CCI de Paris comme toutes les autres chambres, sachant qu'elle est dotée d'un budget de près de 300 millions d'euros et qu'elle rassemble 380 000 ressortissants alors que certaines chambres n'en regroupent difficilement que 1 400 ? La situation était particulièrement compliquée en Île-de-France ; on se félicitera donc qu'un compromis ait récemment été trouvé sur ce sujet entre le président de la CCI de Versailles, par ailleurs président de l'ACFCI, et celui de la CCIP. Sur la base de cet accord, nous avons souhaité envisager un projet consistant à créer une seule CCI pour la région capitale, les CCI actuelles devenant des chambres de commerce et d'industrie départementales (CCID) qui seraient dépourvues de la personnalité morale. Le Gouvernement a donné son accord à ce schéma, qui continue cependant de susciter l'opposition de certaines CCI, dont celle de l'Essonne. J'ai rencontré les différents protagonistes et je leur ai proposé des solutions alternatives pour parvenir à un compromis, lequel n'a pas été trouvé à ce jour. Que, dans l'optique du « Grand Paris », la région Île-de-France fasse l'objet d'une approche spécifique me paraît logique mais les inquiétudes qui s'expriment n'étant pas infondées, nous mettrons à profit le temps du débat parlementaire pour approfondir encore la réflexion sur la région capitale.

M. Charles de Courson, rapporteur pour avis de la Commission des finances, traitera du financement du dispositif. À la suite de la disparition de la taxe professionnelle, une solution de substitution quelque peu hâtive avait été trouvée, qui a pris la forme de l'article 79 de la loi de finances pour 2010. Il fallait d'évidence trouver une solution pérenne. C'est ce qu'a fait M. de Courson, que je remercie pour ses efforts constants. Le dispositif qu'il a mis au point, élaboré au sein de la Commission des finances et avalisé par le rapporteur général, permet d'envisager l'avenir avec sérénité. L'amendement prévoit que le financement des CCI repose sur la cotisation foncière des entreprises, la CFE, à hauteur de 30 % et, à hauteur de 70 %, sur la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE.

Je vous proposerai simplement de modifier cette proportion en l'établissant à 40 % pour la CFE et à 60 % pour la CVAE afin de mettre plus largement à contribution toutes les entreprises, notamment les plus petites, premières utilisatrices des services des CCI.

J'en viens maintenant aux chambres de métiers et de l'artisanat. Il est prévu que leur future organisation comporte une assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat –l'APCM –, des chambres de métiers et de l'artisanat de région – CMAR –, des chambres régionales de métiers et de l'artisanat – CRMA - et des chambres départementales de métiers et de l'artisanat - CDMA. Il peut paraître étrange de distinguer ainsi CMAR et CRMA mais cela se justifie, puisque la réforme préparée par les chambres des métiers prévoyait que si plus de la moitié des chambres d'une région le souhaitent, elles peuvent se regrouper en une CMAR, devenant de ce fait des sections de la chambre de région. Les chambres ayant choisi de rester indépendantes prennent alors le statut de chambres départementales rattachées à la chambre de région. Une CRMA regroupe quant à elle l'ensemble des chambres d'une région sans exception. La réforme se fera donc à plus ou moins long terme, en fonction des choix des chambres au sein de la région.

J'approuve globalement la philosophie du projet, qui définit assez clairement les missions assignées aux chambres de métiers et de l'artisanat ainsi que celles dévolues à l'APCM, établissement public placé à la tête du réseau. Je déposerai néanmoins quelques amendements tendant à affirmer plus clairement le rôle des chambres de métiers. Je souligne que l'équilibre trouvé dans le texte convient à l'ensemble du réseau puisqu'il reprend en grande partie le projet de réforme proposé par le président Griset, et qui avait été approuvé par 94% des présidents des chambres de métiers.

Le second titre du projet de loi tend, au-delà d'un inventaire qui peut paraître disparate, à transposer plusieurs dispositions de la directive « services » du 12 décembre 2006 qui vise, vous le savez, à favoriser l'accès aux activités de services et leur exercice au sein de l'Union européenne. Elle prévoit notamment qu'un État peut subordonner cet accès à une autorisation à condition que celle-ci soit strictement limitée, justifiée par des raisons impérieuses d'intérêt général et qu'elle réponde aux critères de non-discrimination, de nécessité et de proportionnalité.

La France a choisi de scinder la transposition de cette directive dans plusieurs textes, qu'il s'agisse de la LME, de la loi de développement et de modernisation des services touristiques, de la proposition de loi relative à l'encadrement de la profession d'agent sportif ou de la proposition de loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit adoptée en première lecture le 2 décembre 2009.

Le présent projet de loi concerne la réforme du périmètre de protection des marchés d'intérêt national – MIN –, la suppression de la licence d'agent artistique, une importante réforme de la profession d'expert-comptable et la mise en conformité de l'activité de placement.

Le texte prévoit l'assouplissement des conditions d'installation au sein des périmètres de référence qui entourent les MIN, mettant en place à cet effet une autorisation préalable et non plus une interdiction assortie de dérogations. Cet assouplissement est-il suffisant au regard de la directive, qui réserve les régimes d'autorisation à la justification d'une raison impérieuse d'intérêt général ? La réponse pourrait être négative, mais elle doit être nuancée par des éléments historiques, les MIN ayant été créés en 1962 à l'initiative du Commissariat général au Plan et par des éléments contextuels : il a fallu transférer les grossistes des Halles de Paris vers Rungis et leur syndicat était très attaché à cette protection. Mais, cinquante ans plus tard, les choses ont changé et je proposerai la suppression des périmètres de référence, qui restreignent de manière disproportionnée la liberté d'établissement. Si l'interdiction pour les grossistes de s'installer à proximité des MIN se justifiait lors de leur création, elle va désormais contre les préconisations de la directive « services » et à l'encontre des souhaits des professionnels de la restauration et du commerce de détail, de la FNSEA, de la CGPME, et des producteurs de fruits et de légumes. Tous, exception faite des représentants du MIN de Rungis, souhaitent une ouverture. Je proposerai donc un amendement à ce sujet.

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