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Intervention de Nadine Morano

Réunion du 25 mars 2010 à 15h00
Modernisation du congé maternité — Discussion d'une proposition de loi

Nadine Morano, secrétaire d'état chargée de la famille et de la solidarité :

…en créant des dispositifs qui sont séduisants de prime abord mais qui pourraient bien se retourner contre les femmes.

Vous proposez d'abord un allongement de seize à vingt semaines du congé de maternité pour les salariées. Comme nous l'avons déjà dit dans le cadre de la proposition de directive communautaire, et comme l'a d'ailleurs souligné un rapport du groupe UMP dont vous étiez coauteur, madame Boyer, nous ne sommes pas par principe opposés à un allongement. Les dispositifs existants sont cependant déjà très protecteurs, et les femmes peuvent, si elles le souhaitent ou si elles en ont besoin, interrompre leur activité pendant une durée bien supérieure à la durée légale du congé de maternité, trente-huit jours de plus en moyenne. Ne serait-il pas, en outre, prématuré de modifier le droit français sur ce point alors que le projet de directive est encore en discussion au Parlement européen et qu'il fait l'objet de nombreux amendements ? Je note également que cette proposition générerait une grosse dépense pour les finances sociales, estimée à plus de 400 millions d'euros. Or notre priorité est de créer des modes de garde.

Vous souhaitez par ailleurs que l'employeur assure un maintien intégral du salaire pendant ce congé. Sur ce point, qui relève largement de la compétence des conventions collectives, une consultation des partenaires sociaux s'imposerait. Je ne suis pas convaincue qu'elle soit bien accueillie, et je ne suis pas certaine non plus qu'à trop rigidifier et complexifier le droit existant, nous n'arrivions pas à un résultat opposé : l'éloignement du marché du travail et la stigmatisation des femmes enceintes, qui apparaîtraient non plus comme un atout mais comme un handicap coûteux.

Votre volonté d'aligner la durée du congé de maternité des indépendantes sur celui des salariées, là encore, me paraît prématurée compte tenu de la négociation en cours au niveau européen. Le projet de directive sur la protection sociale des indépendants et de leurs conjoints aidants comporte en effet un volet concernant la maternité. Alors que, dans la version initiale du projet de directive, la Commission européenne avait prévu un alignement de la durée du congé de maternité des non-salariées sur les salariées, les discussions sur ce texte au niveau européen ont conduit la Commission à accepter que ce ne soit pas le cas. Il s'agit de s'adapter aux besoins concrets et spécifiques de ces professions. Ainsi, la durée envisagée est de quatorze semaines, alors que le projet de directive est de dix-huit semaines.

En ce qui concerne l'indemnisation du congé de maternité, votre proposition est redondante avec les dispositifs en place. Il existe déjà dans la législation de la sécurité sociale une protection relative à la maternité pour les femmes exerçant une activité non salariée, incluant l'adoption.

Vous voudriez également créer en droit du travail un congé parental d'une durée de douze mois au minimum, dont au moins 20 % seraient réservés à l'autre parent, alors qu'il est aujourd'hui de douze mois au maximum. Ce nouveau congé poserait au moins deux problèmes : trop long, voire trop rigide, il ne permettrait pas de répondre aux aspirations de l'ensemble des parents ; de plus, cette nouvelle proposition serait en retrait par rapport au système actuel, puisque les deux parents peuvent bénéficier chacun d'un congé parental jusqu'aux trois ans de l'enfant.

Vous proposez également de créer un revenu de remplacement de 80 % du dernier salaire brut pendant ce congé. Cependant, le salaire net d'un salarié payé au SMIC mensuel, par exemple, correspond à 78,5 % du salaire brut. Cela signifierait donc qu'en congé parental, le parent toucherait une indemnité supérieure à son salaire net.

Enfin, l'estimation du coût de la création d'un congé parental indemnisé à 85 % du salaire net est de 2,3 milliards d'euros. Pour une indemnisation à 80 % du salaire brut, on peut donc estimer que la dépense supplémentaire serait supérieure à 3 milliards d'euros. Or nous avons un devoir de responsabilité envers les générations futures : le coût de cette mesure aurait une incidence financière extrêmement négative pour les comptes de la branche famille, déjà profondément affectés par la crise.

Nos échanges me font songer aux débats relancés par l'ouvrage d'Élisabeth Badinter. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

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