Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité, mes chers collègues, il y a un mois, notre assemblée adoptait à l'unanimité – je tiens à nouveau à le souligner – une proposition de résolution visant à promouvoir l'harmonisation vers le haut des législations européennes applicables à l'égalité entre les femmes et les hommes. Cette résolution invite le Gouvernement à présenter au Parlement les initiatives qu'il entend prendre pour mettre en oeuvre dans le droit national les dispositions législatives et réglementaires les plus avancées déjà prises dans les différents États membres de l'Union européenne.
Pour ma part, je suis convaincue que les parlementaires doivent, eux aussi, prendre des initiatives pour garantir aujourd'hui l'égalité entre les femmes et les hommes et favoriser une meilleure articulation des vies familiale et professionnelle pour les deux parents dans les familles. Cela conduit, à l'évidence, à mieux garantir l'égalité entre les femmes et les hommes.
Nous voici au coeur du sujet puisque nous abordons, cet après-midi, l'examen de la proposition de loi relative à la modernisation du congé de maternité et aux conditions d'exercice de la parentalité. Certes, nous conduisons une politique familiale volontariste qui a permis de soutenir le taux de fécondité le plus élevé d'Europe et qui fait l'objet d'une attention vigilante de la part de nos concitoyens. Cependant, depuis quelques années, madame la secrétaire d'État, nous observons que les attentes et les modes de vie des Français ont changé. C'est ainsi que l'articulation entre vie familiale et professionnelle devient un enjeu majeur dans l'organisation de leurs vies. C'est la raison pour laquelle certains outils de la politique familiale doivent, à mon sens, être adaptés à ces évolutions. Aujourd'hui sans doute plus que jamais, l'arrivée d'un enfant dans une famille est loin de relever seulement de la sphère privée. C'est, au contraire, une question centrale en termes d'organisation de la société, surtout lorsque l'on en connaît les conséquences néfastes s'agissant de l'égalité entre les femmes et les hommes.
La façon dont la maternité est organisée aujourd'hui s'avère un élément clé du maintien des rôles établis et de l'organisation sociale. Certes, de nombreuses Françaises parviennent à concilier bébés et travail, mais au prix de grands écarts personnels : le temps partiel subi, le stress au travail, les rythmes épuisants, la non-implication dans la vie sociale et politique. Les frustrations sont nombreuses. Beaucoup de femmes n'ont d'autre choix que de renoncer à leur vie professionnelle. Les chiffres le montrent : entre vingt-cinq et quarante-neuf ans, âge central pour l'activité professionnelle, une femme sur cinq n'est pas dans l'emploi et la moitié de celles qui ont de jeunes enfants et qui ont mis fin à leur vie professionnelle nous disent qu'elles auraient souhaité continuer leur activité, mais que c'était impossible parce que trop difficile.
Selon les études récentes aussi, un nombre croissant d'hommes se dit prêt à participer à l'éducation des enfants. Certes, la création du congé de paternité par Ségolène Royal en 2001 a constitué, de ce point de vue, une avancée. Cela n'a malheureusement rien changé dans la répartition des tâches. Or c'est aujourd'hui un enjeu majeur que notre société soit en mesure de s'adapter pour permettre aux parents d'assurer à parts égales leurs responsabilités au lieu de continuer à contraindre les femmes à jongler au prix des nombreux sacrifices déjà évoqués.
À toutes ces nouvelles attentes, il est de notre intérêt de répondre pour plusieurs raisons. Je citerai tout d'abord celle du vieillissement de la population et de l'augmentation des dépenses de retraite induites, de même que la nécessité de consolider la croissance potentielle du pays. Cela signifie qu'il faut à la fois maintenir un taux de natalité élevé et améliorer le taux d'emploi des femmes. Faciliter cette articulation des vies familiale et professionnelle pour les hommes et les femmes est donc un impératif économique qui doit être pris au sérieux, sans quoi nous risquerions d'en arriver à la situation que connaissent d'autres pays européens où les femmes sont contraintes de choisir : soit elles continuent à travailler, soit elles ont des enfants.
Bien sûr, il existe aujourd'hui de nombreux leviers pour favoriser cette articulation, comme le développement des modes de garde, qui tente de pallier le manque criant de places de crèche, ou l'adaptation des conditions et des rythmes de travail des parents dans les entreprises. Mais nous avons choisi une troisième voie, celle qui se cale sur les initiatives européennes et nationales récentes.
La Commission européenne a en effet déposé une proposition de directive en octobre 2008, visant à allonger le congé de maternité et à améliorer la protection des femmes enceintes. Ce texte a déjà été adopté en première lecture par le Parlement européen, et la majorité des États membres se sont déclarés favorables à l'allongement du droit au congé de maternité de quatorze à dix-huit semaines.
Le Conseil a également adopté une directive relative au congé parental, l'allongeant et affirmant qu'une période doit être prise par le père et ne peut être transférable à la mère. Le Haut conseil de la famille a rendu un avis qui va dans ce sens.
Il y a donc des initiatives multiples, et je souhaite que nous avancions nous aussi sur ces questions.
Si nous lions congé de maternité, congé de paternité et congé parental d'éducation, c'est parce que les séparer, c'est rester sur une vision passéiste de la famille ne prenant en compte ni la coparentalité ni la coéducation. Or l'éducation doit être pensée de manière globale et impliquer à égalité les deux parents. L'approche que nous défendons est transversale.
Certains articles, je le regrette, ont été jugés irrecevable au titre de l'article 40 de notre Constitution.