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Intervention de Gaëtan Gorce

Réunion du 25 mars 2010 à 15h00
Situation de m. ibni oumar mahamat saleh ressortissant tchadien disparu — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaëtan Gorce, auteur de la proposition de résolution :

Je profiterai de cette explication de vote pour réagir.

Je tiens d'abord à remercier le président de notre commission, le président de l'Assemblée et le Gouvernement d'avoir permis que se tienne ce débat, à l'initiative du groupe socialiste. Il a été, je le crois, utile. Chacun s'est exprimé dans le respect des formes et sur le fond avec le souci de dégager des éléments d'information et de vérité. Restent, évidemment, des points qui méritent d'être approfondis, ce qui explique que nos derniers échanges aient parfois pu être un peu plus vifs.

Il est vrai, monsieur le ministre, que vous avez abordé une question délicate et que je n'ai pas traitée dans mon intervention afin de ne pas créer de confusion entre notre demande de mise en place d'un comité de suivi et les événements qui se sont déroulés les 2 et 3 février. Si l'arrestation de M. Saleh y est directement liée, la manière dont ils se sont déroulés mériterait bien des commentaires et bien des interventions.

Vous avez notamment évoqué les conditions dans lesquelles la France est, de ce point de vue, amenée à se situer. Comme vous, je veux naturellement rendre hommage au travail de nos diplomates et de nos soldats qui ont permis la protection et l'évacuation d'une partie des ressortissants. Le président de la commission l'a naturellement fait à raison. Il serait donc injuste de ne pas le souligner. Il faudra toutefois parallèlement, comme l'a précisé M. Muzeau, que l'Assemblée nationale sache dans quelles conditions la France est militairement présente au Tchad, quelles sont les actions qu'elle mène, quelles sont celles qu'elle soutient au titre de la logistique, quelles sont éventuellement les actions qu'elle permet ou qu'elle protège. J'ai évoqué la question des hélicoptères. Ces interrogations sont légitimes. Contrairement à nos voisins, nous ne disposons pas aujourd'hui, ce qui est anormal pour une démocratie avancée comme la nôtre et considérant notre Constitution, des éléments d'information permettant d'avoir communication de toutes les bases juridiques à partir desquelles votre ministère ou celui de la défense est amené à intervenir. Les seules communications à notre disposition sont l'accord de 1976 et le dispositif Épervier que nous connaissons de manière assez générale et assez vague, qui encadre très strictement nos interventions et ne permet pas toute une série d'actions comme celles que vous avez décrites.

De la même manière, nous pouvons nous interroger sur des faits comme la livraison d'armes par la Libye, que vous avez vous-même évoquée lors d'une interview, et qui pose question. Si je m'en tiens à la lettre des textes que nous connaissons, la France aurait dû faire preuve, face à cette situation, d'une totale neutralité. Or je constate que tel n'a pas été le cas.

Vous avez également évoqué les événements. J'ai naturellement bien compris qu'ils sont à prendre en compte. Je ne peux tout de même pas m'empêcher d'observer – et j'appelle l'attention de la représentation nationale sur ce point – que ces événements se sont produits évidemment à l'initiative, condamnable et condamnée par la communauté internationale et le Conseil de sécurité, des rebelles. La commission d'enquête a rappelé les exactions extrêmement graves auxquelles les rebelles s'étaient livrés, mais aussi les forces armées tchadiennes. Je n'aurai peut-être pas le temps d'évoquer les dispositions qui figurent dans le rapport, mais je vous invite véritablement à vous y reporter. Je ne crois pas que l'on puisse se féliciter, d'une manière ou d'une autre, des conclusions ici présentées.

Il est précisé que « les rebelles, aussi bien que les forces de défense et de sécurité, ont commis des exactions constitutives de violations tant des dispositions du droit national que de celles des instruments juridiques internationaux. À cet égard, l'armée tchadienne s'est rendue responsable notamment de l'utilisation [nous sommes en langage diplomatique] disproportionnée et indiscriminée de la force au cours des bombardements opérés par des hélicoptères contre des rebelles implantés, en violation du droit international humanitaire, dans des sites non militaires et parmi les populations civiles. »

À plusieurs reprises, l'action des forces armées tchadiennes a été mise en cause. Je rappelle que, par l'accord de 1976, nous avons la responsabilité de l'organisation et de la formation de l'armée tchadienne. Je ne sais pas si nous sommes défaillants en la matière, mais il est certain que la façon dont cette armée tchadienne s'est comportée dans ces circonstances ne prouve pas l'efficacité de notre intervention.

J'en viens plus directement à la disparition de M. Saleh. Vous avez indiqué tout ce qui a été accompli par la France. Je veux être totalement juste dans cette affaire et il n'y a pas d'intention polémique dans mon propos. Vous avez eu raison de rappeler que le Président de la République lui-même a demandé et obtenu la mise en place de cette commission d'enquête, laquelle a pu travailler dans des conditions jugées décentes par tous, après de nouvelles interventions de la France. C'est en partie grâce à la France qu'elle a pu travailler dans ces conditions. Néanmoins, depuis que les conclusions sont connues, les choses n'ont plus avancé.

Si je veux saluer, monsieur le ministre, pour reprendre vos termes, votre engagement en la matière, je ne peux pas en dire autant des résultats obtenus. Je suis forcé d'observer que, par rapport aux événements que vous avez évoqués, vous vous êtes montré, sans doute du fait des circonstances, plus efficace pour obtenir des informations et des élargissements dans d'autres situations. Quand je parle de vous, je vise la France de manière générale. Si je me réfère à une affaire contemporaine de celle dont nous parlons, il est clair que la France a été plus rapide à obtenir l'élargissement des membres de l'Arche de Zoé que des informations sur le sort de M. Saleh

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